Quatre ressortissants tunisiens sont toujours portés disparus depuis le naufrage de leur canot le 27 mai. Ils avaient pris la mer avec 17 autres personnes, secourues elles par les autorités, depuis la ville de Chebba.
Nouveau drame au large de la Tunisie. Depuis lundi 27 mai, quatre migrants tunisiens sont portés disparus après que leur embarcation a sombré près de Chebba, à l’est du pays.
Ces exilés ont pris la mer avec 17 autres personnes – secourues – dont « sept étrangers », terme utilisé par les autorités pour désigner les ressortissants d’Afrique subsaharienne.
Le même jour, les garde-côtes ont porté secours à 153 migrants tunisiens dont au moins trois femmes et un bébé d’un mois, au large de la Goulette, port de la banlieue nord de Tunis, selon le porte-parole de la Garde nationale Houcem Eddine Jebabli.
La Tunisie est, avec la Libye, l’un des principaux points de départ des migrants qui risquent des traversées périlleuses en mer Méditerranée dans l’espoir de rejoindre l’Europe.
Du 1er janvier à la mi-mai, 103 embarcations de fortune ont fait naufrage et 341 corps dont 336 de migrants étrangers ont été repêchés au large de la Tunisie, a indiqué récemment le ministère de l’Intérieur.
Sur les quatre premiers mois de l’année, la Garde nationale a dit avoir « intercepté ou secouru » 21 545 personnes, en hausse de 22,5% sur un an.
« C’est à nous d’enquêter »
Si la grande majorité des migrants qui s’engagent sur cette route sont originaires d’Afrique subsaharienne, de nombreux tunisiens cherchent aussi à gagner le pays de cette manière. Le 19 mai, la Garde nationale avait annoncé la disparition en mer de 23 migrants tunisiens partis deux semaines plus tôt de Nabeul, dans le nord-est de la Tunisie.
L’an dernier, les Tunisiens représentaient la deuxième nationalité parmi les 150 000 migrants arrivés de manière irrégulière en Italie, juste derrière les Guinéens.
Jusqu’à présent cette année, plus de 2 700 Tunisiens sont arrivés dans le pays par la mer, derrière les Bangladais et les Syriens, d’après les derniers chiffres du ministère de l’Intérieur italien.
Ces candidats à l’exil fuient la grave crise économique dans laquelle la Tunisie est empêtré depuis des années. En 2023, la croissance s’y élève à 1,3%, soit la moitié de 2022. Le chômage des jeunes, à 38%, est un autre des facteurs décisifs de cette immigration massive.
En janvier dernier, la disparition d’une quarantaine de citoyens tunisiens avait provoqué l’ire de leurs familles.
Le tribunal de Sfax a ouvert une enquête, mais les recherches de corps en mer n’ont rien donné. Fathi Ben Farhat, professeur de Taekwondo de 48 ans, à la recherche de son neveu Malek de 17 ans, avait confié sa détresse à RFI : « On se retrouve dans des situations où c’est à nous d’enquêter parce que nous n’avons aucune information.
Les députés, le gouverneur, la municipalité, nous appellent, nous les familles, pour avoir des informations sur les recherches, ils n’appellent pas la police. C’est pour vous dire à quel point on est seuls et livrés à nous-même ».
« Ils brûlent nos affaires »
Les autres candidats à l’exil présents en Tunisie, des Subsahariens, vivent dans des conditions très difficiles. Des milliers d’entre eux, de peur des arrestations arbitraires et des agressions dans le centre-ville de Sfax notamment, tentent de survivre dans des champs d’oliviers en pleine campagne.
Depuis quelques semaines, la police intervient régulièrement dans ces camps et détruit les tentes et les affaires des migrants.
« Aidez-nous, ils brûlent toutes nos affaires », « Ils nous agressent », « Ils nous demandent de partir, mais pour aller où ? » font partie des nombreux messages reçus à la rédaction d’InfoMigrants.
« Avant, quand la Garde nationale venait, ils saisissaient du matériel, le carburant qu’on stocke pour les traversées [de la Méditerranée], les canots… », explique Salif*, un Guinéen installé au km 24 depuis plusieurs semaines. « Maintenant, ils détruisent tout, ils brûlent nos affaires, ils veulent qu’on parte de la zone ».
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