Alors que le port du masque de protection contre la pandémie de COVID-19, est finalement devenu obligatoire, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer, outre l’inconfort et la relative inefficacité, des risques pour la santé d’un usage continuel. Voici quelques pistes, sérieuses, pour y voir plus clair.
Devenus obligatoires au travail, dans l’ensemble des lieux clos publics et même dans de nombreux centres-villes, les masques – censés nous protéger du COVID-19 – agacent de plus en plus : ils sont manifestement inconfortables et présenteraient des risques pour la santé du porteur : développement de micro-organismes, sur-exposition au CO2, aux COV, présence de graphène…
La transmission du coronavirus SARS-CoV-2 s’effectue principalement par voie aérienne lorsqu’une particule en suspension dans l’air, chargée du virus pénètrent dans les voies respiratoires d’une personne. Une personne contagieuse va expulser – via la respiration, la conversation, les éternuements, la toux – des particules de deux types : des aérosols (diamètre < 5 μm) et des gouttelettes (diamètre ≥ 5 μm – 10 μm) dont certaines contiennent le virus.
Les grosses gouttelettes tombent rapidement par gravité puis s’évaporent, mais les plus fines peuvent rester en suspension dans l’air longtemps et voyager sur de longues distances.
Il existe différents types de masques, allant des simples masques en tissu réutilisables faits maison aux masques chirurgicaux, aux FFP2 jusqu’aux appareils respiratoires autonomes. Et bien sûr, les niveaux de protection ne sont pas les mêmes.
Les masques chirurgicaux – les plus répandus – sont mieux que rien mais n’offrent pas une protection adéquate contre les particules les plus fines car ils ne bloquent que les aérosols d’une taille moyenne de 3 µm.
Le meilleur compromis entre le confort et l’efficacité est donné par les masques de type FFP2 capables de filtrer des particules jusqu’à 0,3 µm avec une efficacité de 95 %, mais ils sont peu confortables.
Début janvier 2021, le Haut conseil de santé public (HCSP) a déconseillé les masques maison et les masques en tissu de catégorie 2. Ces protections sont jugées trop perméables face au variant anglais significativement plus contagieux. Autrement dit, les masques artisanaux confectionnés à la hâte dès mars 2020 ne devraient plus être utilisés car inefficaces.
Les masques contre le coronavirus peuvent-ils entraîner une surexposition au CO2 ?
Une nouvelle étude publiée début octobre 2020 dans les Annals of the American Thoracic Society montre que les craintes quant à un empoisonnement au dioxyde de carbone sont infondées. En effet, certaines personnes affirment à tort que le port de masques faciaux peut mettre la santé des gens en danger en entraînant une surexposition au CO2 que nous expirons et qui ne pourrait être correctement évacué à cause du masque.
Mais même chez les patients atteints d’une maladie pulmonaire, ce n’est pas le cas.
« Nous montrons que les effets sont tout au plus minimes, même chez les personnes atteintes d’une insuffisance pulmonaire très sévère », a déclaré le Dr Campos du Miami Veterans Administration Medical Center et de la Division de pneumologie, d’allergie, de soins intensifs et de médecine du sommeil à l’Université de Miami.
Certaines personnes en bonne santé peuvent toutefois présenter une sensation d’essoufflement qui s’explique : « La dyspnée, la sensation d’essoufflement ressentie avec des masques par certains n’est pas synonyme d’altérations des échanges gazeux. Elle résulte probablement d’une restriction du débit d’air avec le masque en particulier lorsqu’une ventilation plus élevée est nécessaire (à l’effort).« , précise le Dr Campos.
Si vous marchez rapidement sur une pente, par exemple, vous pouvez ressentir un essoufflement. Un masque trop serré peut également augmenter la sensation d’essoufflement. La solution est simplement de ralentir ou de retirer le masque si vous êtes à une distance sûre des autres personnes.
