L’ancienne otage des Farc Ingrid Betancourt, candidate d’un parti écologiste, va participer à une primaire pour être candidate à l’élection présidentielle prévue au printemps 2022 en Colombie.
Elle veut terminer ce qu’elle a commencé en 2002. Vingt ans après son enlèvement par les Farc, la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt a annoncé, mardi 18 janvier, son intention de prendre part à la primaire organisée en mars pour départager les candidats d’une coalition centriste, la Coalition de l’espérance.
En cas de victoire, l’ex-otage de 59 ans représentera donc le centre à l’élection présidentielle en Colombie, un courant qui se veut une alternative au face-à-face structurant entre la droite au pouvoir et la gauche, représentée par l’ex-maire de Bogota et ancien guérillero Gustavo Petro, aujourd’hui le favori dans les sondages.
Le scrutin aura lieu les 29 mai et 19 juin afin d’élire le successeur d’Ivan Duque.
« Je vais travailler sans relâche à partir de maintenant, du lever au coucher du soleil, pour être votre présidente », a déclaré la présidente du petit parti écologiste Vert Oxygène, au cours d’une conférence de presse.
Terminer ce qui avait été commencé avant son enlèvement
« Pendant des décennies, nous n’avons eu que de mauvaises options : extrême droite, extrême gauche. Le temps est venu d’avoir une option de centre », a souligné la candidate, qui s’est fixée comme objectifs la lutte contre l’insécurité et la pollution. « Je crois en un monde avec une vision de femme. »
« Aujourd’hui, je suis ici pour terminer ce que j’ai commencé avec beaucoup d’entre vous en 2002. Avec la conviction que la Colombie est désormais prête à changer de cap », a-t-elle déclaré, faisant allusion à ses six années de détention dans la jungle.
Ingrid Betancourt avait été kidnappée par la guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) pendant qu’elle faisait campagne pour la présidence.
Elle a été secourue lors d’une opération militaire et vit depuis à l’étranger, séjournant régulièrement en Colombie où elle prend souvent part au débat public.
Une indemnisation controversée
La Franco-Colombienne s’est également exprimée, mardi, sur une polémique : les 36 millions de dollars (31,8 millions d’euros) de réparation financière ordonnée début janvier par la justice américaine contre les Farc pour leur responsabilité dans son enlèvement.
« Nous avons parfois pris l’habitude de penser que demander justice est abusif (…). Je suis venue aujourd’hui pour demander que chaque fils, chaque fille, chaque père, chaque mère soit indemnisé, indemnisé et indemnisé », a martelé la candidate.
Un tribunal fédéral de Pennsylvanie (nord-est des États-Unis) a jugé le 4 janvier que le fils de l’ex-otage « a droit à une indemnisation de 12 millions de dollars (10,6 millions d’euros) avant qu’elle ne soit triplée avec les frais et coûts d’avocats », soit plus de 36 millions de dollars, selon ses avocats.
Lawrence Betancourt, aussi appelé Lorenzo, qui possède la nationalité américaine, avait déposé plainte aux États-Unis, au civil en juin 2018, contre quatorze anciens responsables des Farc, dont la plupart sont présumés morts aujourd’hui ou toujours en armes dans la jungle.
En 2010, Ingrid Betancourt avait elle aussi demandé une compensation à l’État colombien pour ne pas avoir garanti sa sécurité, mais elle avait renoncé face aux critiques. « On m’a accusée d’avoir été ingrate, opportuniste, cupide (…). Mais le système de corruption qui règne dans notre pays ne reconnaît que les droits des bandits », a-t-elle fustigé, disant attendre, comme les autres victimes, « vérité, justice et réparation » des enquêtes menées par le Tribunal de paix, mis en place par l’accord de 2016 qui a mis fin à un conflit de plus d’un demi-siècle avec la guérilla marxiste.
Selon cet accord, ceux qui avouent leurs crimes et réparent les dommages causés aux victimes de guerre pourront éviter la prison. À défaut, ils risquent des peines allant jusqu’à 20 ans de réclusion.
AFP