Nigeria: après plus de 5 ans de prison, le dirigeant de la minorité chiite relaxé et libéré

Derrière les barreaux depuis plus de cinq ans, le dirigeant de la minorité chiite du Nigeria, Ibrahim Zakzaky, et sa femme, accusés de meurtre, ont été relaxés mercredi par le tribunal de Kaduna (Nord) et ont retrouvé la liberté.

Ibrahim Zakzaky, fondateur du Mouvement islamique du Nigeria (MIN), était détenu avec son épouse Zeenah Ibrahim depuis décembre 2015, après que des violences eurent éclaté pendant une procession religieuse à Zaria (Nord). L’armée avait tiré, faisant plus de 350 morts, pour la plupart des chiites non armés, selon des organisations de défense des droits de l’Homme.

« La Cour a relaxé et acquitté le cheikh Ibrahim Zakzaky et sa femme de toutes les accusations portées contre eux. Ils ont été libérés aujourd’hui », a déclaré à l’AFP l’un de ses avocats, Sadau Garba.

M. Zakzaky et sa femme étaient notamment accusés du meurtre d’un soldat lors de ces manifestations.

Le principal représentant du parquet, Dari Bayero, a confirmé que le couple avait été libéré, mais a indiqué son intention de faire appel.

« Le tribunal a jugé qu’aucun des témoins que nous avons présentés au tribunal n’avait apporté de preuve convaincante de leur culpabilité », a-t-il déclaré à l’AFP.

« Cela ne signifie pas qu’ils ne peuvent plus être poursuivis (…) nous allons certainement présenter des accusations en appel », a-t-il ajouté.

L’avocat du leader religieux et de sa femme a affirmé qu’ils allaient « certainement demander des dommages et intérêts au gouvernement de l’État de Kaduna pour toutes les privations et les souffrances subies ».

« Ils doivent maintenant rentrer chez eux, se reposer et répondre à leurs besoins médicaux urgents », a-t-il poursuivi.

Fin 2016, un tribunal fédéral avait jugé illégale la détention du chef religieux et ordonné sa libération. Mais cette décision n’avait jamais été exécutée.

Le MIN, inspiré par la Révolution islamique en Iran à la fin des années 1970, est aujourd’hui encore proche de Téhéran et rencontre une grande hostilité au Nigeria, où l’élite musulmane sunnite ne cache pas ses affinités avec l’Arabie saoudite. Le mouvement a été interdit par les autorités en 2019.

Ses manifestations sont régulièrement matées dans le sang.

– « Victoire de la persévérance » –

« Ce jugement ne leur donne pas seulement raison, ainsi qu’à tous les membres du MIN au Nigeria, mais il est aussi une victoire de la persévérance face à l’extrême persécution », a réagi le mouvement dans un communiqué.

« C’est une victoire de la vérité et de la justice contre la tyrannie et l’impunité », selon le communiqué.

L’organisation de défense des droits humains Amnesty International a dénoncé sur Twitter la « détention illégale » du cheikh Zakzaky, se demandant si elle ne s’inscrivait pas dans une « tentative pour dissimuler les crimes atroces commis par les membres des forces de sécurité à Zaria en décembre 2015 qui ont fait des centaines morts ».

L’armée nigériane avait alors accusé les membres du MIN de vouloir tendre une embuscade au chef de l’armée à Zaria.

Outres les près de 350 chiites, la plupart non armés, tués et enterrés dans des fosses communes par des militaires, des centaines d’autres avaient été arrêtés.

Un rapport officiel de l’Etat de Kaduna avait par la suite reconnu que l’armée avait agi de manière disproportionnée et que les militaires impliqués devaient être punis, mais aucun n’a jamais été poursuivi.

En 2019, plus d’une centaine de détenus avaient déjà été libérés, puis en février 2020, plus de 80 autres, mais M. Zakzaky et sa femme étaient toujours derrière les barreaux.

La minorité chiite nigériane compterait quelque 4 millions de fidèles, sur 80 à 85 millions de musulmans au Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique. Le Sud du pays est lui majoritairement chrétien.

Source: afp

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