Guerre en Ukraine: comment se positionne la Chine, alliée de la Russie ?

Chinese honor guards wearing masks to protect agains the coronavirus are seen near the portrait of late leader Mao Zedong during a ceremony held at the Monument to the People's Heroes on Tiananmen Square in Beijing on Wednesday, Sept. 30, 2020. Negative perceptions of China have increased sharply in many of the world's advanced economies, especially in Australia and the U.K., a new survey from the Pew Research Center showed Tuesday, Oct. 6, 2020. (AP Photo/Ng Han Guan)

La Chine s’est abstenue lors du vote contre la résolution de l’ONU visant à sanctionner la Russie. En même temps, le ministre chinois des Affaires étrangères n’a fait aucune mention de la souveraineté de l’Ukraine lors de son coup de fil à son homologue allemand. La Chine oscille entre neutralité bienveillante et embarrassée.

Même si les liens n’ont jamais été aussi forts entre Moscou et Pékin, la Chine peut difficilement être vue comme soutenant la guerre en Europe. D’abord, parce que la doctrine de la diplomatie chinoise reposait jusqu’à présent sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité des pays. La Chine n’a pas reconnu l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014 ; si elle le fait pour le Donbass, certains pourront dire demain que les régions autonomes du Xinjiang et du Tibet à l’ouest de la Chine valent les républiques sécessionnistes de Donetsk et Louhansk, dans l’est de l’Ukraine. Mais il est vrai que la ligne est moins claire qu’avant.

En appelant son homologue russe, Sergueï Lavrov, la semaine dernière, Wang Yi rappelle que la Chine respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale des pays. Mais lorsqu’il est au téléphone avec Berlin, avec la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock, il ne parle que des préoccupations de sécurité de la Russie, de la dangerosité des sanctions et de la responsabilité de l’Otan et des États-Unis. La Chine est donc dans une position attentiste et embarrassée.

La diplomatie chinoise marche sur un fil avec le risque, en ne condamnant pas l’invasion russe, de mettre en danger ses ressortissants en Ukraine. L’ambassade de Chine à Kiev a demandé à ses ressortissants de faire profil bas, de ranger les drapeaux chinois pour ne pas compliquer leur évacuation du pays.

Des sanctions économiques qui inquiètent Pékin
On ne sait pas si les Chinois connaissaient les plans de Poutine, mais il est sûr que les sanctions qui pourraient paralyser l’économie russe sont suivies de près par Pékin. Si la Chine soutient économiquement la Russie pour adoucir les sanctions, des banques chinoises pourraient en faire les frais. La guerre en Ukraine peut avoir un impact sur les exportations chinoises en Russie et sur les intérêts chinois en Ukraine, considérée comme un carrefour stratégique des « Nouvelles routes de la soie ».

Pour l’instant, la guerre russe en Ukraine est une débâcle pour la diplomatie chinoise. Poutine, c’est « make NATO great again ». L’Otan, considérée comme à l’état de mort cérébrale – selon l’expression d’Emmanuel Macron – il y a encore quelques semaines, est revenue en force. L’Europe se remilitarise, laissant aux États-Unis la capacité de se redéployer sur l’Asie. En même temps, les liens personnels entre Vladimir Poutine et Xi Jinping font qu’il est difficile de condamner ouvertement un ami venu soutenir la Chine aux Jeux olympiques.

La société civile discrète
L’internet chinois est plus surveillé qu’en Russie. La société civile est davantage muselée. Et quand des professeurs d’universités chinoises ont tenté de s’exprimer contre la guerre – ce que les médias d’État chinois qualifient d’« opération militaire spéciale » –, ils ont été immédiatement censurés. Les censeurs, comme souvent à Pékin, ont préféré ouvrir les vannes aux nationalistes, piliers du régime.

Les médias d’État reprennent encore, ce 28 février, la propagande russe qualifiant de « nazi » le gouvernement ukrainien. L’internet chinois a été envahi par une déferlante de commentaires pro-Poutine avec des blagues graveleuses parfois concernant les Ukrainiennes. La censure a dû bloquer ces comptes pour ne pas compliquer l’évacuation des Chinois d’Ukraine.

La Chine observe
Pékin pousse déjà Moscou et Kiev à négocier. Un traité de neutralité entre les deux parties arrangerait certainement la Chine. En attendant, les dirigeants chinois observent et cherchent la parade à de telles sanctions européennes si, par exemple, l’armée chinoise envahissait Taïwan. Comment sortir du système Swift pour les transactions internationales, comment préserver son autonomie énergique ? Pékin et Moscou viennent de signer un contrat pétrolier et gazier sur trente ans. Comment éviter le gel des avoirs de la Banque centrale ou encore comment éviter que l’énorme épargne chinoise investie en Occident ne soit confisquée ?

RFI

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