Cette étude insiste sur le fait qu’il n’existe aucun changement physiologique notable lorsque l’on porte un masque chirurgical dans des conditions « normales » : repos ou marche brève. C’est déjà ce que martèle l’OMS : « l’utilisation prolongée de masques médicaux, dès lors qu’ils sont correctement portés, N’ENTRAÎNE PAS d’intoxication au dioxyde de carbone ni de manque d’oxygène ».
Les masques contiennent-ils des substances chimiques toxiques ?
La DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes) a mené deux campagnes de prélèvements en 2020 puis 2021, sur plusieurs dizaines de références de masques chirurgicaux destinés au grand public afin de rechercher d’éventuelles substances chimiques présentes dans ces masques. Puis l’Anses a été saisie pour évaluer les risques sanitaires éventuels liés à l’inhalation de ces substances ou à leur contact avec la peau.
Les résultats des analyses montrent bien la présence de plusieurs substances chimiques : dioxines, furanes, PCB-DL (polychlorobiphényles – dioxin-like), HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) et COV (composés organiques volatils).
Les Composés Organiques Volatils sont des molécules qui se concentrent notamment dans l’air intérieur et qui proviennent, en milieu urbain, en majorité des activités humaines : gaz d’échappement suite à une combustion, évaporation lors du stockage de produits pétroliers, fabrication/manipulation de solvants, d’insecticides… Ils sont utilisés dans la fabrication de nombreux produits et matériaux présents à la maison ou en milieu professionnel : solvants, peintures, colles, panneaux de particules, produits de jardinage, produits ménagers, déodorants… Et sont émis via ses produits. Ils sont cancérigènes à divers niveaux (Cancer Environnement)
Toutefois, l’Anses se veut rassurante : « les expositions aux substances chimiques retrouvées dans les masques ne dépassent pas les seuils sanitaires, aussi bien pour les adultes que pour les enfants. « Dès lors que les préconisations de port de masques sont respectées, ces résultats sont plutôt rassurants. Le respect des seuils sanitaires garantit en effet l’absence de risque pour la santé des populations, que ces substances soient inhalées ou en contact avec la peau » explique Céline Dubois, coordinatrice de cette expertise à l’Anses.
Toutefois, on peut légitimement s’inquiéter sur cette source d’exposition supplémentaire à des polluants chimiques problématiques déjà omnniprésents dans notre quotidien.
Selon L’Anses, les dioxines/furanes/PCB-DL analysés ne seraient pas ajoutés de manière intentionnelle par les industriels. Leur présence pourrait résulter d’une contamination provenant des procédés de fabrication ou d’une contamination externe. « Une hypothèse pourrait être l’utilisation de matières premières contaminées pour fabriquer les masques » précise Céline Dubois. L’origine exacte des HAP et COV n’a pas pu être identifiée, précise l’Anses.
Les masques jetables sont fabriqués à partir de fibres de polypropylène, un polymère plastique extrêmement répandu qui est connu pour son innocuité. Les masques en tissu sont généralement en coton et présentent les mêmes caractéristiques que nos vêtements.
Des masques traités avec un biocide ?
Certains « masques barrière » qui ne sont ni des masques chirurgicaux, ni des masques FFP2 ont été distribués par le gouvernement aux enseignants sous la marque DIM.
Or, ils sont traités à la zéolithe d’argent et de cuivre « afin de leur conférer une propriété biocide et ainsi augmenter la durée d’utilisation des masques. » précise Pierre Bauduin, chercheur en physique chimie à l’université de Montpellier, dans le média Reporterre.
Comme tout biocide, il n’est pas sain et cette substance active est susceptible de nuire à la fertilité et peut polluer les milieux aquatiques (fiche ECHA).
