Lors de l’examen du projet de loi transformant le passe sanitaire en passe vaccinal, le Sénat a supprimé, dans la nuit de mardi à mercredi, la possibilité pour les gérants de certains lieux de vérifier l’identité de son détenteur. La Haute Assemblée poursuivra, dans la journée, l’examen de plus de 100 amendements.
Face à des contaminations record au Covid-19 en France, le Sénat a entamé, mardi 11 janvier, dans un climat apaisé, l’examen du projet de loi instaurant le passe vaccinal qu’il devrait voter en première lecture, mais au prix de modifications significatives.
La période est « incontestablement difficile, marquée ces derniers jours par des records de contaminations », « encore 350 000 » ce jour, a lancé le ministre de la Santé, Olivier Véran, au coup d’envoi des échanges.
Le projet de loi, soumis au Sénat jusqu’à mercredi, après l’Assemblée nationale la semaine dernière, « demeure tout entier guidé par la recherche d’un équilibre difficile, avec le souci premier de protéger les Français tout en assurant la continuité de la vie de la Nation », a plaidé le ministre.
En toute fin de soirée, la Haute Assemblée a supprimé la possibilité, pour les patrons de bars, cafés et restaurants, de vérifier l’identité des détenteurs du passe. Cette mesure controversée avait pourtant été maintenue en commission, sur des « modalités allégées ».
Dans l’après-midi, le Sénat avait, en revanche, repoussé une motion de rejet en bloc du texte présentée par le centriste Loïc Hervé, fervent opposant au passe vaccinal. Puis une série d’amendements visant à la suppression de l’article phare relatif au passe, portés par les groupes CRCE à majorité communiste et écologiste, mais aussi une poignée d’élus LR et le sénateur RN Stéphane Ravier.
Un passe vaccinal pour les plus de 18 ans
Une fois le projet de loi adopté par le Parlement, il faudra pouvoir justifier d’un statut vaccinal pour accéder aux activités de loisirs, restaurants et bars, foires ou transports publics interrégionaux. Un test négatif ne suffira plus, sauf pour accéder aux établissements et services de santé.
Contre l’avis du gouvernement, les sénateurs ont prévu de limiter la possibilité d’imposer la présentation d’un passe vaccinal aux personnes de plus de 18 ans. Les mineurs âgés de 12 à 17 ans resteraient soumis à l’obligation de présenter un passe sanitaire.
Autre modification majeure, que le gouvernement ne souhaite pas voir inscrite dans la loi : le rapporteur LR Philippe Bas a prévu un mécanisme d' »extinction automatique » du passe vaccinal. Ainsi, il ne pourrait être imposé que lorsque le nombre d’hospitalisations liées au Covid-19 serait supérieur à 10 000 patients au plan national, et disparaîtrait automatiquement en-deçà de ce seuil. Les hôpitaux comptent aujourd’hui plus de 25 000 malades du Covid, selon les chiffres des autorités sanitaires.
Également dans le collimateur des sénateurs, le régime de sanction pour les employeurs qui ne respecteraient pas les dispositions relatives au télétravail.
Nombre d’orateurs ont estimé, à l’instar de Philippe Bas, que le passe vaccinal « aussi utile qu’il puisse être, ne répond pas » à l’urgence sanitaire actuelle et au désordre à l’école, dans le travail et surtout à l’hôpital, auquel le gouvernement n’a pas préparé le pays ».
À gauche, la présidente du groupe CRCE, Éliane Assassi, a fustigé un « énième projet de loi sécuritaire et d’intimidation, d’infantilisation », l’écologiste Guy Benarroche « l’installation d’une société de contrôle liberticide ».
A contrario, les socialistes jugent « logique d’approuver le passe vaccinal » pour une obligation vaccinale généralisée, a indiqué Jean-Pierre Sueur.
« Ce sont les virus qui bafouent les libertés, pas les vaccins », a martelé, de son côté, le chef de file des Indépendants, Claude Malhuret, pour qui « l’idéal serait la vaccination obligatoire ».
Après le vote du Sénat, la recherche d’une version commune
Le Sénat poursuivra, mercredi, l’examen de plus de cent amendements, dont près d’une cinquantaine sur l’article premier actant la transformation du passe sanitaire en passe vaccinal.
Parmi les amendements adoptés sur cet article, celui du centriste Pierre-Antoine Levi visant à instaurer des jauges proportionnelles aux capacités des stades et des salles de spectacle, voté malgré un double avis défavorable du gouvernement et du rapporteur.
Une fois le projet de loi voté par le Sénat, députés et sénateurs se réuniront en commission mixte paritaire pour tenter de trouver un accord sur une version commune. Possiblement dès jeudi, selon une source parlementaire.
En cas d’échec, une nouvelle lecture sera organisée dans les deux chambres. L’Assemblée aurait le dernier mot, mais l’horizon de la mi-janvier souhaité par le gouvernement pour la mise en œuvre risquerait d’être difficile à tenir, surtout en cas de recours devant le Conseil constitutionnel.