Le Haut Conseil pour le climat juge « insuffisante » l’action climatique de la France

L’action de la France pour réduire ses gaz à effet de serre et tenir ses engagements climatiques est « insuffisante », estime le Haut Conseil pour le climat dans son rapport annuel publié mercredi. Il alerte sur les « risques majeurs » que le pays n’atteigne pas ses objectifs pour 2030.

Un « sursaut de l’action climatique en France » est réclamé. Malgré une tendance à la baisse des émissions, les efforts de la France sont toujours « insuffisants » pour atteindre les objectifs pour 2030, juge mercredi 29 juin le Haut Conseil pour le climat (HCC).

Dans son rapport, l’autorité indépendante souligne chaque année la réponse « insuffisante » de l’État face au réchauffement climatique. Ce dernier fait sentir ses impacts grandissants en France avec une multiplication des canicules, sécheresses ou pluies extrêmes.

« Bravo pour ce qui a été fait jusqu’à maintenant. Maintenant, il faut vraiment changer de niveau, il faut un sursaut dans l’action climatique », résume pour l’AFP sa présidente, la climatologue Corinne Le Quéré.

Un sursaut nécessaire parce que « des risques majeurs de ne pas atteindre les objectifs fixés par la France pour la réduction des gaz à effet de serre persistent », souligne le texte. Et « d’autant plus important » dans le contexte de guerre en Ukraine qu’il « permettrait de réduire la forte dépendance de la France aux importations d’énergies fossiles et d’engrais minéraux ».

Des mesures positives, mais une réduction des émissions « modeste »
La France s’est engagée à réduire ses émissions de 40 % d’ici à 2030 par rapport à 1990. Dans cette optique, la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) fixe des plafonds d’émissions mais le premier « budget carbone » 2015-2018 a été dépassé. Et le gouvernement a remonté les plafonds pour 2019-2023, reportant de fait l’effort à accomplir.

Dans ce contexte, sur la période 2019-2021, malgré un « rebond partiel » en 2021 avec la reprise post-Covid, une baisse de 1,7 % permet de rester sous le budget carbone prévu, mais « principalement » en raison de la pandémie et du relèvement des plafonds, fait remarquer le HCC.

Le rapport note toutefois des mesures positives, notamment de nouvelles règles de performance énergétique des bâtiments neufs ou le développement d’énergies décarbonées dans l’agriculture. Et pour la première fois en 2021, les émissions de tous les grands secteurs sont en baisse (par rapport à 2019, hors rebond Covid), même si pour l’agriculture et les transports cette diminution récente « reste à confirmer ».

Sur la dernière décennie 2010-2019, les émissions ont diminué de 1,9 % par an en moyenne, conduisant à une baisse de 23,1 % en 2021 par rapport à 1990. Une trajectoire de réduction « modeste », et inférieure à la moyenne européenne, note le HCC. Et encore loin de l’objectif de 2030 qui va être renforcé par le nouveau plan climat de l’UE prévoyant une baisse des émissions européennes d’au moins 55 %. Le nouvel objectif de la France devrait ainsi être de -50 % d’ici 2030, selon le HCC et le gouvernement.

« Il faudrait que la baisse d’émissions soit plus que doublée sur la période qui nous reste jusqu’à 2030 pour atteindre 4,7 % de réduction d’émissions par année », insiste Corinne Le Quéré. Soit une diminution de 16 millions de tonnes équivalent CO2 par an en moyenne contre 8 millions par an sur la dernière décennie. La SNBC, qui va être révisée, ne prévoit qu’une baisse de 12 Mt éqCO2 par an (-3,2 % par an en moyenne).

Des pistes pour s’améliorer
Au-delà des critiques, le Haut Conseil se félicite que la Première ministre soit désormais directement chargée de la planification écologique et recommande notamment, pour rendre cette planification « opérationnelle », une programmation pluriannuelle des financements climat.

Pour apporter une « visibilité nécessaire aux entreprises, aux ménages, aux acteurs publics qui vont mettre en œuvre la transition », souligne Benoît Leguet, membre du HCC.

Le rapport plaide également pour une « forte restructuration » de la filière forêt-bois, s’inquiétant d’une dégradation importante des forêts françaises, puits de carbone essentiels pour espérer atteindre la neutralité carbone en 2050. Leurs capacités de stockage ont chuté entre 2013 et 2019, avant une reprise en 2020, absorbant sur la période 60 % de moins qu’anticipé par la SNBC.

AFP

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