Bayrou passe sans encombre le cap du budget

Le budget 2025 a été adopté à l’Assemblée nationale après l’échec de la motion de censure déposée par LFI. Le RN et les socialistes ont refusé de s’y associer. Une victoire pour François Bayrou qui lui permet de gagner quelques mois de visibilité à Matignon.

Faute d’enjeu, le débat de la motion de censure sur le budget 2025 aura au moins permis une chose : mesurer le niveau, élevé, de l’hostilité qui s’est installée entre socialistes et Insoumis. Depuis la décision des premiers de ne pas s’associer à la motion de censure des seconds, la guerre est relancée entre les deux principales composantes de ce qu’il reste du Nouveau Front populaire (NFP).

Ce mercredi au Palais-Bourbon, les socialistes ont écouté poliment l’oratrice LFI, Aurélie Trouvé.

Mais l’inverse n’a pas été vrai. Emmanuel Grégoire, orateur des députés socialistes, a vu ses dix minutes de temps de parole constamment perturbées par un bruit de fond, celui des huées en provenance des bancs de LFI. Ses critiques contre le budget comme son explication de texte sur le choix de son groupe de ne pas voter la censure n’ont pas convaincu les partisans de Jean-Luc Mélenchon. « Le bruit et la fureur fragilisent nos combats, ceux de la gauche », a tenté celui qui est aussi candidat pour la Mairie de Paris l’année prochaine.

« Naufrage de l’économie française »

« Votre budget précipite le naufrage de l’économie française », a dénoncé Aurélie Trouvé. Mais c’était peine perdue. Après le veto des socialistes sur cette motion de censure – et sur celles qui vont suivre sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) – et celui du Rassemblement national (RN), LFI n’avait aucune chance de faire tomber le gouvernement Barnier. En fin de journée, la première motion de censure a échoué, ne recueillant que 128 voix.

Six socialistes ont tout de même voté pour, allant contre la décision du PS.

L’examen de la seconde motion de censure en début de soirée s’est également soldé par un rejet, celle-ci n’ayant été soutenue que par 122 députés. Le gouvernement a déclenché un nouveau 49.3 sur la deuxième partie du PLFSS, auquel LFI promet de répondre par une nouvelle motion de censure. Le troisième 49.3 sur le PLFSS sera mis en oeuvre lundi prochain.

Pourtant, même ceux qui n’ont pas voté la censure n’ont pas manqué de critiquer ce budget , fruit des premiers travaux de Michel Barnier et d’une copie remaniée dans la douleur par son successeur à Matignon, François Bayrou. Le PS le trouve trop dur mais place la stabilité politique au-dessus de ses critiques. « Ce refus de la censure est un choix difficile. Nous n’ignorons rien des interrogations qu’il suscite, mais l’intérêt est de donner à la France de la stabilité et de la visibilité budgétaire », a défendu Emmanuel Grégoire.

Le RN dénonce la « mascarade » de la motion de censure

La droite pense qu’il manque des économies. « Le budget n’est pas celui des Républicains. En réalité, il n’est le budget de personne car c’est un budget de compromis. Mais il a un mérite, celui d’exister. C’est le budget de ceux qui veulent de la stabilité », a défendu le député Droite républicaine Philippe Juvin. Pour des raisons différentes, ce budget ne satisfait donc personne.

Mais tous ceux qui n’ont pas voté la censure s’accordent à penser qu’il faut un budget sous peine de voir la France tomber dans une crise institutionnelle et politique sans précédent.

Pour le RN, Yoann Gillet, a dénoncé la « mascarade » de cette motion de censure vouée à l’échec en raison de la désaffection du PS. Le parti à la flamme a dénoncé un budget « injuste », mais pas suffisamment pour voter lui-même la censure.

Le RN souhaite un retour aux urnes, ce qui tend à penser qu’il ne censurera pas le gouvernement tant qu’une nouvelle dissolution ne sera pas possible, soit l’été prochain.

Le RN souhaite un retour aux urnes, ce qui tend à penser qu’il ne censurera pas le gouvernement tant qu’une nouvelle dissolution ne sera pas possible, soit l’été prochain. Il faut de la stabilité « jusqu’à ce qu’il y ait possibilité de déclencher de nouvelles élections. Dès qu’on peut retourner devant les électeurs, il faut retourner devant les électeurs », a défendu mercredi sur BFMTV Sébastien Chenu, député du Nord et vice-président du RN.

« Budget imparfait », admet François Bayrou

En clôture des débats, François Bayrou a admis un budget « imparfait ». « Notre intention est que ce budget, l’année prochaine, ne soit pas le même. Ce budget est une étape d’urgence, car notre pays ne peut pas vivre sans budget », a-t-il martelé. Il s’est déjà projeté sur celui de l’année prochaine, promettant de tout remettre à plat.

« Nous avons à reconstruire la conception de notre action publique et de l’allocation des moyens dévolus à cette action publique.

On ne peut pas reprendre la méthode éternelle qui consiste à repartir du budget précédent pour bâtir le budget suivant avec un coefficient d’augmentation des dépenses, des impôts et des taxes », a-t-il ajouté.

Avec l’adoption de ce budget et, dans quelques jours, de celui de la Sécurité sociale, François Bayrou signe une belle victoire politique. Il a fracturé durablement la gauche, LFI ayant « pris acte de l’interruption par le PS du NFP ». 

Le RN reste en embuscade mais n’entend pas faire tomber le gouvernement dans les prochaines semaines.

Réussissant là où Michel Barnier a échoué, le maire de Pau a surtout gagné du temps et de la visibilité. Un luxe dans le paysage perturbé de l’après-dissolution, même si son bail à Matignon reste précaire.

Lesechos

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