À son arrivée au pouvoir, Kim Jong Un semblait décidé à ouvrir le marché nord-coréen à l’international. Pourtant, dix ans plus tard, la Corée du Nord, toujours isolé, traverse une profonde récession.
Il y a dix ans, Kim Jong-un succédait à son père, Kim Jong-il, accédant ainsi au pouvoir suprême en Corée du Nord, l’une des nations les plus recluses de la planète. Ce fan de basket qui a étudié en Suisse avait un temps esquissé une volonté d’ouverture mais cette période semble désormais révolue et le pays s’isole à nouveau.
Au départ, Kim Jong-un affichait la volonté d’assouplir le contrôle étatique de l’économie, fermant les yeux sur le développement du marché noir. Ces initiatives privées de taille très modeste ont permis au pays d’enregistrer en 2016 sa plus forte croissance en 17 ans, selon la banque centrale de Corée du Sud.
Dans le même temps, il tendait la main à Séoul, allant jusqu’à inviter des vedettes sud-coréennes à se produire à Pyongyang. En 2012, des musiciennes y interprétaient « My way » de Franck Sinatra et six ans plus tard, des stars de la K-pop y reprenaient la chanson-titre du film américain « Rocky ».
Depuis, les sanctions internationales imposées en 2017 après des tests de missiles et un puissant essai nucléaire ont porté un sérieux coup à son économie. La fermeture, dès janvier 2020, de ses frontières pour se prémunir du Covid-19 a aggravé la situation.
En réponse, le leader nord-coréen a renforcé son emprise et appelé à la solidarité nationale, selon des analystes.
« Une censure de plus en plus importante laisse penser que le régime est moins confiant », souligne Troy Stangarone, directeur à l’Institut économique coréen.
Sanctions et récession économique
Parallèlement, selon des analystes, le dirigeant a perdu de l’assurance à l’issue de ses différentes rencontres avec le président américain Donald Trump, qui ont abouti à une impasse en 2019. Les deux dirigeants n’ont pas réussi à s’entendre sur les conditions d’un allègement des sanctions.
Le régime nord-coréen a enregistré en 2020 sa plus importante récession économique depuis deux décennies, selon la banque centrale de Corée du Sud.
Lors du congrès du parti au pouvoir, en janvier, Kim Jong-un a reconnu des erreurs dans la mise en oeuvre du plan économique, en présentant ces cinq dernières années comme la « pire » période pour son pays.
Le régime a officiellement repris le contrôle de l’ensemble du commerce extérieur et des marchés intérieurs. Pyongyang a promulgué une loi punissant de 15 ans de prison les personnes possédant des biens sud-coréens.
Les médias nord-coréens ont rapporté des propos du leader exhortant les autorités à éliminer le « cancer vicieux qui menace notre idéologie et notre système social et entrave la pensée unique ». « En période difficile, le régime doit renforcer son contrôle pour réaffirmer son autorité », explique à l’AFP Troy Stangarone.
Résistance discrète face à la censure
La Corée du Nord réprime depuis longtemps ce qu’elle appelle « l’invasion idéologique et culturelle ». L’accès à la culture venue de l’étranger est sévèrement restreint, peines de prison à l’appui. Toutes les radios et télévisions sont pré-réglées afin de ne recevoir que les médias d’État, et les Nord-Coréens n’ont pas accès au réseau internet mondial.
Mais selon des analystes, une telle censure aura du mal à être totale car le matériel étranger est déjà très répandu en Corée du Nord, notamment parmi la jeune génération, grâce notamment aux clés USB importées illégalement de Chine.
Dans une étude de l’Institut d’études sur la paix et l’unification de l’Université nationale de Séoul, près de la moitié des 116 personnes ayant fui la Corée du Nord en 2018 et 2019 ont répondu avoir « fréquemment » regardé des programmes de divertissement de Corée du Sud.
Cho Han-bum, chercheur principal à l’Institut coréen pour l’unification nationale, a déclaré que la « génération Jangmadang » – ceux qui sont nés et ont grandi pendant et après la famine des années 1990 – résistera probablement à la répression.
L’État n’ayant pas été en mesure de leur fournir des rations alimentaires pendant leur enfance, ils ont grandi en se débrouillant seuls, en comptant sur le marché noir pour survivre – et avec une allégeance nettement moindre envers les dirigeants, a expliqué Cho Han-bum.
« Un conflit entre l’approche conservatrice de Kim (Jong-un) et les milléniums et la génération Z du Nord – qui apprécient les séries sud-coréennes et la musique de BTS – sera inévitable », a-t-il ajouté.
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