Un marché du travail “anti-femmes” au Royaume Uni

Le chômage féminin est parvenu à un niveau inégalé depuis 26 ans outre-Manche. La politique d’austérité fait des ravages dans les services publics, un secteur très féminisé.

L’ultra libérale et antiféministe cheffe du gouvernement britannique feu Margaret Thatcher serait sans doute contente. La Fawcett Society, une organisation britannique qui lutte pour l’égalité des femmes, vient de publier un rapport qui confirme ce que peu d’économistes dénoncent : les politiques d’austérité pénalisent les femmes plus que les hommes, à l’exception semble-t-il de la Grèce où elles résistent mieux à la crise . C’est particulièrement vrai sur le marché de l’emploi. Alors que le taux de chômage général atteint 7,9% outre-Manche, les coupes budgétaires dans les services publics, secteur très féminisé partout dans le monde et également au Royaume Uni, où les femmes représentent les deux tiers des salariés, devraient engendrer la destruction de près d’un million de postes.

Si les trois quarts des pertes d’emplois dans la fonction publique sont encore à venir, le résultat de la politique en cours est déjà accablant : le chômage des femmes est à son plus haut niveau depuis 26 ans, avec plus d’un million d’Anglaises sans emploi (1,1 million en février 2013, dernières statistiques publiées).

Et il risque de grimper encore si rien n’est fait pour infléchir ce que la Fawcett Society appelle un “marché de l’emploi anti-femmes”. L’organisation remarque en outre qu’au delà des destructions de postes dans le secteur public, les politiques britanniques – en faveur de l’emploi, cette fois-ci – dans le privé, tendent à privilégier les hommes, puisqu’elles opèrent principalement dans des bastions masculins, comme la technologie ou la construction. Selon les premières études, 60% des nouveaux postes créés dans ces secteurs grâce aux aides gouvernementales sont allés aux hommes, dont le taux de chômage est effectivement en légère baisse.

« Un million et demi d’Anglaises au chômage en 2018 »

“Si la tendance actuelle se maintient, avec les femmes constituant la majorité des salariés victimes de destructions de postes dans le secteur public mais la minorité de ceux qui bénéficient de nouvelles opportunités dans le privé, notre scénario catastrophe est de près d’un million et demi de femmes au chômage en 2018”, écrit la Fawcett Society.

Pour l’heure, tandis que les programmes gouvernementaux visant à lutter contre les discriminations envers les femmes sur le marché de l’emploi ont été abandonnés, l’austérité pratiquée par le gouvernement britannique a déjà précipité trois fois plus de femmes que d’hommes dans le chômage de longue durée. A terme, son maintien aurait des effets autrement plus désastreux pour les femmes : un taux de chômage durablement élevé induirait pour elles une stagnation des salaires, voire un recul, élargissant un peu plus le fossé salarial hommes/femmes. Pis, une telle situation alourdirait le handicap féminin en matière de pensions et hypothèquerait l’indépendance financière des Anglaises.

Faisant remarquer que les femmes représentent les deux tiers des smicards, principalement dans le secteur privé, la Fawcett Society demande au gouvernement britannique d’augmenter d’urgence le salaire minimum. De même, dans un pays où les trois quarts des emplois à temps partiels sont occupés par des femmes, l’organisation qui promeut l’égalité souhaite que le gouvernement lutte contre ce phénomène, au profit d’emplois de meilleure qualité, et qu’il ne limite pas ses aides aux secteurs “masculins” du privé. La Fawcett Society sera-t-elle entendue ? Il faut l’espérer. Car c’est aussi de l’emploi des femmes dont dépend le rétablissement de l’économie britannique – pour lequel « oeuvre » le gouvernement actuellement…

tv5

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