Toutefois, l’expertise de l’Anses, rendue publique le 28 octobre 2020, écarte « la potentialité d’effets nocifs immédiats et graves pour la santé humaine, un constat conforté par l’absence de signalement auprès des centres antipoison et de toxicovigilance d’effets indésirables avérés liés au port de ces masques. » Et ajoute que si les précautions d’emploi sont respectées, « le port de ces masques ne présente pas d’effet nocif pour la santé humaine, notamment de toxicité pour la reproduction. Ces précautions comprennent le lavage avant le premier emploi et après chaque utilisation, le port de 4 heures maximum et le remplacement des masques dès qu’ils sont humides. »
Dans le cas contraire, l’Anses considère « que des effets toxicologiques à moyen terme tels que l’accumulation d’ions argent Ag+ dans les organes peuvent résulter de ces expositions, et que des risques sanitaires ne peuvent donc être totalement écartés. »
Du graphène dans les masques ?
En avril 2021, des masques de protection FFP2 contenant du graphène ont été retirés du marché canadien. Les autorités françaises ont alors suspendu leur distribution le temps que l’Anses évalue les risques sanitaires liés à leur port.
Le graphène est un matériau synthétique innovant composé d’une ou plusieurs couches d’atomes de carbone disposés en réseaux. En Europe, son utilisation en tant que substance biocide (qui tue) n’est pas autorisée aujourd’hui, quel que soit le type de produit envisagé.
Suite à son expertise, l’Anses précise que les données disponibles ne mettent pas en évidence de situations d’exposition préoccupantes. Pour autant, il est impossible d’évaluer le risque pour la santé liée à l’exposition au graphène, en raison du manque d’information sur le graphène utilisé par les fabricants et sur la toxicité de cette substance, en particulier à long terme. L’Anses recommande aux autorités publiques de privilégier la mise sur le marché ou la mise à disposition de masques sans graphène.
Les masques contre le coronavirus sont-ils vraiment efficaces ?
Cette question récurrente est légitime alors que de plus en plus de voix s’élèvent pour les discréditer après les avoir tant réclamés avant et pendant le confinement. De nombreuses « discussions » sur les réseaux sociaux et de nombreux articles sur les sites web les considèrent comme inefficaces.
Et pourtant, dans les pays qui ont massivement utilisé des masques dès le début de la pandémie de COVID-19 (Hong Kong, Corée du Sud, Malaisie, Taïwan, Japon, Slovaquie, République Tchèque, ,Vietnam…) la propagation du SARS-CoV-2 et la mortalité associée est restée limitée, contrairement aux pays qui ont tardé à les utiliser (comme la France, le Brésil ou les Etats-Unis)
Le masque n’est évidemment pas un moyen sûr de ne pas être contaminé, il existe pour cela des combinaisons dédiées et étanches, mais réservées aux spécialistes. Cependant, c’est un moyen efficace de limiter la propagation du virus en empêchant les projections de gouttelettes (via les postillons, éternuement…) vers son entourage : « La fonction du masque est de réduire la distance parcourue par les gouttelettes d’aérosol pendant la respiration, la parole, le chant, les éternuements ou la toux. C’est la même raison pour laquelle on doit se couvrir la bouche ou le nez avec l’avant-bras, l’intérieur du coude ou les mouchoirs en éternuant. » précise Paul W Leu de l’Université de Pittsburgh dans une volée de commentaires contradictoires suite à une étude – montée en épingle – qui prétend montrer l’inefficacité des masques sur la lutte contre le SARS–CoV-2.
« Les fausses informations sur les différents types de masques, amplifiées dans un contexte de crise, et relayées par la presse grand public et les réseaux sociaux, viennent semer le trouble parmi les soignants. Cette confusion est source d’angoisse et de conséquences potentiellement néfastes pour leur exercice professionnel (…) Le masque chirurgical a largement démontré son efficacité pour empêcher la transmission de la majorité des agents viraux respiratoire, y compris les coronavirus. Le masque FFP2 ne lui est pas supérieur en dehors de situations particulières de manœuvres respiratoires à haut risque de produire des aérosols », conclut un éclairage d’avril 2020 signé par des professionnels de la santé français.
En conclusion, le Dr Campos souligne l’importance de porter un masque facial pour réduire le risque d’infection au COVID-19, notamment pour protéger les personnes atteintes d’une maladie pulmonaire. Dans tous les cas, « Le public ne devrait pas croire que les masques tuent« .
