Fin de vie: Catherine Vautrin, ministre en première ligne d’un gouvernement divisé

Au banc pour représenter le gouvernement lors de l’examen des deux propositions de loi sur la fin de vie, la ministre de la Santé cherche l’équilibre pour la création d’une aide à mourir, mesure qui divise l’équipe de François Bayrou.

Le week-end dernier, Catherine Vautrin a du mal à trouver le sommeil. La ministre de la Santé prépare les derniers détails de son discours, avant le début de l’examen de deux propositions de loi sur la fin de vie, l’une sur les soins palliatifs, l’autre visant à la création d’une aide à mourir, mesure ô combien sensible.

L’expérimentée chiraquienne, membre de plusieurs gouvernements au sein de sa carrière politique, est de retour au Palais Bourbon pour mener ce combat. Dans une ambiance feutrée, gravité du sujet oblige. En janvier 2024, l’ex-LR – devancée dans la toute dernière ligne droite pas Élisabeth Borne pour Matignon en 2022 – était entrée au gouvernement avec ce dossier tout en haut de la pile.

Emmanuel Macron l’avait informée au préalable de son intention d’annoncer un projet de loi – ce qu’il fera en mars dans une double interview à La Croix et Libération. Elle s’est ensuite attelée à le défendre. Sans certitude, comme chez nombre de représentants politiques. Catherine Vautrin reconnaissait dans Le Parisien ce dimanche avoir elle-même « cheminé ».

Des divisions au gouvernement, Vautrin « très sereine »
Un an et demi plus tard, le paysage politique a largement changé. L’Assemblée nationale nouvellement élue après la dissolution décidée par Emmanuel Macron – qui a stoppé l’examen du projet de loi – a débouché à l’été 2024 sur une majorité encore plus relative que la précédente pour le camp présidentiel.

Par ailleurs, LR, hier principale force d’appoint pour la recherche des compromis, est entrée au gouvernement.

Leurs représentants avec. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau ne cache pas son opposition à l’aide à mourir. Ce dernier a dénoncé en avril « un texte d’abandon » qui va « dans le très mauvais sens ». « Le texte aujourd’hui est tellement permissif, demain ce que je crains, c’est qu’il soit beaucoup plus facile de demander la mort que d’avoir des soins », a-t-il argué sur LCI.

De même, les réticences du Premier ministre François Bayrou sont connues.

Symbole des divisions, Yannick Neuder, ministre délégué chargé de la Santé auprès de Catherine Vautrin, a également affiché des réserves, plaidant avant tout pour davantage de soins palliatifs.

Un non sujet dans l’entourage de Catherine Vautrin. « La ministre est très sereine par rapport à tout cela. Il est normal que chaque membre du gouvernement, comme les Français et les parlementaires d’ailleurs, puisse avoir sa sensibilité », nous dit-on.

« On est sur un débat qui touche à l’intime, au rapport à la mort, qui questionne chacun. On ne peut pas se dire qu’au gouvernement c’est tout blanc ou tout noir ».

Au milieu de cet attelage composite, Catherine Vautrin marche sur des œufs. « Le chemin est étroit et je recherche un équilibre entre ceux qui voudraient aller beaucoup plus loin et ceux qui estiment que le cadre actuel est suffisant », a-t-elle résumé dans Le Parisien, soucieuse de trouver une voie de passage dans cet hémicycle lui aussi fracturé, même si l’aide a mourir a reçu un premier feu vert lors de son passage en commission.

Encadrer davantage l’aide à mourir
L’ancienne présidente du Grand Reims souhaite apporter plusieurs modifications à la proposition de loi portée par Olivier Falorni (Modem), défenseur de longue date d’une avancée législative.

Objectif: encadrer davantage l’aide à mourir. Pour l’instant, celle-ci est prévue pour des patients majeurs, « apte(s) à exprimer (leur) volonté de façon libre et éclairée », atteints d’une « affection grave et incurable » qui « engage le pronostic vital en phase avancée ou terminale » et ne supportant plus leurs souffrances.

En reprenant un avis de la Haute autorité de Santé, elle veut agir sur ce dernier point et définir la ‘phase avancée’, à savoir « l’entrée dans un processus irréversible marqué par l’aggravation de l’état de santé qui affecte la qualité de vie ». Comme « le discernement est absolument majeur », Catherine Vautrin espère également rétablir le délai de réflexion incompressible de 48 heures à compter de l’accord des médecins ».

Par ailleurs, l’administration de la subtance létale par le patient « doit être la règle », et la réalisation par un profesionnel de santé « l’exception » aux yeux de la ministre, alors que le texte prévoit les deux possibilités. Enfin, il s’agit de renforcer la collégialité de l’avis médical autorisant cette décision.

S’il n’est pas dit que cet hémicycle oeuvrera en son sens, ni que le texte sera définitivement adopté d’ici 2027, Catherine Vautrin espère arriver à bon port. Avec toute la portée que cela impliquerait.

Le député du MoDem Philippe Vigier ne s’y est pas trompé lundi dans l’hémicycle, lançant à l’intéressée: « A cette même tribune, il y a 50 ans, madame la ministre, c’était Simone Veil qui était là. »

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