Après avoir fait redécouvrir James Baldwin dans le documentaire à succès « I’m not your negro », le cinéaste haïtien Raoul Peck se penche sur le photographe sud-africain Ernest Cole qui a documenté les horreurs de l’apartheid.
Présenté mardi en séance spéciale à Cannes, « Ernest Cole, photographe » se penche sur le parcours de cet artiste, rendu célèbre à 27 ans grâce à son livre « House of Bondage », sur la réalité de la ségrégation raciale dans son pays. Ce qui l’a conduit à s’exiler à New York puis en Europe.
Il ne pourra jamais retourner en Afrique du Sud et mourra prématurément à 49 ans, en 1990, huit jours après la libération de Nelson Mandela.
« Ce documentaire est le portrait d’un homme seul, Ernest Cole a vraiment espéré retrouver un monde libre », explique le réalisateur, connu pour alterner entre fiction et documentaire.
« +I’m not your negro+, j’ai travaillé cinq ans dessus comme fiction jusqu’à ce que je bascule. +Lumumba+ au départ c’était une fiction. Le monde du ciné n’était pas prêt, j’ai basculé en documentaire et puis je suis revenu à la fiction dix ans après », explique-il à l’AFP.
« Une fois que j’ai mis mes griffes sur le sujet, l’important est qu’il sorte ».
Concernant Ernest Cole, l’ambition était de reconnecter son histoire « avec le monde d’aujourd’hui ». C’est la déchirure et les tourments de l’exil qui ont touché Raoul Peck. Il y a vu un écho avec son propre parcours: avec ses parents, il a fui Haïti à l’âge de 8 ans et a vécu au Congo d’où lui parvenait les informations sur « les massacres de la dictature » des Duvalier.
Pour ce nouveau documentaire, il s’est appuyé sur des montagnes d’archives, les photos de Cole ainsi que ses lettres et des témoignages de proches lus par une voix off. Une manière de lui « rendre le pouvoir », lui l’artiste qui a vécu dans une solitude extrême, a cessé un temps de photographier et est mort dans la misère, presque clochardisé.
Le film raconte aussi comment, en 2017, 60.000 négatifs de son travail ont été découverts dans le coffre d’une banque suédoise.
Ancien ministre de la Culture d’Haïti (1995-1997), Raoul Peck prépare un documentaire sur l’ex-président haïtien Jovenel Moïse, tué par balles en juillet 2021, par un commando armé composé de 28 hommes qui s’étaient faits passer pour des agents de l’Agence américaine antidrogue.
AFP