De notre envoyé spécial à Clichy-sous-Bois – Aviron, ski de fond, biathlon, cyclisme, Jeux d’été ou d’hiver… La sportive ukraino-américaine Oksana Masters est depuis longtemps une légende du paralympisme pour sa capacité à performer sur tous les terrains. Mercredi, elle a ajouté une médaille à son immense collection en remportant le contre-la-montre de cyclisme sur route des Jeux de Paris, catégorie H4-5.
La légende de la sportive ukraino-américaine Oksana Masters ne cesse de grandir : cette surdouée de 35 ans a remporté, mercredi 4 septembre, sa 18e médaille paralympique sur l’épreuve du contre-la-montre de cyclisme sur route.
« C’est définitivement une de mes médailles préférées.
Défendre mon titre en contre-la-montre, à Paris qui est un haut-lieu du cyclisme… C’est spécial », a-t-elle déclaré à l’arrivée, encore sous le coup de l’émotion.
Sur les routes de Clichy-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, sous les couleurs de Team USA, Oksana Masters a survolé l’asphalte, ne laissant que les miettes à ses 12 concurrentes.
« Je suis un être humain. Nous avons tous des bons et des mauvais jours. Dans la dernière montée, j’avais mal mais je savais que si j’avais mal, tout le monde avait mal. Je me suis dit qu’il fallait que je continue pour rattraper mon retard en me rappelant ce pourquoi je me battais », a détaillé Oksana Masters
Pour la légende du paralympisme, il s’agit de la 7e médaille d’or de sa carrière. Des médailles conquises dans 4 disciplines différentes, à la fois lors de Jeux d’été et d’hiver.
De multiples malformations à la naissance près de Tchernobyl
Oksana Masters naît en 1989, à Khmelnitski, à quelques centaines de kilomètres de Tchernobyl. Très probablement touchée par les radiations de la catastrophe nucléaire qui s’est déroulée trois ans plus tôt, elle compte alors de multiples malformations, dont des doigts de mains palmés, une absence de tibias et une jambe plus courte que l’autre. Elle sera plus tard amputée des deux jambes.
Abandonnée dès sa naissance car ces malformations « allaient nécessiter une aide médicale importante », explique-t-elle sur son site Internet, elle passe ses premières années dans trois orphelinats différents. Elle y subira des violences et abus avant d’être finalement adoptée par une Américaine, Gay Masters qui lui sauvera la vie.
« Toutes ces émotions que je ressens, je sais ce qu’elles signifient : c’est cette petite Oksana qui n’a jamais cru en elle », explique la championne.
Oksana Masters obtient la nationalité américaine et commence à goûter aux joies du sport. Son histoire d’amour avec l’olympisme débute à Londres. Elle en ramène une médaille de bronze en aviron. Une blessure au dos l’éloigne de cette discipline. Qu’à cela ne tienne, elle change de sport comme de combinaison de sport ! Elle obtient ensuite des médailles en ski de fond (Sotchi 2014, Pyeongchang 2018), en cyclisme (Tokyo 2021) et enfin en biathlon (Pékin 2022).
Preuve de son importance actuelle dans le mouvement paralympique, elle a fait partie des derniers relayeurs de la flamme olympique, mercredi 28 août, lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Paris.
Une voix pour l’Ukraine
Malgré les années difficiles passées dans son pays natal, Oksana Masters garde l’Ukraine dans son coeur. Sur sa page Instagram, elle affiche ses deux drapeaux : celui de son pays d’adoption, et celui de son lieu de naissance.
Lors des JO d’hiver de Pékin, en 2022, qui ont débuté quelques jours seulement après l’invasion russe de l’Ukraine, elle a dédiée sa médaille en sprint assis « autant pour l’équipe des États-Unis que pour l’Ukraine ».
« Je suis tellement fière d’être ukrainienne.
Tout ce que j’ai appris en tant qu’athlète, la résilience, la lutte et le travail acharné, je l’ai appris de l’Ukraine », a-t-elle déclaré avant les Jeux de Pékin. Un discours qui n’a pas changé depuis, Oksana Masters se disant également encouragée par les athlètes ukrainiens.
Dès l’arrivée, elle a fait part de son intention d’offrir à un orphelinat ukrainien les primes qu’elle percevra pour sa médaille. Et, elle tenait à envoyer deux messages :
« Nous avons tous notre place sur la ligne de départ, quelle que soit notre apparence », loue-t-elle. « Si vous voulez faire plus d’un sport, faites-le. Et, qu’il s’agisse de votre première ou de votre neuvième tentative, n’abandonnez jamais. Continuez à pousser jusqu’au bout. Ce n’est qu’une question de temps. »
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