Après huit années d’absence, l’un des « baobabs de la musique sénégalaise » Omar Pène vient de sortir son nouvel album Climat très attendu par les fans. Un appel à prendre conscience des risques liés au réchauffement climatique.
Omar Pène, actuellement à Dakar, nous donne rendez-vous par téléphone, et ne peut pas nous recevoir, prescription de son médecin face à la recrudescence de Covid-19 et de son variant Delta au Sénégal. La voix enjouée, le leader du mythique groupe Super Diamond revient à l’âge de 65 ans avec un nouvel album Climat produit par Hervé Samb entre Dakar et Paris. Un disque de neuf titres, que les fans attendent depuis huit ans et la sortie du dernier album.
RFI Musique : Pourquoi avoir attendu huit ans pour sortir cet album ?
Omar Pène : J’étais alité pendant plusieurs années pour des raisons de santé. J’ai dû récupérer de l’énergie, observer ma convalescence et retravailler ma voix avec un coach. Cela nous a donc retardés. Mais c’était essentiel pour moi de reprendre, car les fans m’attendaient.
Pourquoi avez-vous enregistré l’album en France ?
La plupart des musiciens qui ont participé à cet album, ainsi qu’Hervé Samb, sont installés en France. Donc c’était plus facile pour tout le monde. Nous l’avons enregistré en plusieurs fois. Cela ne s’est pas fait d’une seule traite. Nous avons donc pris trois ans pour faire tous les enregistrements et finaliser l’album. Il faut dire que la Covid-19 nous a fait prendre du retard, mais nous avons aussi voulu prendre notre temps, car ce n’était pas urgent et nous voulions un produit de qualité.
Pourquoi avoir appelé l’album Climat et pourquoi vous attaquer à la problématique du réchauffement climatique ?
C’est un problème qui nous interpelle tous, c’est une réalité à laquelle nous devons réfléchir. Et surtout nous, en Afrique, avec le peu de moyens que nous avons… comment réagir s’il y a un tsunami dans nos régions ? Il faut y réfléchir et prendre les devants pour ne pas jouer aux médecins après la mort. C’est un phénomène mondial et en tant que citoyen du monde, je m’associe aux voix qui en parlent pour conscientiser et sensibiliser. Le message s’adresse à tout le monde – aux populations comme aux dirigeants, car rien de concret n’a été fait pour le moment pour lutter réellement contre le changement climatique.
Quelles sont vos inquiétudes au Sénégal particulièrement ?
Dans le nord du pays, l’océan est en train de détruire des habitations. Des populations sont déjà en train de subir la montée des eaux dans la ville de Saint-Louis. Les gens doivent prendre conscience que le problème existe déjà et les Africains doivent s’organiser pour porter leurs voix là où les décisions doivent se prendre.
Avez-vous l’espoir que votre voix – en tant qu’artiste – soit écoutée et change la donne ?
La musique est un vecteur de communication qui est audible. J’ai l’habitude de voyager et je m’adresse à tout le monde. C’est ma voix que j’ai choisi de porter pour m’attaquer aux problèmes auxquels je suis confronté.
Un titre s’attaque au terrorisme (Terroriste). Pourquoi cela vous inquiète-t-il en tant que Sénégalais ?
Le terrorisme fait partie des problèmes qui m’interpellent et qui causent énormément de dégât en Afrique. Même si cela ne se passe pas encore chez nous, c’est à nos portes dans les pays limitrophes. Il faut en parler et ne jamais se dire que ça n’arrive qu’aux autres, il faut prendre les devants, se préparer. Un autre titre de l’album parle d’émergence, et on ne peut pas parler de développement s’il y a du terrorisme. Il faudrait prendre des mesures et sensibiliser l’opinion et les jeunes pour lutter contre ce phénomène.
Comment avez-vous eu l’idée d’inviter le rappeur sénégalais Faada Freddy sur le titre Lu Tax ?
Faada Freddy est un garçon que nous suivons depuis longtemps et qui a un énorme talent. Nous avons donc pensé qu’il avait le profil pour ce morceau, qui est très chanté. Il a su venir dans mon univers, car il n’est pas seulement rappeur, il est aussi dans la world music et il a une voix qui porte vraiment. Ce titre s’attaque aux ragots et aux rumeurs, et questionne sur les motivations de certains pour dire du mal des autres dans leur dos. Ces comportements me dérangent beaucoup et je ne les comprends pas. Je veux inciter les gens à ne pas s’attarder à raconter des choses qui ne les regardent pas.
Comment avez-vous construit le style musical de cet album ?
Après l’album Ndam, je voulais refaire un album acoustique dans la continuité, tout en amenant de la nouveauté. Nous avons intégré de nouveaux instruments tels que des violons, avec des musiciens français, pour apporter une nouvelle couleur. Cela a beaucoup marqué l’album. Car la musique, ce sont des rencontres où chacun amène qui il est et ce qu’il a. Puis à nous de faire un joli mélange. En tant que Sénégalais, je souhaite garder mon identité. Les sonorités qui nous viennent d’ailleurs se sont donc intégrées dans notre identité sénégalaise.
Avez-vous déjà des prochaines dates de concert ?
Une tournée se prépare en France pour le mois de novembre. Je croise les doigts pour que cela se concrétise malgré la situation sanitaire. Nous avions prévu un concert au mois d’octobre à l’Institut français de Dakar, mais il a été suspendu pour le moment étant donné la recrudescence du virus dans le pays.
Omar Pène Climat (Diamono Production) 2021
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