La résistance aux antimicrobiens, ces substances qui tuent ou ralentissent la croissance des bactéries, virus et autres parasites, est responsable de cinq millions de décès chaque année dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la Santé. Sans mesure pour contrer cette résistance, elle pourrait entraîner plus de décès que le cancer d’ici 2050.
Pour freiner cette tendance, la vaccination est cruciale, a rappelé lundi l’Institut européen Plotkin de vaccinologie (European Plotkin Institute for Vaccinology ou EPIV).
Les antimicrobiens – comme les antibiotiques, les antiviraux, les antifongiques et les antiparasitaires – sont des médicaments utilisés pour prévenir et traiter les infections chez les êtres humains, les animaux et les végétaux. La résistance aux antimicrobiens (RAM) survient lorsque les bactéries, les virus, les champignons et les parasites ne réagissent plus aux médicaments. Les infections deviennent alors de plus en plus difficiles, voire impossibles, à traiter.
“Les antibiotiques sont présents à trop grande échelle dans tout notre écosystème: les hôpitaux et l’industrie de la viande en usent, tandis que les généralistes ont tendance à les prescrire trop souvent”, a commenté la microbiologiste à l’EPIV Marie Hallin. “On remarque en effet que dans un cas sur trois, des antibiotiques (qui combattent les bactéries et non les virus, NDLR) sont prescrits à tort pour des infections virales.”
Prévention
Outre le fait de réduire l’usage à tout-va des antimicrobiens, la vaccination constitue un levier de choix pour agir préventivement. Comme les vaccins préviennent les infections (les pneumonies ou les méningites à pneumocoque, par exemple), ils ralentissent l’émergence d’agents pathogènes pharmacorésistants. De plus, l’immunité collective obtenue par la vaccination freine la circulation des virus, bactéries, etc. résistants au sein de la population, énumère l’Institut.
Développer l’usage des vaccins contre les virus peut sembler contre-intuitif pour lutter contre la résistance aux antibiotiques, reconnaît la microbiologiste. Toutefois, “si les gens sont protégés contre une certaine infection virale grâce à un vaccin, le risque de développer une infection bactérienne à la suite de cette infection virale diminue lui aussi”.
En Belgique, pour “maximiser l’effet des vaccins”, il faut justement augmenter cette couverture vaccinale et renforcer la surveillance épidémiologique en collectant des données au niveau national, plaide l’EPIV. Ces données permettent en effet d’orienter les politiques de santé publique. À l’ère post-Covid, qui a nourri la méfiance envers les vaccins, et alors que le prochain président américain Donald Trump a nommé un vaccinosceptique notoire, Robert F. Kennedy Jr, à la Santé, informer le grand public est “essentiel”, selon le centre de recherche.
Long terme
“Les gens ne se ruent pas sur les vaccins parce qu’ils ne voient pas les résultats de la vaccination à court terme. Cependant, leur efficacité sur le long terme est cruciale, en particulier pour les populations vulnérables comme les personnes âgées ou immunodéprimées”, a embrayé le directeur de l’EPIV, Arnaud Marchant. La Belgique doit aussi financer des études plus approfondies sur l’impact précis de la RAM pour élaborer des modèles prédictifs, qui permettront d’orienter le développement de futurs vaccins.
Enfin, il faut sensibiliser les soignants à une utilisation raisonnée des antibiotiques, conclut l’Institut.
“Les généralistes prescrivent trop souvent des antibiotiques aux jeunes enfants, car ils préfèrent ne prendre aucun risque. C’est compréhensible mais, à grande échelle, cela devient problématique”, a pointé Pierre Smeesters de l’hôpital universitaire de Bruxelles (HUB).
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