Depuis toujours, la pêche est la principale source de revenus à Kisumu, ville bâtie sur les rives du lac Victoria à 340 kilomètres de Nairobi. Depuis plus de 20 ans, des centaines de femmes se sont jointes à cette industrie et transforment la peau de la Perche du Nil en cuir.
Le travail méticuleux et répétitif consiste à gratter les écailles de poisson à l’aide de couteaux. Les peaux sont ensuite revendues vers les marchés étrangers, notamment à destination du Canada, des États-Unis, du Danemark, de l’Éthiopie et de l’Afrique du Sud pour la fabrication de chaussures et divers produits de maroquinerie.
» Je fais ce travail depuis 20 ans et il me permet de subvenir aux besoins de mes enfants, de payer leurs frais de scolarité. Ce travail est essentiellement fait par des femmes car les hommes ont du mal à rester assis pendant 8 heures d’affilée. Pour nous, les femmes cela ne nous pose aucun problème. », explique Céline Adhiambo, une vendeuse de peaux de poisson de 38 ans.
An employee descales Nile perch fish skins before they are processed to make goods including jackets and belts pic.twitter.com/6y6WUbSwaq
— Tamer Yazar (@tameryazar) July 16, 2018
En 2010, Newton Owino, homme d’affaires de 42 ans, a vu une opportunité qui l’a incité à commencer à transformer la peau de Perche du Nil en cuir par l’intermédiaire de son entreprise, Alisam Product Development and Design. Il achète les peaux de poisson à un groupe de 80 femmes. La création de son entreprise est une réponse à la demande croissante de cuir provenant de sources non mammaliennes.
« Kisumu abrite près de sept industries de filetage de poisson. Les industries de filetage produisent près de 150 000 tonnes métriques de déchets de poisson par an », explique-t-il.
Mais cela pose des problèmes, selon Newton Owino, qui est chimiste industriel de formation. « Tous ces déchets sont à l’origine de nombreux problèmes environnementaux, notamment l’eutrophisation, c’est-à-dire qu’ils enrichissent le lac, provoquant ce qui recouvre actuellement le lac, à savoir les herbes aquatiques », assure-t-il. Les plantes aquatiques envahissantes comme la jacinthe d’eau ont un impact négatif sur l’écosystème du lac Victoria en empêchant la vie aquatique d’accéder à une lumière solaire adéquate.
Manifesting Money Monday…Success Stories…
Talk about innovation! Wow!
"Newton Owino from Kenya… https://t.co/gPHvt2kIqA
— Tonya K. Freeman (@divamamatonya) May 20, 2019
Des répercussions sur l’environnement
Pour minimiser l’impact négatif sur l’environnement, Newton Owino utilise des extraits de plantes comme agents de tannage, contrairement à de nombreuses entreprises qui utilisent des produits chimiques toxiques.
« Notre technologie de tannage utilise uniquement la chimie verte, c’est-à-dire l’utilisation de composés végétaux qui sont disponibles localement. Elle présente de nombreux avantages dans le sens où elle protège la santé humaine, la santé animale, la santé végétale et la santé environnementale », explique-t-il.
Pour transformer les peaux de poisson en cuir, Newton Owino utilise une machine fabriquée sur mesure qui trempe la peau de poisson pendant une heure. Pour renforcer la peau et éliminer l’odeur nauséabonde qu’elle dégage, un extrait de banane est ajouté. Ensuite, du sel est ajouté pour dompter l’infection bactérienne de la peau, qui est ensuite trempée pendant 8 heures avant d’être séchée.
L’utilisation du cuir de poisson devient de plus en plus prolifique dans l’industrie de la mode et un nombre croissant de marques internationales haut de gamme utilisent ce matériau.