Grâce à des simulations numériques, une équipe internationale menée par le LSCE (CEA-CNRS-UVSQ) montre que l’amendement des sols à grande échelle avec des poudres de basalte riches en phosphore pourrait, dans le futur, augmenter fortement le stockage du carbone par les écosystèmes terrestres.
Compte tenu des projections à court terme des émissions de gaz à effet de serre, il faudra extraire le dioxyde de carbone de l’atmosphère pour espérer atteindre les objectifs climatiques fixés par les Accords de Paris en 2015. Ces émissions « négatives » soulèvent un incroyable défi. Comment développer, dans les délais impartis et à l’échelle de la planète, des technologies robustes, peu onéreuses et acceptables par tous ?
Les technologies d’émissions négatives (NET) naturelles les plus emblématiques consistent à renforcer les puits de carbone des écosystèmes terrestres, comme la plantation d’arbres, et à produire de la bioénergie avec capture et stockage de CO2.
La NET objet de cette étude consiste à amender les sols avec des minéraux qui absorbent du CO2, c’est-à-dire à accélérer le cycle géologique du carbone. Le basalte est une roche abondante qui, sous forme de poudre, réagit avec le dioxyde de carbone de l’atmosphère et l’élimine selon deux voies. D’une part, le CO2 forme de l’acide carbonique qui dissout le basalte et forme des ions bicarbonates (HCO3-) qui sont ensuite transportés par les rivières et stockés dans les océans. D’autre part, le basalte libère en se dissolvant des nutriments comme le phosphore, qui fertilisent les sols et facilitent la croissance des plantes, la production de biomasse, et in fine, le stockage du carbone dans de nombreux écosystèmes.
En s’appuyant sur des simulations numériques, une équipe internationale menée par le LSCE a quantifié pour la première fois la masse de carbone potentiellement stockable par l’amendement des sols à grande échelle avec de la poudre de basalte riche en phosphore. À la différence des études précédentes de ce type portant sur l’amendements de terres agricoles, les chercheurs ont modélisé un scénario de plus grande envergure, avec un épandage global sur tous types de terrains.
Ils montrent que près d’une gigatonne de CO2 (109 t) par an pourrait être éliminée de l’atmosphère à un coût modéré (150 $ par tonne de CO2). Cette simulation d’un scénario idéal permet d’estimer le potentiel biophysique et le temps caractéristique de cette NET. Elle révèle que l’effet est maximal dans les régions où les sols sont appauvris.
Selon les chercheurs, l’amendement des sols par le basalte a été sous-estimé jusqu’à présent et cette option devrait être étudiée sérieusement dans le cadre de l’atténuation du changement climatique par la gestion des terres. Pour parvenir à l’objectif visé, il faudrait extraire du basalte à grande échelle et déployer des systèmes d’épandage aéroportés à faible empreinte carbone comme des drones ou des dirigeables, dans des zones reculées. Cependant, des effets collatéraux indésirables, analysés dans l’étude – comme le risque d’eutrophisation de certaines zones sensibles – ne peuvent encore être écartés.
Source: cea