Aux États-Unis, les IA surveillent désormais les frontières

Des migrants marchent le long de la frontière entre les États-Unis et le Mexique dans un campement de fortune, à El Paso, au Texas, aux États-Unis, le 3 avril 2024. © Paul Ratje / Reuters

L’immigration et la frontière sont deux thématiques régulièrement plébiscitées par le Parti républicain pour attirer les électeurs, en novembre prochain, lors de la présidentielle américaine. Mais saviez-vous que la frontière entre le Mexique et les États-Unis est surveillée par les intelligences artificielles ?

Il y a un an, en avril 2023, Alejandro Mayorkas, secrétaire d’État à la sécurité intérieure des États-Unis, créait une équipe spéciale en charge de l’intelligence artificielle.

« Nous cherchons à déployer les IA de façon à mieux contrôler les cargaisons, à identifier les biens produits par du travail forcé et pour gérer les risques. Nous allons voir comment utiliser cette technologie pour mieux détecter du transport de la drogue fentanyl », déclarait-il alors.

Les IA calculent notamment le poids, la masse en fonction de ce qui est déclaré et détecte des anomalies dans les cargaisons de camions. Mais pas uniquement.

Cette technologie est aussi utilisée pour identifier les mouvements détectés par des caméras automatiques sur des tours de surveillance. Elle analyse si ces mouvements sont des animaux sauvages, du bétail, des véhicules des gardes frontières ou des déplacements inhabituels ou récurrents de véhicules, qui peuvent être des migrants tentant d’entrer discrètement aux États-Unis, ou bien leurs passeurs.

Mais ces nouveaux outils de surveillance ne rendent pas à l’aise les habitants de la région, ni les propriétaires de terrains frontaliers.

Mariana Trevino Wright dirige le Centre national des papillons situé à Mission, en périphérie de McCallen. C’est un centre qui possède un terrain qui jouxte le Rio Grande. « Je suis allé dans la salle de contrôle des gardes frontières stationnés à McAllen, là où les agents travaillent avec les caméras de ces tours et les autres technologies qui s’y trouvent.

Ces caméras observent sur 360°, de jour comme de nuit. Elles ont des senseurs qui analysent les mouvements sur une dizaine de kilomètres à la ronde. Les tours sont sur la frontière. Elles peuvent facilement voir ce qui se passe au Mexique », constate Mariana Trevino Wright.

Au moins 300 tours de surveillance de ce type

Ces nouvelles tours automatiques sont alimentées par des panneaux solaires, ce qui garantit leur autonomie. Elles se situent la plupart du temps sur des terrains privés ou des réserves indiennes, là où il y a peu d’agents frontaliers. Il existe au moins 300 tours de surveillance de ce type, qui s’étendent de la côte californienne à la pointe du Texas, selon l’organisation Electronic Frontier Foundation qui les a recensées.

Mais pour le secrétaire d’État, Alejandro Mayorkas, leur usage restera pondéré et réfléchi. « Notre département va utiliser les intelligences artificielles pour sécuriser notre patrie de façon responsable. Dans le même temps, nous allons nous assurer que l’usage des IA est testé avec rigueur pour empêcher les biais et les impacts discriminatoires.

Nous allons aussi nous assurer que cet usage est facilement compréhensible pour nos concitoyens », note le secrétaire d’État.

Selon leurs fabricants, ces tours peuvent être programmées pour ne pas enregistrer les mouvements au Mexique, ni analyser ce qui se passe dans les maisons de particuliers. Mais les randonneurs et les habitants frontaliers ne sont pas convaincus que leur vie n’est pas enregistrée. « Vous êtes complètement surveillés, enregistrés et analysés.

Il y a un maillage numérique tout le long de la frontière, qui enregistre les adresses IP des téléphones ou ordinateurs que vous avez avec vous. L’office des gardes frontières a admis avoir déjà déployé et utilisé cette technologie contre des citoyens américains pendant les manifestations, après la mort de George Floyd à Minneapolis.

Et cela se passe tous les jours à la frontière !», assure Mariana Trevino Wright.

Des chiens-robotss capables de vérifier des anomalies

Des chiens-robotss sont la dernière étape de l’automatisation de la surveillance frontalière. Capables d’aller vérifier les anomalies détectées par les intelligences artificielles, ils pourront transmettre des données de localisation ou des vidéos, en parallèle des drones déjà pilotés par les agents fédéraux.

« Les autorités ne vont jamais éliminer les patrouilles humaines, mais les chiens-robotss ne sont pas de la science-fiction.

Ils ont été développés. Et le gouvernement cherche à les déployer. Leur impact sera le même que celui des chiens utilisés par les miliciens blancs qui recherchaient des esclaves en fuite ou considérés comme rebelles aux États-Unis. Et ces milices ont été dissoutes il y a seulement 150 ans », poursuit Mariana Trevino Wright

En 2022, le président mexicain a signé un accord avec la Maison Blanche pour investir 1,5 milliard dans ces technologies frontalières.


RFI 

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