Primaire populaire : « Christiane Taubira prend un risque », se félicite le président du PRG

Président du Parti radical de gauche, qui soutient la candidature de Christiane Taubira à la présidentielle, Guillaume Lacroix se dit confiant sur la capacité de la primaire populaire organisée fin janvier à « faire bouger les lignes » à gauche. Le responsable, qui met à la disposition de l’ancienne garde des Sceaux les parrainages des élus de son mouvement, vante le « courage » de sa candidate.

Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Fabrice Roussel, Anne Hidalgo… Tous seront départagés malgré eux du 27 au 30 janvier à travers la primaire populaire, une consultation en ligne qui vise à promouvoir un candidat unique à gauche pour la présidentielle . Si l’insoumis, l’écologiste et le communiste ont rejeté ce processus, et qu’Anne Hidalgo hésite encore après l’avoir proposé aux autres, une autre prétendante y prendra pleinement part : Christiane Taubira .

L’ancienne garde des Sceaux, déjà candidate à la présidentielle en 2002 (elle avait obtenu 2,32% des voix), a d’abord « envisagé » en décembre de se présenter avant de préciser dimanche qu’elle se soumettrait au résultat de ce scrutin. Elle devra confirmer cette intention en fin de semaine, en même temps que la présentation des grandes lignes de son projet, avant que l’on connaisse samedi la liste définitive de ceux qui seront départagés dans le cadre de cette primaire.

A la tête depuis 2019 du Parti radical de gauche, mouvement qui a apporté son soutien à Christiane Taubira dans cette campagne, Guillaume Lacroix estime qu’une victoire de l’ancienne élue guyanaise de 69 ans serait de nature à rebattre les cartes à gauche, même si aucun autre candidat ne prend acte de ce résultat. « Les juges de paix, ce sont ceux qui vont s’inscrire » à cette élection, estime-t-il. Entretien.

En quoi une éventuelle victoire de Christiane Taubira fin janvier à la primaire populaire permettrait-elle davantage l’union de la gauche si, dans le même temps, les autres candidats ne reconnaissent pas ce processus?
Déjà, il faudra voir à la fin qui reconnaîtra ou non le résultat! Je suis fasciné par exemple d’entendre Yannick Jadot dire qu’il ne reconnaîtra pas cette primaire. Mais s’il en est le vainqueur, est-ce qu’il le pensera toujours? Cette primaire peut devenir un objet politique puissant si elle crée une dynamique. Nous sommes aujourd’hui à 110.000 inscrits confirmés, ce qui est déjà presque le corps électoral de la primaire écologiste (près de 123.000 inscrits, NDLR) et du congrès des Républicains (près de 140.000 adhérents inscrits, NDLR). Et il reste encore 12 jours pour y participer! Donc je veux bien que des responsables politiques expliquent n’avoir rien à faire de ce type d’initiative, disent que ça n’existe pas ou que ça n’aura pas d’incidence sur leur campagne… Mais ce sera compliqué de s’asseoir sur une votation si elle a un grand nombre d’électeurs. Les juges de paix, ce sont donc ceux qui vont s’inscrire d’ici au 23 janvier.

Mais Christiane Taubira pourrait juste s’ajouter à la liste déjà longue des candidats de gauche….
On verra, je n’ajoute pas de la fiction à la fiction. Le plus important pour elle n’est pas le processus de désignation en lui-même, mais que ce processus permette le rassemblement. Christiane Taubira prend un risque. Elle n’a pas pesé sur l’organisation de cette primaire, elle n’est pas à l’origine des règles qui sont retenues et n’a pas même souhaité agir sur ces règles. L’idée était justement que l’on ne puisse pas nous faire le reproche d’avoir façonné un outil sur mesure pour Taubira. A côté, je note qu’Anne Hidalgo a voulu imposer ses conditions à cette primaire et qu’elle n’est maintenant plus sûre de vouloir y prendre part.

Christiane Taubira est un point d’équilibre à gauche

Le risque n’est-il pas calculé puisque Christiane Taubira est arrivée en tête de la première phase de ce processus, qui était d’obtenir des parrainages pour se qualifier?
Vous prenez toujours un risque quand vous ne faites pas ça en catimini. Si elle n’avait pas voulu prendre de risque, il lui suffisait de ne rien dire et d’attendre l’issue de ce vote puisque là, volontairement ou involontairement, tout le monde va y participer. La question, aujourd’hui, c’est de se mettre dans le jeu et de prendre acte ou de ne pas prendre acte de ce scrutin. Christiane Taubira appelle tous les électeurs – et pas seulement les siens – à s’inscrire. Elle met sa candidature en balance 15 jours avant la clôture des inscriptions et elle sait très bien qu’au cours de cette période, certains pourront s’inscrire pour soutenir d’autres candidats qu’elle. Je trouve ça bien plus courageux que ce qu’on observe depuis pas mal de temps.

En attendant, on peut imaginer que ce sont les soutiens de Christiane Taubira, et notamment les membres du PRG, qui auront peut-être le plus de motivation à s’inscrire…
Oui mais je vous rassure : je ne suis pas sûr que le poids du PRG soit de nature à changer complètement le résultat du scrutin! [Rires]

Même si elle sort de cette primaire, est-ce que Christiane Taubira ne restera pas la candidate soutenue par le PRG, au même titre qu’Anne Hidalgo est celle du PS ou Yannick Jadot celui du pôle écologiste? 
Avec plus de 100.000 votants, on ne pourra pas dire « Taubira est la candidate du PRG ». Ce n’est pas la suite de Taubira 2002. Je ne suis en tout cas pas dans une logique pavlovienne « Taubira, 20 ans plus tard ». D’abord, Taubira a quitté le PRG en 2007, il y a 15 ans déjà. Et puis si nous avons des points de convergence, nous avons aussi des divergences que l’on ne cache pas! Mais si notre mouvement soutient aujourd’hui sa démarche, c’est parce qrue nous sommes à la recherche de cette union de la gauche et que Christiane Taubira est justement un point d’équilibre à gauche.

Taubira sait bien qu’on ne va pas devant les Français pour ne rien dire

Peut-on arriver à mettre sur pied un projet présidentiel en à peine un mois? 
Christiane Taubira a confirmé de fait sa candidature dimanche et veut maintenant parler de fond. Elle va proposer un récit d’ensemble de ce que serait sa présidence. Les Français n’ont pas besoin de 70 mesures « technos », ils veulent comprendre comment vous voulez agir. C’est ce qu’elle fera en fin de semaine. Et puis, elle n’a pas attendu d’être dans une logique présidentielle pour réfléchir. Elle sait bien qu’on ne va pas devant les Français pour ne rien dire. On n’a pas le parcours de Taubira sans saisir la responsabilité qu’implique une candidature à la présidentielle.

Le PRG est-il déjà en ordre de marche pour mener sa campagne? 
La première des priorités est la récolte des parrainages. Nous sommes totalement mobilisés là-dessus, sachant que notre parti représente un peu moins de 300 signatures. L’allure à laquelle ça remonte me laisse penser qu’il n’y aura pas de difficulté, ce qui signifie que plus de la moitié du chemin sera rapidement fait.

Si elle ne remporte pas ce processus, seriez-vous prêts à ne soutenir personne dans cette campagne?
Il faudra se reposer la question le moment venu, après le vote, le 30 janvier. Christiane Taubira a dit qu’elle respectera le verdict. La question se posera moins pour moi, n’étant pas candidat à cette primaire. Mais je veux croire que les lignes vont bouger à l’issue de ce processus.

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