La pandémie de COVID-19 pousse les scientifiques et les ingénieurs à fabriquer des masques plus performants, durables et confortables mais en attendant, tous les masques, même les moins efficaces permettent de réduire la propagation du virus (Sanjay Kumar and Heow Pueh Lee – Physics of Fluids 2020).
Cependant, dans les environnements présentant des concentrations potentiellement élevées de virus en suspension dans l’air, tels que les établissements médicaux et les espaces intérieurs densément occupés, des masques avec une efficacité de filtration plus élevée (N95/FFP2) doivent être utilisés et combinés avec d’autres mesures de protection telles qu’une ventilation intensive (Yafang Cheng et al. 2021).
Est-il risqué de faire du sport avec un masque ?
Finalement, le seul risque significatif est de porter un masque pendant une activité sportive : « il ne faut PAS porter de masque quand on fait de l’exercice car les masques peuvent réduire l’aisance respiratoire. La transpiration peut entraîner une humidification plus rapide du masque, rendant la respiration plus difficile et favorisant la croissance des micro-organismes. Pendant l’exercice, la principale mesure de prévention consiste à garder une distance physique d’au moins un mètre avec les autres, » précise l’OMS qui ajoute qu’il ne faut pas réutiliser un masque à usage unique et qu’il est nécessaire de le changer dès qu’il s’humidifie.
Est-il nécessaire de porter un masque à l’extérieur ?
Le port du masque à l’extérieur, reste controversé. Une étude publiée fin avril 2021 dans thebmj fait le point. Babak Javid de l’Université de Californie à San Francisco et ses collègues reconnaissent que le risque de transmission du virus covid-19 est beaucoup plus élevé à l’intérieur qu’à l’extérieur. A ce titre, ils ne soutiennent pas les les politiques qui exigent de porter un masque à l’extérieur lorsque que l’on est seul ou avec son entourage. Mais ils confirment que le masque est nécessaire à l’extérieur, en particulier lors de grands rassemblements en plein air avec des interactions rapprochées et prolongées.
Si le port du masque à l’extérieur, en particulier lors de grands rassemblements en plein air, permet de réduire le risque de contagion, le Dr Muge Cevik de l’Université de St Andrews et ses collègues affirment que la transmission à l’extérieur contribue très peu aux taux d’infection globaux et que les efforts devraient se concentrer sur la réduction de la transmission à l’intérieur.
En effet, aucun cluster n’a été confirmé en extérieur. Le rallye Sturgis (qui rassemble jusqu’à 500 000 motos Harley) dans le Dakota du Sud ou l’épidémie de Rose Garden à la Maison Blanche sont fréquemment avancés comme preuves de cluster extérieurs mais ces événements masquent des contaminations durables en intérieur de plusieurs jours. Par exemple, une enquête épidémiologique sur le Sturgis Rally a révélé des cas apparus dans des restaurants et lieux de travail. En outre, les craintes d’une transmission accrue après les manifestations de masse en faveur du mouvement Black Lives Matter ne se sont pas réalisées.
Compte tenu du faible risque de transmission à l’extérieur, les recommandations ou les obligations de porter un masque en extérieur peuvent sembler arbitraires et affectent la confiance du public dans l’efficacité des mesures prises, tout en dissuadant les personnes d’être à l’extérieur, « ce qui pourrait aggraver l’isolement social« .
C’est pourquoi, les chercheurs considèrent que le public devrait être encouragé à être plus vigilant en intérieur et à porter un masque tout en notant qu’un contact prolongé et rapproché à l’extérieur peut présenter un risque.
Malheureusement, entre les grands médias et les politiques qui racontent tout et n’importe quoi pour servir leurs intérêts et les réseaux sociaux qui servent de vecteur à l’ignorance et la bêtise, les scientifiques restent trop souvent écartés des débats et des prises de décisions, alors qu’ils les éclairent bien souvent avec bon sens.