Nigéria : le prélèvement d’impôts sur des superprofits de banques divise

Une annonce de l’association des dirigeants de banque est attendue sur le sujet le 12 Août. Mais déjà les positions favorables de Tony Elumelu et de Femi Otedola, des figures influentes du secteur bancaire, ne font pas consensus.

Les dirigeants bancaires nigérians sont partagés face à une nouvelle taxe de 50% (70% selon des informations plus récentes) sur les superprofits réalisés à travers les de gains de change de devise, adoptée par le parlement le 23 juillet 2024. Cette mesure, qui est soutenue par certaines figures influentes du secteur, divise l’industrie financière du pays le plus peuplé d’Afrique.

Selon des médias locaux Tony Elumelu (photo), président de United Bank for Africa (UBA), a déclaré à sa sortie d’une rencontre avec le président Bola Tinubu: « Nous soutenons le gouvernement » concernant cette taxe.

Femi Otedola, président de FBN Holding, a pour sa part, critiqué « la culture de l’ostentation » de certains PDG de banques, estimant ainsi que la mesure se justifiait. « Une tendance préoccupante a émergé où certains PDG de banques privilégient le gain personnel au détriment de leur devoir envers les actionnaires et les clients », a déclaré M. Otedola selon des propos rapportés par des médias locaux. « Les valeurs fondamentales de la banque — la confiance, l’intégrité et le service — doivent être respectées. Je suis particulièrement critique à l’égard de la culture de l’ostentation, notamment la possession et l’exploitation de jets privés »

Cependant, l’association des dirigeants de banques nigérianes reste prudente, promettant une communication officielle après son assemblée générale du 12 août.

Son président qui est aussi le PDG de First City Monument Bank Group a déjà exprimé ses réserves, expliquant que seulement 10% des gains de change rapportés sont réellement réalisés. Une révélation qui soulève des questions sur la transparence des rapports financiers présentés aux investisseurs.

Les banques soulignent plusieurs risques.

Il y a tout d’abord l’impact sur la trésorerie. On a déjà appris que les gains comptables ne se traduisent pas nécessairement par des avoirs liquides. Il y a ensuite le risque de crédit. Les débiteurs dépendant des importations pourraient avoir du mal à rembourser leurs prêts en raison d’une augmentation de leurs charges. Il y a enfin de nouvelles exigences en capital. La mesure intervient alors que la Banque centrale demande déjà une augmentation des fonds propres.

Certains ont aussi critiqué un « deux poids, deux mesures » par rapport au secteur pétrolier, qui a bénéficié de superprofits sans taxation supplémentaire.

Les autorités justifient cette différence par l’origine de la dévaluation du naira qui est le fait d’une politique locale, contrairement aux fluctuations du pétrole qui dépendent de la conjoncture internationale.

La mise en œuvre de cette taxe et ses potentielles compensations pour les entreprises affectées par la dévaluation restent incertaines.

Mais un des principaux enjeux à surveiller est que cette mesure pourrait redéfinir l’équilibre entre contribution fiscale et stabilité du secteur bancaire nigérian.

Cela pourrait affecter la capacité future des banques à poursuivre leur expansion africaine, alors que le départ des banques occidentales continue de créer un vide à compenser.

Aussi, on a noté un regain d’intérêt des investisseurs étrangers pour le secteur bancaire, car celui-ci offrait des opportunités de rendement intéressantes au regard de la croissance des marges. Au premier trimestre le secteur avait reçu jusqu’à 2 milliards $. L’évolution des choses est à suivre.

ecofin

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