En Allemagne, la reprise économique freinée par les pénuries

New cars stand at an assembly line in the main company of Germany's carmaker BMW in Munich, southern Germany, on October 22, 2021.

L’Allemagne, première économie de l’UE, comptait rebondir fortement en 2021, mais c’était sans compter les pénuries et la poursuite de la crise sanitaire qui ont freiné la croissance, plaçant le pays à la traîne de ses voisins européens.

Le pays a connu une hausse décevante de 2,7% de son PIB l’an dernier, selon des chiffres provisoires publiés vendredi par l’Office national des statistiques Destatis.

« Les attentes très élevées placées début 2021 dans la conjoncture allemande n’ont été que partiellement satisfaites », résume Fritzi Köhler-Geib, cheffe économiste de la banque publique KFW.

Initialement optimistes, les prévisions de croissance ont été continuellement revues à la baisse par les experts au cours de l’année.

En cause: « l’augmentation des pénuries d’approvisionnement et de matériel », « la quatrième vague de Covid-19 » et « un nouveau renforcement des mesures » sanitaires, ont commenté les économistes de l’institut Destatis lors d’une conférence de presse.

La croissance de 2021 ne « suffit pas à rattraper le fort recul enregistré lors de la première vague de coronavirus » et la création de valeur ajoutée est restée « inférieure de 2,1% » à son niveau pré-pandémie, ont-il ajouté.

Lors de la cauchemardesque année 2020, le pays avait limité la casse, comparé au reste de l’UE, avec une récession de « seulement » 4,9%.

Initialement optimistes, les prévisions de croissance allemande ont été continuellement revues à la baisse par les experts au cours de l'année écoulée
Initialement optimistes, les prévisions de croissance allemande ont été continuellement revues à la baisse par les experts au cours de l’année écoulée John MACDOUGALL AFP/Archives

L’Allemagne fait cette fois-ci moins bien que beaucoup de ses voisins, alors que la croissance moyenne attendue dans l’UE est de 5%, selon les dernières projections de la Commission européenne, avec des envolées à 6,5% en France ou 6,2% en Italie.

C’est aussi une épine dans les plans de la coalition du chancelier social-démocrate Olaf Scholz, arrivée au pouvoir en décembre avec d’importants chantiers à financer.

A la nouvelle vague d’infections de Covid-19 en fin d’année, désormais alimentée par le variant Omicron, s’est ajouté l’impact sur le « made in Germany » des problèmes d’approvisionnement en matières premières et composants.

– Pénuries durables-

Pour les secteurs d’activité, notamment les services, touchés par la crise sanitaire, « les réserves sont de plus en plus maigres, les bénéfices diminuent, les investissements ralentissent », a résumé jeudi le ministre de l’Economie Robert Habeck.

Pour l’industrie, moteur de l’économie nationale, les conséquences de la crise mondiale des chaînes d’approvisionnement semblent s’installer dans la durée.

L’automobile, industrie phare, souffre particulièrement du manque de semi-conducteurs, des éléments essentiels pour la construction d’un véhicule. Le secteur a encaissé en 2021 une nouvelle année noire, avec des immatriculations en recul de 10,1% par rapport au niveau historiquement bas de 2020.

Aucune amélioration n’est attendue à court terme: « On doit être clair: la crise des semi-conducteurs est loin d’être terminée », confiait récemment Stefan Hartung, le PDG de l’équipementier automobile Bosch.

Stefan Hartung, le PDG de l'équipementier automobile Bosch, lors d'une conférence de presse au Salon automobile de Munich, le 7 septembre 2021
Stefan Hartung, le PDG de l’équipementier automobile Bosch, lors d’une conférence de presse au Salon automobile de Munich, le 7 septembre 2021 CHRISTOF STACHE AFP/Archives

En 2021 et 2022, ces pénuries devraient entraîner au total un manque à gagner de 100 milliards d’euros pour l’industrie allemande, a estimé jeudi l’organisation du secteur BDI.

« Malgré des carnets de commandes pleins, le manque de puces électroniques, de composants et de matières premières continuera à affecter la production pendant une longue période », estime son président Siegfried Russwurm.

Ces pénuries alimentent une inflation record, également tirée par la flambée des prix de l’énergie, qui freine le moral des consommateurs, déjà mis à mal par la crise sanitaire.

Besoin d’investissements

La situation est donc délicate pour le gouvernement d’Olaf Scholz, allié aux écologistes et aux libéraux. La médiocre conjoncture économique pourrait réduire les marges de manoeuvre de la nouvelle coalition, qui s’est donné pour objectif des investissement massifs pour moderniser et verdir son économie.

Berlin a tout de même approuvé en fin d’année une rallonge de 60 milliards d’euros sur le budget 2021, destinée à des investissements supplémentaires, essentiellement en faveur du climat.

Entre 2020 et 2021, le déficit public de l’Etat est déjà passé de 145,25 à 153,86 milliards d’euros, selon Destatis.

Le gouvernement mise sur une amélioration progressive de la situation. « La situation dans l’industrie s’est stabilisé ces derniers mois », a ainsi commenté vendredi le ministère de l’Economie.

L’Allemagne devrait connaître, en 2022, une croissance de 3,7%, selon les prévisions de l’institut IFO. « Les perspectives pour 2022 ne sont donc pas mauvaises, compte tenu du niveau élevé des carnets de commandes dans l’industrie manufacturière », abonde Jens-Oliver Niklash, expert pour LBBW.

france24

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