Le président russe Vladimir Poutine a accusé mardi les États-Unis d’ignorer ses préoccupations et d’user de l’Ukraine pour endiguer la Russie, avant de nier toute intention belliqueuse et d’assurer espérer une « solution » à la crise russo-occidentale qui menace de dégénérer en conflit armé.
Vladimir Poutine sort de son silence sur la crise ukrainienne. Le président russe a accusé, mardi 1er février, l’Occident d’ignorer les préoccupations sécuritaires de Moscou et de mettre volontairement sur pied un scénario destiné à entraîner la Russie dans une guerre, sur fond de tensions croissantes à propos de l’Ukraine où l’armée va être renforcée.
Dans ce qui constituait ses premières remarques publiques sur la crise ukrainienne en près de six semaines, Vladimir Poutine n’a montré aucun signe suggérant qu’il était disposé à assouplir sa position face aux Occidentaux après que ceux-ci ont réitéré leur refus de répondre aux demandes de la Russie concernant l’Otan.
En déployant ces derniers mois des dizaines de milliers de soldats à la frontière ukrainienne et en envoyant des renforts militaires en Biélorussie, Moscou a alimenté chez les puissances occidentales la crainte d’une offensive contre l’Ukraine, après l’annexion de la péninsule de Crimée en 2014.
La Russie nie toute intention belliqueuse et dit désormais voir dans la réaction de l’Otan, qui a renforcé militairement son front oriental, la preuve qu’elle est la victime et non pas l’instigatrice d’une agression.
Du côté des puissances occidentales, les vastes demandes sécuritaires de Moscou sont perçues comme un prétexte pour lancer une nouvelle offensive contre l’Ukraine. Washington et Londres, notamment, ont prévenu la Russie de sanctions d’une ampleur inédite en cas d’invasion.
« Il est désormais clair (…) que les préoccupations fondamentales de la Russie ont été ignorées », a déclaré Vladimir Poutine lors d’une conférence de presse commune avec le Premier ministre hongrois Viktor Orban, dont le pays est membre de l’Otan et qui a tenté lors d’une visite à Moscou de servir de médiateur dans la crise ukrainienne.
« Sommes-nous supposés entrer en guerre ? »
Se projetant dans un avenir qui pourrait voir l’Ukraine être intégrée à l’Otan et tenter par la suite de reprendre la péninsule de Crimée, Vladimir Poutine a déclaré : « Sommes-nous supposés entrer en guerre avec le bloc de l’Otan ? Est-ce que quelqu’un a pensé à cela ? Apparemment non. »
Les chefs des diplomaties américaine et russe se sont de nouveau entretenus mardi par téléphone. Antony Blinken a déclaré à Sergueï Lavrov qu’il était temps que la Russie retire ses troupes de la frontière ukrainienne si elle était sincère en disant ne pas vouloir attaquer, a rapporté un haut responsable du département d’État américain.
« Nous continuons d’entendre des garanties que la Russie ne prévoit pas d’envahir (l’Ukraine), mais chaque action que nous constatons dit l’inverse, avec le déploiement continu de soldats, d’armes lourdes, les mouvements vers la frontière », a-t-il dit à des journalistes sous couvert d’anonymat.
En gardant jusque-là le silence depuis le 23 décembre sur la crise ukrainienne, Vladimir Poutine a laissé s’accentuer les doutes sur ses intentions, alors que plusieurs cycles de discussions entre Washington et Moscou, et dans un format plus large avec l’Otan, n’ont pas permis de réduire les divergences.
La théorie suggérée mardi par le président russe est que les États-Unis ne sont pas préoccupés par la sécurité de l’Ukraine mais veulent contenir la Russie.
À ses yeux, l’Ukraine est « seulement un instrument pour atteindre cet objectif », a dit Vladimir Poutine. « Cela peut être réalisé de différentes manières, en nous amenant dans une sorte de conflit armé et, avec l’aide de leurs alliés en Europe, en forçant l’entrée en vigueur contre nous de ces importantes sanctions dont ils parlent aux États-Unis. »
Renforcement des effectifs militaires ukrainiens
Viktor Orban, qui a ses propres désaccords au sein de l’Union européenne à propos de la démocratie en Hongrie, a déclaré à l’issue de sa rencontre avec Vladimir Poutine qu’il était possible de trouver un compromis.
« J’ai été convaincu aujourd’hui que les positions peuvent être rapprochées et qu’il est possible de signer un accord qui garantirait la paix, la sécurité de la Russie et qui serait acceptable aussi pour les États membres de l’Otan », a-t-il dit aux journalistes.
Alors que les puissances occidentales affichent depuis le début de la crise leur soutien à l’Ukraine, le Premier ministre britannique Boris Johnson s’est rendu mardi à Kiev pour y rencontrer le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.
Boris Johnson a accusé Vladimir Poutine de pointer une arme contre l’Ukraine afin de contraindre à redessiner la carte sécuritaire européenne datant de la fin de la Guerre froide. Il a appelé le président russe à la désescalade et au dialogue, soulignant toutefois que Londres était prêt à imposer automatiquement des sanctions contre la Russie au moment même où serait lancée une offensive.
Volodymyr Zelensky, qui a minimisé à plusieurs reprises le danger d’une invasion immédiate, a signé mardi un décret pour renforcer les effectifs de l’armée ukrainienne au cours des trois prochaines années.
S’exprimant devant les parlementaires, le président ukrainien a appelé au calme, assurant avoir pris cette mesure « non pas parce que nous aurons bientôt une guerre (…) mais que pour bientôt, et à l’avenir, il y ait la paix en Ukraine ».
Reuters
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