Alors que l’incertitude commerciale s’accroît, une coopération mondiale et des politiques équilibrées seront essentielles pour prévenir la fragmentation économique et préserver la croissance à long terme.
Le commerce mondial a commencé l’année 2025 sur des bases stables, mais les défis s’accumulent. Le dernièr Global Trade Update par ONU commerce et développement (CNUCED), basé sur des données jusqu’à début mars, signale une évolution du paysage. En 2024, le commerce mondial a connu une expansion record pour atteindre 33 000 milliards de dollars, soit une hausse de 3,7 % par rapport à 2023, sous l’impulsion des économies en développement et de la vigueur du commerce des services.
Mais à l’avenir, de nouveaux risques se profilent, notamment des déséquilibres commerciaux, des politiques en évolution et des tensions géopolitiques.
L’écart entre les économies en développement et les économies avancées se creuse. L’Asie et l’Amérique latine restent les principaux moteurs du commerce, mais la croissance s’est ralentie dans de nombreuses économies avancées. Le commerce Sud-Sud se maintient, mais les échanges intrarégionaux de l’Afrique se contractent, annulant les gains réalisés. Parallèlement, le commerce entre l’Europe et l’Asie centrale a diminué, reflétant l’évolution de la demande.
Les chaînes d’approvisionnement se diversifient au lieu de se consolider
Les tendances à la l’externalisation de proximité (friendshoring et nearshoring) se sont inversées en 2024, les entreprises ne limitant plus leurs échanges à des alliés géopolitiques ou à des régions proches. Au lieu de consolider leurs chaînes d’approvisionnement, les entreprises diversifient désormais leurs réseaux commerciaux dans plusieurs régions afin de réduire les risques, ce qui crée des opportunités mais accroît la complexité.
La dépendance commerciale évolue également. Des économies telles que la Russie, le Viêt Nam et l’Inde ont renforcé leurs liens commerciaux avec des partenaires spécifiques, tandis que d’autres, comme l’Australie et l’UE, réduisent leur dépendance à l’égard des marchés traditionnels. Le déclin de la concentration des échanges suggère que les petites économies jouent un rôle plus important.
Les politiques commerciales redessinent la carte
Les gouvernements augmentent les droits de douane, les subventions et les politiques industrielles, remodelant ainsi les flux commerciaux. Les États-Unis, l’Union européenne (UE) et d’autres pays lient de plus en plus les mesures commerciales à la sécurité économique et aux objectifs climatiques, tandis que la Chine utilise des politiques de relance pour maintenir l’élan de ses exportations.
Ce réalignement des politiques contribue à l’incertitude. La montée du protectionnisme (politiques favorisant les industries nationales par le biais de droits de douane ou de restrictions), en particulier dans les économies avancées, déclenche des mesures de rétorsion (contre-mesures de la part des partenaires commerciaux en réponse aux restrictions commerciales) et ajoute des barrières commerciales.
Parallèlement, les politiques industrielles (stratégies à long terme visant à développer des secteurs spécifiques) remodèlent des secteurs clés tels que l’énergie propre, la technologie et les matières premières essentielles, ce qui risque de fausser la concurrence.
Les déséquilibres commerciaux globaux se creusent
En 2024, les déséquilibres commerciaux globaux sont revenus aux niveaux de 2022. Le déficit commercial des États-Unis s’est creusé, l’excédent de la Chine a augmenté, tandis que l’UE est devenue excédentaire en raison de l’évolution des prix de l’énergie.
Les écarts bilatéraux persistent : le déficit entre les États-Unis et la Chine se creuse, l’excédent de l’UE avec la Chine s’accroît et le déficit de l’Inde avec la Russie s’est creusé en raison de l’évolution du commerce de l’énergie. Ces tendances pourraient donner lieu à de nouveaux droits de douane, à des restrictions ou à des réorientations d’investissements, ce qui ajouterait à l’incertitude économique.
Croissance sectorielle inégale
La croissance du commerce varie selon les secteurs : l’agroalimentaire, les technologies de la communication et les transports ont progressé, tandis que l’énergie, l’habillement et les industries extractives ont ralenti en raison de l’affaiblissement de la demande et des changements de politique.
Les tendances en matière de transport maritime indiquent un ralentissement, la baisse des indices de fret signalant un affaiblissement de l’activité industrielle, en particulier dans les secteurs dépendant de la chaîne d’approvisionnement.
En route pour 2025 : Éviter la fragmentation
Alors que l’incertitude commerciale s’accroît, une coopération mondiale et des politiques équilibrées restent essentielles. Si les mesures de relance prises par la Chine et la baisse de l’inflation dans certaines régions pourraient soutenir le commerce, le protectionnisme et l’évolution des politiques dans les grandes économies restent des risques majeurs.
En 2025, le défi consistera à éviter la fragmentation mondiale – où les nations forment des blocs commerciaux isolés – tout en gérant les changements de politique sans nuire à la croissance à long terme. Les mesures prises aujourd’hui par les gouvernements et les entreprises façonneront la résilience du commerce pour les années à venir.
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