Des milliards pour le réarmement de l’armée allemande

Le gouvernement de coalition formé par les sociaux-démocrates, les Verts et les libéraux a trouvé un accord avec la CDU/CSU pour le réarmement de l’armée allemande. Berlin devrait ainsi atteindre l’objectif de l’Otan qui consiste à consacrer 2% de son PIB à la défense, soit actuellement environ 70 milliards d’euros par an.

En décidant d’investir 100 milliards d’euros au cours des cinq prochaines années, l’Allemagne tire le bilan de deux changements importants. Le premier est que l’invasion russe de l’Ukraine a ramené la guerre sur le sol européen. Berlin, comme les autres capitales européennes, n’a pu que constater que la paix n’était plus un fait acquis sur le continent.

Ainsi, pour Shahin Vallée – directeur du programme géoéconomie de la DGAP, la Société allemande de politique étrangère – l’état de l’équipement de la Bundeswehr était tellement faible que 100 milliards d’euros risquent d’être vite épuisés si on prend en compte l’aide militaire à l’Ukraine, ou encore l’achat prévu de 35 chasseurs américains F-35.

« 100 milliards, c’est à la fois beaucoup d’argent et en même temps, vu l’état d’équipement et d’impréparation de l’armée allemande, ce sont sans doute des montants qui vont être très vite absorbés, surtout si on prend en compte l’effort de guerre qui est aujourd’hui demandé et les dons d’équipements militaires que l’Allemagne fait à l’Ukraine. »

L’Allemagne doit compter sur son armée
Le second point important est que l’Allemagne a compris, depuis la présidence de Donald Trump, que la garantie de protection américaine est fragile, puisque les Etats-Unis sont eux-mêmes engagés dans un contexte de changement géopolitique profond.

Contrairement aux années passées, Washington semble moins porté à intervenir à l’étranger. Il est aussi envisageable qu’un futur président américain, élu après Joe Biden, ait de nouveau une attitude moins protectrice vis-à-vis de l’Europe.

Mais quelles sont les limites de cette nouvelle politique d’armement de l’Allemagne ? Pour l’heure, on ignore si le pays va maintenir ses dépenses militaires à 2% du PIB une fois que les 100 milliards auront été dépensés.

Est-ce que Berlin va revenir à des dépenses militaires gelées et donc à budget de l’armée relativement faible?

« Je pense que ça, c’est une limite et une question très importante, explique Shahin Vallée. Et la deuxième est de savoir si les efforts d’investissement que l’Allemagne va faire en matière de défense vont se faire dans le cadre et dans l’objectif de créer les instruments d’une défense européenne, ou vont se faire dans le cadre et dans l’objectif de renforcer l’Otan et les capacités militaires autonomes de l’Allemagne dans l’Alliance atlantique ».

Le directeur du programme géoéconomie de la DGAP estime d’ailleurs que « le discours du chancelier Olaf Scholz, quand il a annoncé le plan de 100 milliards, était assez ambigu puisqu’il parlait à la fois de construire la défense européenne et en même temps de renforcer les capacités opérationnelles de l’Allemagne dans l’Otan. »

Mais l’on peut constater dit-il enfin que le « fait d’acheter des chasseurs américains F-35, au détriment du projet européen d’avion de chasse, répond plutôt à ce second objectif. »

dw

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