Le Pakistan a annoncé jeudi qu’il allait expulser des diplomates indiens et suspendre des visas d’Indiens en réponse à des mesures similaires prises la veille par New Delhi. La tension entre les deux pays voisins monte depuis une fusillade mardi dans la région disputée du Cachemire. L’Inde tient le Pakistan pour responsable de cette attaque meurtrière perpétrée contre des civils.
Suspension des visas, expulsion de diplomates et fermeture de frontières : le ton est monté d’un cran, jeudi 24 avril, entre l’Inde et le Pakistan après l’attentat qui a causé la mort de 26 civils au Cachemire indien, dont New Delhi impute la responsabilité à Islamabad.
Dans une brusque escalade, les autorités indiennes et pakistanaises ont annoncé que les ressortissants de leur voisin et rival étaient priés de quitter leurs territoires à brève échéance.
Sans mettre formellement en cause le Pakistan, le Premier ministre indien Narendra a durci son discours en promettant de traquer « jusqu’au bout de la terre » les auteurs de l’attaque et leurs complices.
Mardi, au moins trois tireurs, selon la police indienne, ont ouvert le feu sur des touristes dans la ville de Pahalgam, située sur les contreforts de l’Himalaya, tuant 25 Indiens et un Népalais. Cette attaque est la plus meurtrière visant des civils menée depuis 2000 dans ce territoire indien à majorité musulmane.
Le Pakistan a nié toute responsabilité dans l’attentat.
Dès mercredi pourtant, le gouvernement ultranationaliste hindou de New Delhi a ouvert le bal des sanctions en dévoilant une première série de représailles diplomatiques contre Islamabad.
Entre autres mesures largement symboliques, la fermeture de principal poste-frontière terrestre entre les deux pays et le rappel de nombreux diplomates. Puis jeudi, le ministère indien des Affaires étrangères a annoncé la « suspension à effet immédiat » de la délivrance des visas aux Pakistanais et l’annulation de tous ceux en cours d’ici au 29 avril.
« Tous les citoyens pakistanais actuellement en Inde doivent quitter l’Inde » d’ici là, a-t-il ajouté.
« Acte de guerre »
Les plus hauts responsables civils et militaires du Pakistan se sont quant à eux réunis durant deux heures jeudi pour organiser la riposte. À l’issue de ce conseil, ils ont aussitôt annoncé l’expulsion de diplomates et la suspension des visas indiens, ainsi que la fermeture de sa frontière et de son espace aérien.
« Toute menace contre la souveraineté du Pakistan et la sécurité de son peuple fera l’objet de mesures de réciprocité fermes », a prévenu le Comité de la sécurité nationale.
Il a ensuite détaillé : « Les conseillers indiens de la défense, de la marine et de l’aviation à Islamabad sont déclarés persona non grata » ; « tous les échanges commerciaux avec l’Inde, y compris à destination et en provenance de pays tiers transitant par le Pakistan, sont immédiatement suspendus ».
En outre, « l’espace aérien pakistanais sera fermé avec effet immédiat à toutes les compagnies aériennes appartenant à l’Inde ou exploitées par l’Inde ».
Guerre de l’eau
La principale pomme de discorde entre les deux pays reste toutefois la question de l’eau, cruciale dans une région fortement menacée par la sécheresse et le changement climatique.
Le Pakistan a ainsi annoncé jeudi qu’il prendrait des « mesures fermes » contre toute « menace indienne », assurant notamment que toute tentative par son voisin de réduire son approvisionnement en eau du fleuve Indus serait considéré comme un « acte de guerre ». La veille, New Delhi avait dit dénoncer le Traité sur les eaux de l’Indus, ratifié en 1960 et jamais remis en question malgré trois guerres entre les deux voisins.
De nombreux experts anticipent déjà une riposte militaire de New Delhi, comme ce fut le cas en 2019 après une attaque meurtrière qui avait visé un convoi de militaires indiens.
« Cette attaque va faire revenir les relations entre les deux pays à leurs heures les plus sombres », a anticipé pour l’AFP l’analyste Praveen Donthi, de l’International Crisis Group (ICG). La fusillade de Pahalgam n’avait toujours pas été revendiquée jeudi à la mi-journée.
La police a diffusé les portraits-robot de trois suspects, dont deux ressortissants pakistanais, les présentant comme membres du groupe Lashkar-e-Taibad (LeT), basé au Pakistan. Ce groupe islamiste est soupçonné des attaques jihadistes qui ont visé la mégapole indienne de Bombay en novembre 2008, faisant 166 morts.
La police a également offert une récompense de deux millions de roupies (plus de 20 000 euros) pour toute information permettant leur capture.
Le Cachemire a été partagé entre l’Inde et le Pakistan en 1947, lorsque ces deux pays ont accédé à l’indépendance. Ils continuent depuis à réclamer la souveraineté de l’ensemble du territoire.
AFP