Le plus vieux problème de maths de l’histoire a trouvé un début de réponse

Ce problème de mathématique remonte à l’Égypte ancienne. Bien que l’énoncé soit assez simple, sa résolution est toujours sujette à débat.

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Depuis toujours, les mathématiques ont fait rêver les Hommes. Dès l’Antiquité les Égyptiens notamment ont manié les nombres pour parfaire leur monde. Mais bien que rempli de grands savants, le monde égyptien pouvait rester sans réponse face à certains problèmes. Ce fut notamment le cas avec le problème décrit comme «le plus ancien qui soit » par le mathématicien Carl Pomerance, qui travaille notamment au prestigieux Dartmouth College, membre de l’Ivy League américaine. 

À l’intitulé très simple, ce problème connu donc depuis l’Égypte ancienne n’a toujours pas trouvé de réponse. Mais nous sommes sûrement plus près de la solution que nous ne l’avions jamais été. En effet, un mathématicien de l’université d’Oxford, du nom de Thomas Bloom, vient d’apporter une partie de la réponse. 

Une histoire de fractions 

Afin de comprendre toute la prouesse des travaux de Bloom, il faut d’abord comprendre ce problème. Il concerne les fractions unitaires avec dénominateur, comme 1/2 ou 1/4. Ces fractions étaient pratiquement les seules utilisées en Égypte à l’époque à part 2/3 et probablement 3/4. Toutes les autres fractions étaient décomposées en sommes des fractions unitaires comme, par exemple, 2/7 = 1/4 + 1/28.

Ces fractions bien particulières regagnent un intérêt certain dans les années 1970 lorsque deux mathématiciens (Paul Erdős et Ronald Graham) conjecturent que « tout ensemble qui échantillonne une proportion positive suffisamment grande des nombres entiers doit contenir un sous-ensemble des nombres entiers dont les inverses sadditionnent pour donner la somme 1. » À titre d’exemple on peut citer le sous-ensemble {2,3,6} de l’ensemble {1,2,8,3,6} puisque 1/2 + 1/3 + 1/6 = 1. 

Une énigme bien connue dans le monde des mathématiques, qui a longtemps été un vrai casse-tête pour les plus éminents chercheurs, comme Andrew Granville, de l’Université de Montréal qui assure «quaucune personne saine desprit ne pourra jamais y répondre». 

Et malgré les mises en garde du chercheur britannique, son confrère Thomas Bloom s’est lancé dans ce calcul millénaire. Il a commencé par reprendre les travaux de Ernie Croot, qui lui a longtemps étudié la question à la fin des années 1990, puis au début des années 2000. Ce chercheur disait avoir résolu la version « coloriée » de ce problème. 

seaux-modèle de pensée
Une expérience de pensée place les nombres dans des seaux, comme pour faire un tri aléatoire
Les seaux de couleurs, une première réponse

Ernie Croot range les nombres entiers dans les seaux de différentes couleurs d’une façon aléatoire. Erdős et Graham ont prédit que dans ce cas peu importe le nombre des seaux utilisé, il en aura au moins un qui va contenir le sous-ensemble recherché. Croot a employé des méthodes modernes issues de l’analyse harmonique pour démontrer cette conjecture. 

L’article de Croot étant déjà impressionnant, il ne donnait toujours pas la réponse complète à la question posée par Erdős et Graham. Il n’indiquait toujours pas le seau dans lequel le sous-ensemble recherché se trouvait. 

Bloom a suivi la méthode utilisée par Croot qui emploie un type d’intégrale appelé la somme exponentielle. Il fallait estimer avec le signe de cette somme l’existance d’au moins une solution du problème. Bloom a adopté la stratégie de Croot mais a affronté le problème que Croot a voulu éviter : les nombres entiers qui ont des grands facteurs premiers et qui ne donnent pas les fractions qui se réduisent. 

Bloom entreprit donc un nombre impressionnant de calculs, et bien que dans certaines situations la somme exponentielle semblait être négative (il est quasiment impossible de trouver le résultat exact de ce genre de calcul), d’autres choix de nombres permettaient de rééquilibrer la balance. 

Une addition immense, pour percer un secret millénaire 

Il décida finalement de procéder presque par essai-erreur. À mesure qu’il ajoutait des inverses de nombres entiers entre eux, il gardait certains résultats de côté (comme 1/3 par exemple). Une fois qu’il avait obtenu trois fois 1/3, il obtenait 1, comme le demande l’énigme. 

Bien que ces recherches n’aient pas mis fin à l’énigme, la nouvelle méthode employée par Bloom n’a pas manqué de faire réagir au sein de la communauté scientifique. Pour Izabella Laba, chercheuse au sein de l’Université canadienne de Colombie-Britannique «cest un résultat exceptionnel». 

Mais les découvertes de Bloom n’ont finalement pas totalement clôturé l’énigme. Au contraire cette dernière est aujourd’hui plus ouverte que jamais. La grande question revient finalement à trouver les exceptions qui existent au sein de la règle de Bloom. Des failles où les inverses des nombres entiers ne donnent pas 1. 

En conclusion, la conjecture d’Erdős-Graham nous réserve encore bien des secrets, et il sera très intéressant de voir dans quels domaines du monde réel ces recherches auront un impact. 

                 Les travaux de Bloom pourraient grandement aider l’informatique de demain 

Une application concrète à espérer ? 

L’étude de ce genre de pan des mathématiques permet notamment de développer les connaissances des scientifiques dans des matières très concrètes comme l’informatique ou le codage. Malgré tout, il faudra sûrement attendre des années, voire des décennies pour que des applications concrètes soient trouvées en prenant en compte ce problème, et les réponses apportées par Thomas Bloom dans ses recherches. 

D’ici là, d’autres mathématiciens auront sûrement déterré d’autres grands problèmes, vieux de plusieurs siècles, histoire de se creuser les méninges une nouvelle fois, et, au passage, de faire avancer la science et la connaissance du monde. 

 quanta magazine

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