Gabriel Attal à Matignon depuis 100 jours, ces trois défis qui l’attendent pour les 100 prochains

Pas « de belles paroles, de grandes tirades ou de beaux discours » mais « des actes rapides et concrets ». Voici ce que déclarait le Premier ministre Gabriel Attal le 30 janvier dernier dans sa déclaration de politique générale. Après avoir célébré ses 100 jours à Matignon mercredi 17 avril, il va procéder lui-même à un premier bilan.

Pas moins de quatre rendez-vous sont prévus : un discours à Viry-Châtillon avant une longue interview sur BFMTV dans la soirée puis deux déplacements à Valence (samedi) et Nice (lundi) autour des thèmes autorité et jeunesse. Une marotte pour le chef de gouvernement qui dès sa nomination le 9 janvier a dit sa volonté « d’emmener l’école avec lui à Matignon ».

Depuis, l’omniprésent Gabriel Attal a multiplié déplacements et annonces dans tous les domaines, de l’agriculture à l’éducation en passant par le budget, au risque parfois d’éclipser certains de ses ministres. Ses résultats sont contestés. Sa cote de popularité s’en ressent et chute de 6 points entre janvier et avril, selon le baromètre YouGov pour Le HuffPost. Et la course d’obstacles est encore devant lui.

Autorité, scolarité et bilan mitigé

La première échéance n’est pas calendaire mais a été fixée par Attal lui-même. Avec son fameux « tu casses, tu répares ; tu salis, tu nettoies ; tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter », le Premier ministre a imposé la notion régalienne de sécurité comme une de ses priorités. Mais la concrétisation tarde.

Ce 17 avril, le Garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti a évoqué sans détailler un projet de loi « concernant la façon doit on doit appréhender les mineurs qui commettent des actes de délinquance » avec un volet éducatif et un répressif.

 « Nous allons venir en aide aux parents qui sont dépassés. En revanche, nous allons faire en sorte de sanctionner les parents défaillants », assure-t-il. Les travaux d’intérêt éducatif pour les mineurs délinquants de moins de 16 ans annoncés par Gabriel Attal en janvier pourraient y figurer. Mais selon le calendrier communiqué en mars, le texte n’arrivera pas avant la mi-mai au Parlement.

En parallèle, le Premier ministre a été confronté à deux drames qui ont remis la violence à l’école sur le devant de la scène.

Le premier avec la violente agression de Samara devant son collège de Montpellier. Le second s’est soldé par la mort de Shemseddine, 15 ans, passé à tabac près de son collège à Viry-Châtillon. Tout en refusant de faire un lien direct avec l’école, Emmanuel Macron a dit sa volonté de « protéger » ce « sanctuaire » d’une « forme de violence désinhibée chez les plus jeunes ».

De quoi mettre la pression sur son Premier ministre qui se sait attendu au tournant et qui se rend justement ce jeudi matin à Viry-Châtillon pour un discours sur « l’autorité ».

Son déplacement comportera un volet judiciaire et un autre sur « le rôle de l’école », notamment avec la question des internats. Ses deux déplacements post-100 jours seront consacrés aux mêmes sujets, avec la possible généralisation des « forces d’action républicaine » dans les quartiers.

L’« arme anti-Bardella » enrayée

Le couperet du deuxième défi de Gabriel Attal tombera le 9 juin. Alors que la liste de Jordan Bardella caracole en tête des sondages, le camp présidentiel fait tout pour installer le duel avec les représentants de l’extrême droite. Et Gabriel Attal, personnalité médiatique habituée des punchlines, était tout désigné pour le poste.

Il s’y est employé avec application : à Lille, lors du lancement de campagne de Valérie Hayer le 9 mars puis à chaque fois qu’il en a l’occasion, y compris dans l’enceinte de l’Assemblée nationale où il dispose désormais d’une tribune en solitaire le mercredi.

Las, la méthode divise au sein du camp présidentiel. 

« Je ne crois pas que la solution (pour faire progresser la liste Hayer, ndlr) soit de faire du Rassemblement national le seul sujet de la campagne électorale », glisse le président du MoDem François Bayrou le 10 mars sur BFMTV, y voyant plutôt un « cadeau ».

Cent jours après l’arrivée de celui qui était vu comme « l’arme anti-Bardella », les résultats ne sont pas là : la liste de Valérie Hayer n’a pas connu la dynamique espérée et reste en deçà des 20 % quand Jordan Bardella dépasse les 30, selon notre compilateur de sondages.

Il reste moins de 50 jours à Gabriel Attal pour faire monter sa candidate. Faute de quoi, le chef de la majorité devra (en partie) assumer la défaite de son camp, plus ou moins retentissante selon l’écart avec l’extrême droite et avec les 22,4 % de 2019.

Budget, censure et majorité éparpillée

Le dernier défi est le plus grand pour le Premier ministre qui y risque son poste. Il tient en trois lettres et quatre chiffres : PLF 2025. Avec des comptes publics dans le rouge et des économies de 20 milliards à trouver, l’automne budgétaire s’annonce compliquée. Les arbitrages sur le budget 2025 sont attendus entre début juin et mi-juillet, pour une rédaction dans l’été et une présentation au Parlement à partir d’octobre.

Mais les difficultés pourraient arriver avant l’été si les oppositions décidaient de sanctionner l’absence de projet de loi de finance rectificative. 

« Les chiffres actuels sont tellement différents de ce qui a été annoncé qu’on ne peut pas attendre la fin de l’année pour voter sur la politique budgétaire », estime Éric Coquerel. Le président (France insoumise) de la Commission des finances est rejoint dans son analyse par les autres forces de gauche et par le groupe Liot au centre du jeu. Cela pourrait passer par le dépôt d’une motion de censure, arme que Les Républicains menacent eux aussi une nouvelle fois d’actionner.

Lors de l’examen de la réforme des retraites en mars 2023, Élisabeth Borne avait sauvé son poste à neuf voix, une marge qui ne résisterait pas à une coalition des oppositions.

Et même s’il sauve son poste, Gabriel Attal restera confronté aux divisions de sa majorité, que les questions budgétaires ont remis en lumière. La réforme de l’assurance-chômage brusque la gauche de son camp quand la taxation des superprofits (défendue par le MoDem et évoquée Yaël Braun-Pivet) est rejetée par son aile droite.

Conscient du péril, Gabriel Attal a lancé une mission composée de parlementaires des trois groupes de la majorité pour discuter de « la taxation des rentes ». « On doit surtout avancer de manière coordonnée et cohérente, c’est l’objet de cette mission », a-t-il déclaré aux élus en l’annonçant le 2 avril. C’est aussi son objectif à lui.

huffpost

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