Après une mobilisation en demi-teinte à Paris ce dimanche 6 avril, le Rassemblement national (RN) veut penser et se « projeter » dans l’après. Si la possibilité d’une censure du gouvernement de François Bayrou reste toujours d’actualité, le parti pense également à la campagne des municipales 2026, avec dans le viseur des villes de taille moyenne comme Toulon ou Nîmes.
Et maintenant?
C’est la question sur toutes les lèvres au RN au lendemain d’un rassemblement organisé à Paris par le parti pour soutenir Marine Le Pen condamnée notamment à 5 ans d’inéligibilité avec application immédiate le 31 mars dernier.
« Notre but était de la soutenir dans cette épreuve et qu’elle puisse montrer qu’elle était debout, prête à se battre et qu’elle n’allait pas se taire. On a réussi », soutient le député européen Julien Sanchez, également vice-président du RN auprès de BFMTV.com.
« On ne va pas rester des semaines là-dessus »
À voir: seulement 7.000 à 10.000 personnes étaient rassemblées sur la place Vauban dimanche. Une audience clairsemée, loin de l’ampleur espérée par le RN même si les partisans du mouvement ont joué le jeu, aidés par la mise en place de cars en partance de départements où le RN fait le plein.
Politiquement l’avenir se montre également plus incertain: si Marine Le Pen peut rester députée à l’issue du jugement, elle ne pourra pas se représenter en cas de prochaine élection dans les cinq ans, cela à l’instant T. Elle ne pourra donc pas candidater à la présidentielle en 2027, si le jugement reste identique en appel. Bye-bye également à une candidature à des législatives anticipées en cas de nouvelle dissolution décidée par Emmanuel Macron.
Seule bonne nouvelle des derniers jours: l’annonce de l’organisation d’un procès en appel rapide et d’un jugement « avant l’été 2026 » comme l’a indiqué la Cour d’appel de Paris. Rien ne garantit cependant que les juges soient plus cléments en seconde instance, d’autant plus que le jugement rendu le 31 mars dernier était particulièrement sévère.
« On a besoin de se projeter. On a fait notre meeting, on a montré qu’elle allait se battre, on va avoir un appel dans un délai correct mais on ne va pas rester des semaines là-dessus non plus », exhorte un député RN qui « veut changer de disque ».
La menace de la censure moins présente que jamais
Pour montrer que Marine Le Pen et ses troupes restent debout, « on va travailler, travailler et encore travailler à l’Assemblée nationale », promet son collègue Philippe Ballard.
Mais l’agenda parlementaire n’est guère dense dans les prochains semaines et les sujets de débats dans l’hémicycle pas forcément très porteurs pour le RN.
L’ordre du jour assez léger à l’Assemblée n’empêche pas les troupes de brandir l’éventuelle menace d’une censure du gouvernement de François Bayrou, comme l’a déjà fait Marine Le Pen sur TF1 quelques heures à peine après sa condamnation.
De quoi lui permettre d’expliquer qu’elle reste dans le jeu politique et que le Premier ministre devra toujours continuer à prendre en compte ses députés qui représentent la plus grande force à l’Assemblée.
« On ne va pas dire qu’on ne détient plus entre nos mains l’avenir de Bayrou mais franchement…
S’il tombe, je pense que le président dissout dès juillet. Et là c’est la catastrophe parce que Marine Le Pen ne peut pas se représenter », reconnaît un élu.
L’espoir des municipales
Moins que l’Assemblée donc, ce sont plutôt les municipales qui auront lieu dans 11 mois qui occupent les esprits. Avec un défi herculéen: parvenir à faire tomber plusieurs villes d’ampleur moyenne dans son escarcelle et surtout intégrer le plus largement possibles des conseils municipaux.
« La présidentielle sera compliquée et on se serait bien passé de tout ça.
Mais ça peut aussi pousser notre électorat à se mobiliser davantage. Ceux qui nous aiment peuvent avoir encore plus envie de nous soutenir », veut croire la députée Manon Bouquin.
« Si on arrive à faire tomber des villes comme Toulon ou à Nîmes, ça montre que les gens n’auront pas retenu tant que ça la condamnation de Marine Le Pen et ça nous donnera beaucoup de force pour la suite », traduit plus cash un cadre du parti.
Pour l’instant, les sondages ne montrent pas que la condamnation de l’ex candidate à la présidentielle modifie dans un sens ou dans l’autre la relation des Français avec le RN.
« Stop tout de suite » à l’hypothèse Bardella en 2027
De sondage en sondage, Marine Le Pen continue de faire la course en tête au premier tour de la présidentielle. Si le 1er tour de l’élection avait lieu ce dimanche, elle obtiendrait un score situé entre 32 et 36% suivant les noms des autres candidats, d’après un sondage Elabe pour BFMTV-La Tribune dimanche.
Quant au patron du mouvement, Jordan Bardella, il fait quasiment jeu égal avec un étiage situé entre 31 et 35.5%.
De quoi donner quelques sueurs froides à la députée du Pas-de-Calais qui veut à tout prix éviter l’idée qu’il pourra la remplacer si sa peine d’inéligibilité était confirmée en appel
« L’après, c’est surtout de ne pas étayer qu’au pire, on aura Jordan pour la remplacer.
La priorité, c’est qu’elle puisse se présenter et c’est pour ça qu’on se bat. Donc stop tout de suite à un réflexe de ce type », assène un proche de Marine Le Pen.
Manifestement soucieux de ne pas donner l’impression de jouer contre sa patronne, le jeune homme a veillé à rappeler « solennellement » sa fidélité à la présidente des députés RN.
bmftv