Des attaques de paramilitaires font plus de 200 morts dans le sud

(Port-Soudan) Plus de 200 personnes ont été tuées en trois jours dans des attaques des paramilitaires contre deux villages au sud de Khartoum, a indiqué mardi un groupe d’avocats prodémocratie, le gouvernement soutenu par l’armée faisant état d’un bilan deux fois plus important.

Des centaines d’autres personnes ont été blessées ou sont portées disparues après que les paramilitaires ont ouvert le feu sur des habitants tentant de fuir, selon le collectif d’avocats qui documente les violations des droits humains depuis le début de la guerre entre l’armée et les Forces de soutien rapide (FSR) en 2023.

Des habitants ont été abattus ou se sont noyés en tentant de fuir à travers le Nil, selon la même source.

Le ministère des Affaires étrangères a fait état de « 433 morts, dont des bébés » dans ces attaques menées selon lui par les FSR, dénonçant un « horrible massacre ».

Les attaques dans l’État du Nil Blanc contre les villages d’Al-Kadaris et d’Al-Khelwat, à quelque 90 km au sud de Khartoum, ont poussé des milliers d’habitants à la fuite, ont raconté des témoins à l’AFP.

Un porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a déclaré que l’organisation avait reçu des « rapports terrifiants selon lesquels des dizaines de femmes ont été violées et des centaines de familles forcées à fuir ».

« Exécutions, enlèvements »

Des enfants soudanais déplacés se rassemblent dans un camp près de la ville de Tawila, dans le nord du Darfour, le 11 février 2025.

Depuis samedi, les FSR ont mené des « exécutions, enlèvements, disparitions forcées et pillages » contre des civils non armés, selon le collectif d’avocats qui les a accusées de « génocide ».

Affirmant ne pas être en mesure de confirmer le bilan, une source médicale a fait état lundi de « corps gisant encore dans les rues, et d’autres personnes tuées chez elles sans que personne ne puisse les atteindre ».

Depuis le début de la guerre, l’armée et les paramilitaires ont été accusés de crimes de guerre.

Les FSR sont connues pour commettre des exécutions sommaires, des actes de nettoyage ethnique et des violences sexuelles systématiques.

La guerre a fait des dizaines de milliers de morts, déplacé plus de 12 millions de personnes et engendré ce que le International Rescue Committee qualifie de « plus grande crise humanitaire jamais enregistrée ».

Les deux camps se partagent l’État du Nil Blanc, qui s’étend de la zone au sud de Khartoum jusqu’à la frontière avec le Soudan du Sud.

L’armée soudanaise en contrôle le sud, notamment Rabak, la capitale de l’État, ainsi que deux grandes villes et une base militaire stratégique.  

Des Soudanais déplacés, qui ont fui le camp de Zamzam, se rassemblent près de la ville de Tawila, dans le nord du Darfour, le 14 février 2025.

Les FSR, de leur côté, tiennent le nord, limitrophe de la capitale soudanaise, une région où se trouvent notamment les villages récemment attaqués.

Les combats se sont intensifiés ces dernières semaines, alors que l’armée tente de reprendre aux FSR le contrôle total de Khartoum. Le collectif d’avocats a accusé mardi l’armée d’agressions « barbares » contre des civils dans l’est de la capitale.

Il a affirmé que des civils du district du Nil oriental, dans le grand Khartoum, accusés de collaboration avec les FSR, avaient été victimes de « meurtres, disparitions forcées et arrestations arbitraires » perpétrés par des individus liés à l’armée.

L’UNICEF, l’agence de l’ONU pour l’enfance, a parlé dimanche d’« un cauchemar vivant » dans et autour de la capitale. Elle a fait état de témoignages sur des familles séparées, des enfants disparus, détenus ou enlevés, et des violences sexuelles.

« Impunité enracinée »

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a dénoncé mardi une « impunité enracinée » qui alimente de graves violations des droits humains.

« Les attaques continues et délibérées » contre les civils, avec notamment « des exécutions sommaires, violences sexuelles et autres violations, soulignent l’échec total » des deux camps à respecter le droit humanitaire international, a-t-il affirmé.

L’ONU a également appelé à l’élargissement de la compétence de la Cour pénale internationale ainsi qu’à l’extension de l’embargo sur les armes, en vigueur depuis 2004, à l’ensemble du Soudan, et non plus uniquement à la vaste région du Darfour (ouest).

Le Darfour, où les FSR cherchent à consolider leur emprise, a connu une escalade des violences ces dernières semaines.  

L’ONU affirme que des milliers de familles ont fui les attaques des FSR contre les villages autour d’el-Facher, capitale de l’État du Darfour-Nord et seule grande ville de la région échappant à leur contrôle.

lapresse

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