Bayrou, Lecornu, Vautrin, Cazeneuve… Dix noms qui circulent pour Matignon

Emmanuel Macron poursuit, mardi, ses consultations pour nommer un successeur au Premier ministre Michel Barnier, dont le gouvernement a été censuré la semaine dernière. Bayrou, Lecornu, Le Drian, Vautrin… Une dizaine de noms ont filtré. France 24 fait le point.

Président cherche Premier ministre. Qualités requises : personne expérimentée capable de bâtir autour de lui une majorité de 290 députés, ou au moins de ne pas se faire censurer par l’Assemblée nationale. Continuer la politique menée depuis sept ans est un plus.

Depuis la censure de l’éphémère gouvernement Barnier, Emmanuel Macron s’est remis en quête de la perle rare pour le poste de Premier ministre en menant des consultations avec les forces politiques. Il a, d’ailleurs, réuni mardi 10 décembre à l’Élysée les chefs des partis politiques, hors Rassemblement national et La France insoumise.

Le chef de l’État tente de résoudre la quadrature du cercle, entre reconduite du « socle commun » macronistes-LR ou élargissement de ses contours afin de dégager une coalition plus solide pour résister à une future tentative de censure. Si possible les deux en même temps et sans changer de cap économique. Plusieurs noms de personnalités politiques circulent pour incarner cette continuité.

François Bayrou, enfin son moment ?

Le président du Mouvement démocrate (MoDem) François Bayrou à son arrivée à l'Élysée à Paris, le 23 août 2024.

Il se dit modestement « prêt à aider », alors qu’il attend cette occasion depuis des années.

Le nom de François Bayrou, le président et fondateur du MoDem, revient très souvent au moment d’évoquer les favoris au poste de futur Premier ministre.

Il faut dire que le Béarnais, allié à Emmanuel Macron dès février 2017, coche de nombreuses cases : sa centralité politique lui permettrait de discuter autant avec la droite que la gauche. Pour le moment, le nom de François Bayrou est accueilli froidement par la gauche. Mais cette dernière pourrait être sensible à son opposition historique à la suppression de l’impôt sur la fortune et à son engagement à taxer les hauts revenus.

Enfin, François Bayrou pourrait bénéficier de la mansuétude du RN pour plusieurs raisons, à commencer par le fait qu’il défend depuis longtemps l’introduction de la proportionnelle aux élections législatives.

En tant que maire, il a aussi apporté son parrainage à Marine Le Pen pour qu’elle puisse se présenter à la présidentielle 2022. Enfin, il s’est opposé, fin novembre, à l’exécution d’une peine d’inéligibilité qui pourrait frapper la cheffe de file des députés d’extrême droite en cas de condamnation, en mars prochain, dans l’affaire des assistants parlementaires du RN au Parlement européen.

Sébastien Lecornu, le fidèle d’Emmanuel Macron

Le ministre des armées Sébastien Lecornu lors d'une conférence de presse au palais de l'Élysée, le 4 avril 2023.

Il l’assure, il n’est « candidat à rien ».

Ce qui n’empêche pas le nom du ministre démissionnaire des Armées de revenir régulièrement quand Emmanuel Macron se cherche un nouveau Premier ministre. Issu du parti Les Républicains, proche d’Emmanuel Macron et tour à tour secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, ministre délégué en charge des collectivités territoriales ou ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu détient le record de longévité au côté du chef de l’État.

Ce fidèle parmi les fidèles est aussi de ceux qui estiment qu’il faut parler au RN de Marine Le Pen. Le quotidien Libération a révélé l’été dernier que le ministre avait dîné à plusieurs reprises avec les figures de proue de l’extrême droite au printemps, avec Thierry Solère comme entremetteur.

Jean-Yves Le Drian, un autre fidèle

Jean-Yves Le Drian, alors ministre français des Affaires étrangères, lors d'une conférence de presse à Beyrouth, le 23 juillet 2020.
C’est un autre fidèle parmi les fidèles d’Emmanuel Macron dont le nom a circulé durant le week-end alors que les regards étaient tournés vers la Syrie et la réouverture de Notre-Dame de Paris.

À 77 ans, Jean-Yves Le Drian a une très longue carrière politique derrière lui.

Ministre de la Défense lors de l’intégralité du quinquennat de François Hollande, il est ministre des Affaires étrangères pendant le premier mandat d’Emmanuel Macron. Depuis 2023, il est son « envoyé personnel » pour le Liban.

Dès lors, difficile d’incarner autre chose que la continuité du quinquennat. De plus, l’intéressé « estime qu’il n’est pas l’homme de la situation », selon une interview d’un de ses proches à Politico.

Bernard Cazeneuve, le recalé de l’été

Bernard Cazeneuve à Créteil, le 10 juin 2023.

Le dernier Premier ministre de François Hollande va-t-il faire finalement son retour à Matignon ?

 Michel Barnier lui avait été préféré au terme d’un long feuilleton estival, mais la censure du gouvernement rebat les cartes. Surtout lorsque le camp présidentiel tente de s’attirer les bonnes grâces des socialistes.

