Berlin cherche des moyens pour dissuader les demandeurs d’asile déboutés de rester en Allemagne

Réagissant à l’attentat de Solingen, perpétré par un demandeur d’asile syrien débouté, le gouvernement allemand a proposé de nouvelles mesures pour réformer le droit d’asile. Voici ce que Berlin propose.

Berlin veut encore durcir sa politique d’asile après la mort de trois personnes, à Solingen le 23 septembre, poignardées par un demandeur d’asile syrien de 26 ans. L’homme avait été débouté du droit d’asile.

Le chancelier Olaf Scholz estime que les autorités « doivent tirer les leçons de l’attaque de Solingen, ville située dans l’ouest de l’Allemagne. Un homme a tué trois personnes et blessé huit autres. Le meurtrier est un homme originaire de Syrie. Il est arrivé en Allemagne en 2022. Le groupe terroriste État islamique (EI) affirme que l’attaque a été perpétrée en son nom ».

Moins d’une semaine plus tard, le 29 août, le gouvernement a annoncé un ensemble de nouvelles mesures de sécurité.

Certains demandeurs d’asile ne bénéficieront plus de l’ensemble des prestations sociales, tandis que les expulsions doivent être accélérées.

Depuis, de nouvelles réunions avec les dirigeants des Länder, le 16 Etats qui composent l’Allemagne fédérale, ainsi que l’opposition conservatrice, planchent sur d’autres possibilités de réformes migratoires.

Voici les principales mesures du projet de loi annoncé pour l’instant.

Baisse des prestations dans le cas des personnes « dublinables »
L’auteur présumé du triple meurtre de Solingen aurait dû être expulsé, mais les autorités n’étaient pas parvenues à le localiser.

Le suspect aurait en effet dû être renvoyé en Bulgarie l’année dernière en vertu des règles de l’Union européenne (UE) connues sous le nom de « règlement de Dublin ». Celui-ci prévoit que le pays par lequel un demandeur d’asile est entré dans l’UE est responsable du traitement de sa demande de protection.

En conséquence, le gouvernement souhaite supprimer les prestations sociales pour les personnes enregistrées pour la première fois dans un autre Etat membre de l’UE, à condition que ce pays accepte de les reprendre.

Quelles aides seront supprimées ?
Selon la ministre de l’intérieur Nancy Faeser, seuls les aides financières destinées à quitter l’Allemagne seront mises à disposition des personnes dublinées.

Toutefois, elle a également assuré qu’un logement et la nourriture seraient fournis jusqu’au départ, affirmant qu’en Allemagne, « personne ne mourra de faim ou ne dormira dans la rue ». « Nous veillons à ce que toutes les personnes concernées soient traitées avec humanité », stipule le document présentant le projet de loi.

Quel est l’objectif de la réduction de l’aide financière ?
Selon le ministre allemand de la Justice, Marco Buschmann, la suppression de ces prestations sociales accélérerait les expulsions. Elle mettrait la pression sur les personnes dans l’obligation de quitter le pays, et qui se retrouveraient sans argent liquide en Allemagne.

Par exemple, si un demandeur d’asile est d’abord arrivé en Grèce et y a été enregistré, mais qu’il s’est ensuite rendu en Allemagne et y est resté malgré l’ordre de retourner en Grèce, il ne touchera plus d’aide financière.

L'attentat de Solingen a précédé des scrutins régionaux dans l'est de l'Allmagne, marqués par des résultats historiques pour l'extrême-droite | Photo : Jana Rodenbusch / Reuters

Les organisations de défense des droits des réfugiés dénoncent un projet de loi inadmissible.

L’ONG Pro Asyl a déclaré que « les prestations sociales ne doivent pas être supprimées ou réduites arbitrairement dans le but d’un soi-disant effet dissuasif ».

Le parti des Verts, qui fait partie de la coalition gouvernementale, a également exprimé ses réserves, estimant qu’il devait être approuvé par la Cour constitutionnelle, qui s’est par le passé généralement rangée du côté des réfugiés et des demandeurs d’asile lorsque leurs aides financières étaient en jeu.

La ministre de l’intérieur, Nancy Faeser assure ne pas voir de blocage juridique, puisque le bien-être des personnes concernées dans un tel scénario est censé être garanti dans l’autre pays de l’UE.

Le règlement de Dublin, c’est quoi ?
Le règlement de Dublin stipule que les demandeurs d’asile doivent demander une protection dans le pays par lequel ils sont arrivés sur le sol européen.

S’ils poursuivent leur voyage et déposent une nouvelle demande ailleurs, celle-ci peut être annulée.

Cependant, de nombreuses procédures de renvoi s’éternisent. Au bout d’un certain délai, le pays où se trouve le demandeur d’asile finit par devoir prendre légalement en charge son dossier.

Pour le moment, les tentatives de réformer et de moderniser cet aspect du règlement ont échoué.

Sécurité, expulsions, voyages des réfugiés
Au-delà des modifications apportées à la législation sur l’asile, d’autres mesures sont prévues.

Le gouvernement a proposé d’interdire les couteaux lors des grands événements publics.

En outre, les expulsions vers des pays tiers en dehors de l’UE doivent être accélérées. Sur ce point, aucune mesure n’a été rendue publique.

La politique relative aux voyages des réfugiés dans leur pays d’origine fera également l’objet d’un examen plus approfondi.

Ainsi, les réfugiés pourront perdre leur statut de protection s’ils se rendent dans leur pays d’origine, sauf pour des raisons précises, comme assister aux funérailles d’un membre de leur famille. Les réfugiés ukrainiens seraient exemptés de cette règle.

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