Syrie: un premier organigramme de la future armée dévoilé, des jihadistes étrangers en font partie

Le nouveau pouvoir syrien multiplie les nominations. Un premier organigramme de la future armée syrienne a été divulgué… Et, sans surprise, on y retrouve des membres des groupes armés rebelles, puisque leur dissolution a été annoncée, afin de les fondre dans une armée nationale. Mais la liste des combattants promus officiers compte aussi des jihadistes étrangers.

C’est une première liste de 49 noms de rebelles promus officiers par le nouveau pouvoir en Syrie. Cet organigramme, encore embryonnaire, compte essentiellement des ressortissants syriens, mais également six jihadistes étrangers au moins, selon l’Observatoire syrien des Droits de l’Homme, qui a notamment identifié un Albanais, un Jordanien, un Turc ou encore un Chinois de la minorité ouïghour.

Celui-ci est issu du parti islamique du Turkestan (TIP), groupuscule jihadiste implanté à Idleb, bastion rebelle de Syrie d’où est partie l’offensive qui a mené à la chute d’Assad, a précisé à l’Agence France presse Rami Abdel Rahmane, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). « La majorité de ces promotions concernent des personnalités du cercle rapproché d’Ahmad Al-Chareh», précise encore Rami Abdel Rahmane.

Pour ces recrues étrangères, la raison d’État syrienne doit primer
Le nouveau pouvoir syrien risque donc de devoir justifier ses choix auprès des pays d’origine de ces jihadistes, comme l’explique le chercheur Thomas Pierret, joint par Nicolas Falez, du service international de RFI. « Une fois que de tels personnages se voient confier des responsabilités importantes, dans une armée nationale, je dirai qu’ils devront sans doute laisser de côté l’agenda politique qu’ils pourraient avoir pour leur pays d’origine.

Ils vont devoir se plier, je pense, à la raison d’État syrienne.

(Ainsi) il sera de l’intérêt du nouveau pouvoir syrien d’avoir de bonnes relations avec la Chine pour des raisons diplomatiques et économiques : il devra par conséquent exercer des pressions très fortes sur ses alliés d’origine chinoise pour abandonner toute velléité d’opération terroriste contre la Chine. »

Ex-combattants rebelles syriens ou étrangers, ces premiers cadres de la future armée syrienne ont reçu des grades.

La liste compte deux généraux — dont Mourhaf Abou Qasra, le chef militaire de HTS pressenti pour devenir ministre de la Défense au sein du gouvernement de transition –, cinq généraux de brigade et une quarantaine de colonels. Le nouveau pouvoir, issu d’une coalition dirigée par des islamistes radicaux, avait dévoilé la semaine dernière un accord avec « tous les groupes armés » pour leur dissolution, et leur « intégration sous la tutelle du ministère de la Défense ».

Premières réactions
Certains des promus n’étaient même pas des officiers militaires au départ. L’expert militaire et stratégique syrien, Hamouda Hussein, explique au micro de notre envoyé spécial Mohamed Errami que ces promotions peuvent être fondées sur leur rôle dans les victoires obtenues lors des batailles contre le régime de Bachar : « Cette décision aujourd’hui constitue une reconnaissance de la part de la direction générale des compétences et des sacrifices de ces officiers qui ont été promus.

Il est donc logique de leur attribuer ce grade militaire. »

L’annonce de la promotion de dizaines d’officiers, dont des non-Syriens, suscite une certaine inquiétude au sein de la population. Aabla Nouri, rencontrée dans le quartier de Hamidiyeh à Damas, estime que ces décisions sont incohérentes et qu’il est impératif d’abord de créer une armée unifiée pour réorganiser l’armée syrienne.

« Je pense que mon refus de cette décision est logique et suit une norme observée dans n’importe quel pays du monde : il est inacceptable qu’une personne inconnue, ou non syrienne, soit placée à la tête d’une des institutions les plus importantes, chargée de la sécurité du citoyen et du pays », explique-t-elle au micro de notre envoyé spécial.

rfi

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