La junte militaire, qui dirige désormais le Burkina Faso depuis trois jours, poursuivait ce jeudi 27 janvier ses consultations à la veille d’un sommet des États ouest-africains qui pourraient décider de la sanctionner.
Une vingtaine de syndicalistes se sont présentés ce mercredi 27 janvier au siège de la présidence à Ouagadougou pour y rencontrer les membres de la junte qui a pris le pouvoir lundi, présidée par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba.
La veille, le nouvel homme fort du Burkina Faso qui a renversé le président élu Roch Marc Christian Kaboré, accusé d’impuissance face à la violence djihadiste qui ravage ce pays depuis 2015 avait rencontré les ministres du gouvernment dissous.
Il leur a demandé de ne pas quitter le Burkina sauf autorisation et avait indiqué à cette occasion qu’il souhaitait impliquer toutes les composantes nationales dans la gestion de la transition, selon des sources politiques.
En prenant le pouvoir, la junte s’est engagée au retour à l’ordre constitutionnel « dans un délai raisonnable ». Depuis, aucun membre de la junte du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), n’a pris publiquement la parole.
Les consultations des acteurs de la société politique et sociale burkinabè interviennent à la veille d’un sommet virtuel des pays membres de la Communauté des Etats ouest-africains (Cédéao) qui a fermement condamné ce nouveau coup d’État dans la région.
Comme elle l’a fait auparavant pour deux autres pays où des militaires ont pris le pouvoir, le Mali et la Guinée, la Cédéao devrait suspendre le Burkina Faso de ses instances et probablement imposer des sanctions aux putschistes.
« La junte doit tout faire pour éviter au Burkina Faso des sanctions internationales », a déclaré à l’AFP Clément Sawadogo, vice-président du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), parti du président déchu.
Il a rappelé que le Burkina est « un pays enclavé en position fragile » et qu’il fallait « trouver une solution de sagesse pour éviter une crise sécuritaire qui continue » avec « en plus une crise socio-économique ».
Sans surprise, le coup d’État a été condamné par le MPP qui a réclamé la « libération immédiate » du président renversé et de son Premier ministre Lassina Zerbo. Condamnation et libération également exigées par la communauté internationale.
Plusieurs organisations de la société civile, parmi lesquelles la Balai citoyen qui avait joué un rôle crucial dans la chute de l’ex-président Blaise Compaoré en 2014 après 27 ans au pouvoir, ont en revanche été plus mesurées.
« Nos organisations attachées à l’État de droit et aux valeurs démocratiques, réprouvent les coups d’Etat militaires ou constitutionnels (modifications d’articles pour se maintenir au pouvoir) », écrivent-elles dans un communiqué, ajoutant aussitôt: « Néanmoins, elles prennent acte de la situation ».
Elles « exigent que l’intégrité physique et morale du président, des membres du gouvernement soient préservées »et « mettent en garde contre la mal gouvernance, la gabegie et la corruption, maux ayant caractérisé le régime Roch Marc Christian Kaboré ».
Elles exigent aussi « la poursuite normale » du procès des assassins présumés en 1987 de Thomas Sankara, leader progressiste et icône panafricaine, tué par un coup d’Etat fomenté par des proches, dont Blaise Compaoré qui avait pris le pouvoir.
Reprise du procès sur l’assassinat de Thomas Sankara
Commencé en octobre 2021, le procès a été interrompu par le putsch, mais reprendra rependra lundi devant le tribunal militaire de Ouagadougou, a indiqué un communiqué du parquet du procureur militaire.
Le parquet dément en outre des informations faisant état de la libération du principal accusé présent à ce procès, le général Gilbert Diendéré, un proche de Blaise Compaoré, autre accusé majeur jugé en absence, puisqu’il vit en Côte d’Ivoire.
Le général Diendéré purge déjà une peine de 20 ans de prison pour une tentative de coup d’État commise en 2015, un an après la chute de M. Compaoré.
C’est depuis 2015 que, dans le sillage du Mali et du Niger, le Burkina Faso est pris dans une spirale de violences attribuées à des groupes armés djihadistes, affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique qui ont fait en près de sept ans plus de 2.000 morts et contraint 1,5 million de personnes à fuir leurs foyers.
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