Un quart de point ou un demi-point ? Le débat est vif au sein de la Réserve fédérale américaine au sein de laquelle certains pointent l’urgence de relever plus franchement les taux directeurs et ainsi éviter de plonger la première économie mondiale en récession. Outre-Atlantique, la Fed n’a pas eu recours à une telle hausse depuis 2000.
Wall Street a certes montré un signe d’apaisement hier soir à la clôture, porté par un premier signe de détente des taux obligataires qui a porté les valeurs technologiques (Dow Jones +1,01% et le Nasdaq +2,03%). Mais un indicateur continue de faire monter l’inquiétude aux Etats-Unis : l’inflation a atteint en mars son plus haut niveau depuis décembre 1981, à 8,5% sur un an. En cause, la flambée des prix de l’énergie et les politiques monétaires de soutien massif pendant la période Covid.
Aussi, pour éviter un risque de surchauffe de l’économie et le scénario de la stagflation (inflation élevée et croissance atone), et même de récession, la banque centrale américaine (Réserve fédérale Fed) a déjà pris – avant la plupart de ses homologues européennes – se montre résolue à poursuivre promptement le resserrement de sa politique. Depuis mars, ses taux directeurs – au plus bas pour stimuler la croissance, entre 0 et 0,25% -ont commencé à remonter (entre 0,25 et 0,50%).
Mais une interrogation demeure : l’inflation a-t-elle atteint un pic pour refluer ensuite comme le prédisent certains économistes ?
C’est ce que pense en tout cas Christopher Waller, un responsable de la banque centrale américaine (Réserve fédérale, Fed) qui mise sur le reflux. « Je pense que nous pourrions être au sommet » de l’inflation, a déclaré Christopher Waller, l’un des gouverneurs de la Fed, sur la chaîne CNBC, anticipant « un ralentissement dans les prochains mois ».
Un record depuis 20 ans
L’urgence est déjà là : l’indice CPI de l’inflation est celui sur lequel sont notamment indexées les retraites. La Fed privilégie cependant un autre indicateur, l’indice PCE, qui s’est élevé à 6,4% sur un an en février, selon les données les plus récentes disponibles.
Aussi, les investisseurs savent que les effets de la hausse des taux ne seront pas immédiats, pénalisant consommateurs et entreprises dans l’attente du reflux de l’inflation.
Dès lors, il s’agirait pour la Fed d’accélérer le pas. Christopher Waller privilégie ainsi une hausse d’un demi-point de pourcentage lors de la prochaine réunion, les 3 et 4 mai. « Et peut-être encore en juin et en juillet », a-t-il ajouté.
La Fed n’a pas eu recours à une telle hausse depuis 2000.
Concrètement, ce responsable juge pertinent d’approcher « dès que possible » le niveau de taux considéré comme neutre, soit 2,00 ou 2,50%, et « le dépasser (…) sans doute d’ici la seconde moitié de cette année ».
« Nous ferons ce qu’il faut pour faire reculer l’inflation », a-t-il martelé, appelant à profiter de la solidité actuelle de l’économie américaine: « C’est le bon moment pour faire ce genre d’actions agressives parce que l’économie peut encaisser. »
« Exercer une pression à la baisse »
Un autre membre votant du comité monétaire, James Bullard, président de la Fed de St Louis, a affirmé mercredi, dans un entretien au Financial Times, que c’était « une fantaisie » de penser que l’institution américaine pouvait réduire suffisamment l’inflation sans augmenter les taux à un niveau qui bride l’économie.
Ce « faucon », favorable à une politique peu accommodante, estime que la Fed devrait être plus agressive dans ses tours de vis, et qu’atteindre le taux dit neutre « ne suffira pas ».
« La neutralité n’exerce pas de pression à la baisse sur l’inflation. Elle cesse simplement d’exercer une pression à la hausse », a-t-il déclaré. Or, « nous devons exercer une pression à la baisse sur la composante de l’inflation que nous pensons être persistante », a-t-il ajouté.
James Bullard avait, lors de la réunion de mars, été le seul à voter contre une hausse d’un quart de point, estimant que relever les taux d’un demi-point directement aurait été plus approprié.
La hausse des taux va nécessairement avoir un impact sur l’accès au crédit des entreprises et des particuliers. Sur le marché obligataire, les taux continuaient, eux, de souffler par rapport au plus haut de la veille, tout en restant à des niveaux élevés. Le rendement de l’emprunt à 10 ans américain passait de nouveau sous les 2,70%.
AFP