Les Philippins se sont rendus aux urnes lundi pour élire leur prochain président ainsi que leurs parlementaires. Dix candidats sont en lice pour succéder au chef de l’État actuel Rodrigo Duterte. Ferdinand Marcos Junior, fils du défunt dictateur Ferdinand Marcos, part grand favori. Au moins quatre personnes ont péri dans deux attaques de bureaux de vote
Les Philippins ont voté, lundi 9 mai, pour désigner leur prochain président, un scrutin à fort enjeu pour lequel Ferdinand Marcos Junior, fils du défunt dictateur Ferdinand Marcos, est promis par les sondages à une victoire écrasante.
Environ 67 millions de Philippins étaient appelés aux urnes entre 6 h et 19 h (22 h et 11 h GMT) pour ces élections générales, au cours desquelles sont également désignés le vice-président ainsi que les députés, la moitié des sénateurs, les 81 gouverneurs de province et d’autres élus locaux. Les analystes prédisent une forte participation.
Violences dans des bureaux de vote
Trois agents de sécurité ont été tués lundi peu après le début du scrutin dans la municipalité de Buluan, sur l’île de Mindanao – où sévissent de multiples groupes armés, des insurgés communistes aux militants islamistes – quand des hommes armés ont ouvert le feu dans un bureau de vote, selon la police. Un quatrième garde a été blessé dans l’attaque, a déclaré le porte-parole de la police provinciale de Maguindanao, Roldan Kuntong.
Des hommes armés ont également attaqué un bureau de vote dans la province de Lanao del Sur à Mindanao, tuant un électeur et faisant deux blessés, selon la police.
Dimanche soir, une explosion devant un bureau de vote avait fait neuf blessés dans la municipalité de Datu Unsay, aussi sur Mindanao. Les élections sont une période traditionnellement instable aux Philippines, dont la législation sur les armes à feu est laxiste et où la culture politique violente.
Dix candidats sont en lice pour succéder au président Rodrigo Duterte, dans un scrutin à un tour où la majorité relative suffit pour être élu. Et Ferdinand Marcos Jr, largement en tête dans les sondages, semble en passe d’accomplir le retour au pouvoir de la dynastie déchue près de 40 ans après son exil.
Inquiétude
Après six ans de gouvernement autoritaire de Duterte, les militants des droits de l’Homme, les dirigeants de l’Église catholique et les analystes politiques craignent de voir Marcos Jr enhardi par une large victoire et diriger le pays avec une poigne encore plus lourde.
Une vaste campagne de désinformation pour réhabiliter le régime dictatorial, le système clientéliste et le désenchantement des électeurs à l’égard des récents gouvernements ont alimenté le retour en grâce des Marcos.
Les sondages prédisent une victoire du candidat de 64 ans, surnommé « BongBong », avec largement plus que la moitié des suffrages. Pour gagner ce scrutin à un seul tour, il lui suffirait d’être celui qui obtient le plus de voix.
Les partisans de sa principale rivale, l’actuelle vice-présidente Leni Robredo, espèrent une surprise de dernière minute. Certains analystes estiment que son score pourrait bénéficier d’une éventuelle désaffection des urnes de la part des partisans de Marcos Jr, trop confiants dans la victoire de leur candidat.
Corruption et dynasties familiales
Depuis que Leni Robredo a annoncé sa candidature à la fonction suprême en octobre, des groupes de bénévoles se sont multipliés dans le vaste archipel pour convaincre les électeurs.
L’avocate et économiste de 57 ans avait battu de justesse Marcos Jr dans la course à la vice-présidence en 2016 (aux Philippines, le président et le vice-président sont élus séparément). Elle a promis de débarrasser la démocratie philippine de la corruption, dans un archipel où une poignée de familles ont la mainmise sur le pays.
Marcos Jr et son alliée candidate à la vice-présidence Sara Duterte, fille du président sortant, se disent les mieux qualifiés pour « unifier » le pays.
Si les pronostics des sondages se confirment, Marcos Jr deviendrait le premier candidat à la présidence à être élu avec une majorité absolue depuis le renversement de son père.
Risque pour la démocratie
Selon l’analyste politique Richard Heydarian, une telle victoire pourrait lui permettre de faire réviser la Constitution pour asseoir son pouvoir et affaiblir la démocratie. « Duterte n’a jamais eu la discipline et les moyens d’aller au bout de son programme autoritaire », a-t-il déclaré. « Cette opportunité historique pourrait échoir aux Marcos. »
Parmi les autres candidats à la présidence figurent la légende de la boxe Manny Pacquiao et l’ancien éboueur devenu acteur Francisco Domagoso. Mais seuls Marcos Jr et Robredo sont considérés comme ayant une chance de gagner.
La personnalité, plutôt que la politique, influence généralement le choix du candidat, et l’achat de voix et l’intimidation sont également des problèmes récurrents dans les élections philippines.
Quel que soit le résultat du scrutin, les adversaires de Marcos Jr ont déjà promis de poursuivre les efforts visant à le faire disqualifier en raison d’une condamnation antérieure pour infraction fiscale, et à lui faire payer les milliards de dollars dus en droits de succession.
AFP