La nomination de Bernard Cazeneuve ne fait cependant pas l’unanimité au sein même de son ancien parti. Olivier Faure juge  »paradoxal » de le nommer « au nom d’une victoire, celle du NFP, à laquelle il n’a pas voulu contribuer ». Plus à gauche, on ne veut même pas en entendre parler.

Lui n’y croit pas beaucoup et voterait plutôt François Bayrou.

Catherine Vautrin, la recalée de 2022

Catherine Vautrin en novembre 2024.

Après la dernière présidentielle, Catherine Vautrin avait été proche d’être nommée Première ministre par Emmanuel Macron qui lui aura finalement préféré Élisabeth Borne.

Issue de la droite traditionnelle, Catherine Vautrin a rejoint le camp macroniste en 2024. Elle a été ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités sous le gouvernement de Gabriel Attal et ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation durant ces trois derniers mois.

Sa nomination pourrait être utile pour consolider le socle commun entre macronistes et LR tout en consolidant l’alliance avec un parti majoritaire au Sénat. Ce choix pourrait toutefois être clivant à gauche : en 2012, elle avait pris part aux manifestations contre le mariage homosexuel et combattu la loi Taubira à l’Assemblée.

François Baroin, l’éternel recours

François Baroin, le maire de Troyes, est l'éternel recours de la droite.

L’arlésienne du recours.

Le maire de Troyes possède un CV long comme le bras au moment de postuler : député, sénateur, vice-président de l’Assemblée nationale, ministre de l’Intérieur de Jacques Chirac, porte-parole du gouvernement et ministre de l’Économie et des Finances sous Nicolas Sarkozy.

« C’est un élu local qui vient de la droite mais qui a toujours eu de très bonnes relations avec le PS. Et il n’a aucun contentieux avec le RN. Il peut donc trouver une majorité de non-censure autour de lui », veut croire un interlocuteur du Parisien.

Bruno Retailleau, Beauvau ou Matignon ?

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à l'École nationale de police de Toulouse.

Le ministre démissionnaire de l’Intérieur fait campagne pour poursuivre sa mission dans le futur gouvernement mais certains aimeraient le voir un échelon au-dessus.

Longtemps farouche adversaire d’Emmanuel Macron, l’ancien patron des Républicains au Sénat s’est révélé en accédant aux responsabilités. Ce catholique conservateur de 64 ans s’est dit ouvert à briser tous les tabous, allant même jusqu’à parler d’un État de droit « ni intangible, ni sacré ».

Si sa nomination ferait hurler la gauche, il semblerait que le Vendéen ait désormais l’attention d’Emmanuel Macron. « Le locataire de l’Élysée juge le ministre de l’Intérieur, qu’il ne connaissait pas auparavant, très fiable et respectueux des institutions », estime ainsi la Tribune Dimanche.

Lucie Castets, l’ex-candidate du NFP

Les représentants du Nouveau Front populaire et leur candidate désignée pour Matignon, Lucie Castets, à leur sortie de l'Élysée à Paris, le 23 août 2024.

Après les législatives anticipées remportées par le Nouveau Front Populaire, elle était devenue l’incarnation de l’unité de la gauche.

Mais Lucie Castets, candidate au poste de Première ministre, n’a jamais réellement été considérée par Emmanuel Macron.

Sans mandat, ni étiquette, l’énarque de 37 ans a continué de défendre l’union et de se dire disponible en cas de censure de Michel Barnier.

Il semble cependant que le train soit désormais passé pour la défenseuse des services publics. Les deux poids lourds de l’alliance, le PS et LFI, ont chacun leur stratégie : les socialistes dans le compromis de gouvernement avec le centre, les Insoumis dans l’appel à une présidentielle anticipée qui débloquerait la situation politique.

Ségolène Royal, toujours là

L'ancienne ministre française de l'Écologie Ségolène Royal lors d'une conférence d'été de LFI à Châteauneuf-sur-Isère, le 25 août 2023.
Personne ne la soutient réellement mais l’ancienne ministre de l’Environnement et ancienne candidate socialiste à la présidentielle a quand même fait savoir qu’elle était intéressée par le poste…

Le 4 décembre, Ségolène Royal a plaidé sur BFM TV pour un premier ministre “de gauche” mais aussi “expérimenté et rassembleur”. « Je suis disponible », a-t-elle déclaré.

François Villeroy de Galhau, pour un gouvernement technique

Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, lors du World Economic Forum en janvier 2024.

Une dernière carte, jamais utilisée, reste sur le bureau d’Emmanuel Macron.

À court d’options politiques, le chef de l’État pourrait tabler sur la nomination d’un gouvernement technique autour d’experts et de spécialistes. Pour le diriger, le nom du gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, est évoqué mais ce dernier y est frileux, selon le Figaro.

Son gouvernement pourrait alors expédier les affaires courantes jusqu’à une nouvelle dissolution ou une démission du président de la République qui débloqueraient le casse-tête politique actuel.

france24

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