Venezuela : Maduro va prêter serment pour un troisième mandat malgré les accusations de fraude

Le président vénézuélien sortant, Nicolas Maduro, 62 ans, s’apprête à prêter serment vendredi pour son troisième mandat consécutif, dans un contexte de forte tension politique et au lendemain de manifestations de l’opposition qui dénonce des fraudes lors de sa réélection en juillet.

Caracas sous tension. Fort du soutien de l’armée et d’une administration aux ordres, le président vénézuélien sortant Nicolas Maduro doit prêter serment vendredi 10 janvier pour un troisième mandat de six ans, malgré les accusations de fraude de l’opposition, un isolement sur la scène internationale et une situation économique épineuse.

Prévue à la mi-journée, la cérémonie se tiendra au lendemain de manifestations de l’opposition qui conteste la victoire du socialiste de 62 ans à la présidentielle du 28 juillet, suivie de troubles meurtriers et de milliers d’arrestations.

Le candidat de l’opposition Edmundo Gonzalez Urrutia assure avoir remporté le scrutin et a répété jeudi depuis la République dominicaine, à une heure d’avion de Caracas, qu’il est le « président élu ». Sans faire plier celui qui a succédé en 2013 à Hugo Chavez et dirige depuis le pays pétrolier d’une main de fer.

« El 10, juro con Maduro por el futuro » (« Le 10, je prête serment avec Maduro pour l’avenir ») : le slogan en rimes faciles à retenir a été placardé sur de nombreux murs pendant des semaines. Jeudi, le pouvoir a enfoncé le clou, avec une marche de soutien au président sortant qui a traversé une partie de la capitale.

« Le seul président élu dans ce pays est Nicolas Maduro, le peuple l’a élu et le peuple le soutient », a affirmé Noeli Bolivar, 28 ans, une de ses partisanes.

« Enlèvement » de l’opposante Maria Corina Machado

La manifestation de l’opposition a également réuni des milliers de partisans, criant « nous n’avons pas peur » ou tenant des pancartes affirmant « la liberté ne se mendie pas, elle se conquiert ».

Elle a donné lieu à une certaine confusion en fin de journée quand l’opposition a annoncé l’arrestation de la cheffe de l’opposition Maria Corina Machado, « interceptée violemment ». Quelques dizaines de minutes plus tard, l’équipe de l’opposante annonçait sa libération : « En quittant le rassemblement, Maria Corina Machado […] a été emmenée de force.

Pendant son enlèvement, elle a été forcée d’enregistrer plusieurs vidéos et a été relâchée par la suite. »

 

Le pouvoir a démenti, le procureur général Tarek William Saab dénonçant « une opération psychologique visant à déclencher la violence au Venezuela » et rappelant que Maria Corina Machado était visée par une enquête pénale.

La cheffe de l’opposition vivait dans la clandestinité depuis l’élection présidentielle à laquelle elle n’avait pas pu se présenter, parce que déclarée inéligible. Elle a soutenu la candidature de Edmundo Gonzalez Urrutia, qui s’est exilé en septembre.

Le Conseil national électoral (CNE) a proclamé Nicolas Maduro vainqueur avec 52 % des voix, mais sans publier les procès-verbaux, se disant victime d’un piratage informatique. Une hypothèse jugée peu crédible par de nombreux observateurs.

L’annonce du CNE avait provoqué des manifestations dans tout le pays, durement réprimées. Les troubles post-électoraux se sont soldés par 28 morts, plus de 200 blessés, et 2 400 personnes arrêtées pour « terrorisme ».

Il y a aussi eu une vague d’arrestations dans les jours qui ont précédé l’investiture.

Armée pilier du pouvoir

Comme lors des manifestations de 2014, 2017 et 2019, qui ont fait plus de 200 morts, Nicolas Maduro a pu compter sur le soutien de l’armée, pilier de son pouvoir, ainsi que sur une justice aux ordres.

Nicolas Maduro avait même activé un plan national sécuritaire comprenant toutes les forces de sécurité (armée, police, milices, paramilitaires…) après avoir dénoncé de nouveaux complots contre lui.

Un avis de recherche de l'opposant Edmundo Gonzalez Urrutia placardé sur un poteau à Caracas, le 8 janvier 2025
« Le secteur militaire est encore plus crucial qu’il ne l’était avant les élections […].
Sans le contrôle des institutions militaires, le gouvernement se retrouverait avec un pouvoir extrêmement précaire », explique Mariano de Alba, analyste spécialiste en relations internationales basé à Londres.

Le dirigeant socialiste, qui a promis une amélioration économique lors de la campagne, devra trouver des solutions pour renouer avec la croissance alors que le pays a enregistré une contraction de son PIB de 80 % entre 2013 et 2023.

Isolé sur le plan international, il lui sera difficile de faire lever les sanctions économiques et pétrolières qu’il devra donc tenter de contourner afin d’exploiter les immenses réserves pétrolières du pays sans avoir à les brader en raison de l’embargo imposé par les États-Unis.

Il a aussi promis des réformes constitutionnelles avec des lois que de nombreuses ONG jugent liberticides et anti-démocratiques.

AFP

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