Maillot jaune, victoires d’étape : neuf coureurs à surveiller lors du Tour de France 2022

Alors que le peloton s’élance de Copenhague vendredi pour l’édition 2022 du Tour de France, France 24 fait le point sur les coureurs à surveiller. Prétendants au maillot jaune et au maillot vert, chasseurs d’étape : il y en a pour tous les goûts.

Immuable rite estival, le Tour de France est de retour vendredi 1er juillet. Cette année, les 176 coureurs en lice auront 3 449,8 kilomètres à parcourir depuis Copenhague pour rallier Paris lors de la dernière étape, le 24 juillet.

Pendant trois semaines, ils rivaliseront sur les routes et dans les cols de l’Hexagone pour s’emparer des différents maillots distinctifs ou simplement remporter une étape. France 24 vous propose une sélection de neuf coureurs qui devraient animer la course.

Tadej Pogacar (UAE Team Emirates)

Le Slovène Tadej Pogacar célèbre sa victoire alors qu'il passe la ligne d'arrivée de la course italienne des Strade Bianche, le 5 mars 2022.

Jamais deux sans trois pour Pogacar ? Après avoir remporté les deux dernières éditions du Tour de France, le Slovène de 23 ans a bien l’intention de tripler la mise pour continuer à garnir son palmarès déjà bien rempli. En effet, depuis sa dernière victoire sur la Grande Boucle, le protégé de l’équipe UAE Team Emirates n’a pas chômé : il a glissé dans son sac à dos le Tour de Lombardie, son deuxième monument, et les prestigieuses Strade Bianche. Il a parcouru également le Tour des Flandres pour la première fois, terminant à la quatrième place. Un palmarès qui lui vaut déjà le surnom de « nouveau Cannibale ».

« Notre ambition est de remporter la course », a annoncé le manager Joxean Fernandez Matxin. « Chaque année, le défi de gagner le Tour devient plus difficile, tout ce que nous pouvons faire est de nous préparer du mieux que nous pouvons. »

Tadej Pogacar le sait : il sera l’homme à abattre cette année. Pour l’épauler, il pourra compter sur quatre de ses coéquipiers déjà présents l’année passée : le grimpeur polonais Rafal Majka, le rouleur danois Mikkel Bjerg, l’Américain Brandon McNulty et le Norvégien Vegard Stake Laengen.

Primoz Roglic (Jumbo-Visma)

Juste avant le Tour de France 2022, Primoz Roglic a remporté le Critérium du Dauphiné.

Le Tour de France, Primoz Roglic doit y penser chaque matin en se rasant. Il faut dire que le Slovène de 32 ans a vu plus d’une fois la victoire lui échapper alors qu’elle lui semblait promise : en 2020, il doit abandonner le maillot jaune dans le dernier contre-la-montre à la Planche des Belles Filles à son compatriote Pogacar. En 2021, malgré la lourde armada déployée par l’équipe Jumbo – Visma pour l’épauler, il est victime d’une des énormes chutes de la première semaine et contraint à l’abandon. Une « malédiction française » qui s’est longtemps étendue aux autres courses par étape de l’Hexagone. Le Paris-Nice et le Critérium du Dauphiné ont souvent été le théâtre de rebondissements insensés l’ayant privé de victoire.

Cependant, en 2022, Primoz Roglic semble avoir conjuré le mauvais sort. En mars, il a remporté pour la première fois Paris-Nice puis, en juin, s’est adjugé également pour la première fois le Critérium du Dauphiné. Deux victoires qui lui permettent d’aborder le Tour en pleine confiance, notamment grâce à une statistique imparable : les quatre précédents coureurs ayant gagné ces deux épreuves dans la même saison (Louison Bobet en 1955, Jacques Anquetil en 1963 et 1965, Eddy Merckx en 1971 et Bradley Wiggins en 2012) ont remporté dans la foulée la Grande Boucle quand ils y ont participé.

Qu’est-ce qui pourrait arrêter Primoz Roglic cette année ? Peut-être le risque d’éparpillement de la Jumbo-Visma. Pour la première fois, l’équipe néerlandaise a annoncé venir sur le Tour avec plusieurs objectifs, dont celui de faire gagner le maillot vert à Wout van Aert, coéquipier de luxe de Roglic ces dernières années.

Wout van Aert (Jumbo-Visma)

Le Belge Wout van Aert avait dominé le contre-la-montre de la 20e étape du Tour de France en 2021.

Sur le Tour 2021, Wout van Aert a fait l’étalage de sa polyvalence en signant un improbable triplé d’étapes : en contre-la-montre, sur la double ascension du mont Ventoux et dans un sprint massif sur les Champs-Élysées. Des performances tout terrain qui incitent forcément à en faire un sérieux prétendant au maillot vert, récompensant le classement par points.

Jusqu’ici, son équipe ne l’a cependant pas laissé traquer la précieuse tunique. Il était présent sur la Grande Boucle avant tout pour épauler Primoz Roglic. Mais pas cette année : « Wout (van Aert) mérite également un soutien suffisant dans sa chasse aux victoires d’étape et au maillot vert. Cette équipe est en forme et elle est capable de répondre au mieux à nos ambitions », a estimé le responsable sportif de l’équipe, Merijn Zeeman, qui lui a adjoint les services de Christophe Laporte et Tiesj Benoot pour l’épauler.

Si Wout van Aert a remporté le maillot vert sur le Critérium du Dauphiné en même temps que deux étapes, le gain de celui-ci sur le Tour pourrait faire oublier la frustration de sa saison : 8e de Milan-San Remo, 2e de Paris-Roubaix, 3e de Liège-Bastogne-Liège… Malgré des victoires sur le Circuit Het Nieuwsblad et la E3 Saxo Bank Classic, Wout van Aert n’a pas accroché de succès de prestige en première partie de saison. Si la plupart des coureurs se satisferaient déjà de ces résultats, le Belge aspire à davantage.

Jonas Vingegaard (Jumbo-Visma)

Jonas Vingegaard s'est imposé comme la révélation du Tour 2021. Va-t-il confirmer cette année alors que le Tour part de son pays natal ?

Parfois en cyclisme, le danger vient de sa propre équipe. Révélation du Tour de France 2021, le jeune Danois Jonas Vingegaard a porté haut et fort les couleurs de la Jumbo-Visma sur la Grande boucle l’an passé après la chute et l’abandon de son leader, Primoz Roglic. Il avait terminé le Tour à la deuxième place.

Cette année, il a impressionné sur le Critérium du Dauphiné. Bien que visiblement plus fort que son leader Primoz Roglic, le Danois s’est « contenté » de la deuxième place et d’une victoire d’étape. À l’issue de la course, il s’est laissé aller à une confidence pleine de sincérité quant à ses capacités : « Je pense avoir une bonne chance de gagner le Tour de France », a-t-il déclaré alors que la course s’élance cette année depuis son pays d’origine. Pour le moment, il joue les équipiers modèles, mais pour combien de temps ?

David Gaudu (Groupama-FDJ)

David Gaudu est la relève du cyclisme français.

« Les objectifs de Marc Madiot (manager de l’équipe Groupama-FDJ, NDLR), c’est d’aller chercher un podium au classement général, et si je suis le leader de l’équipe, j’irai chercher ce que l’équipe a annoncé en début de saison. » David Gaudu a de l’aplomb. À 25 ans, le « Petit Prince de Bretagne » a bien l’intention d’être digne des grands espoirs placés en lui. Depuis ses jeunes années, les observateurs en font la relève du cyclisme français mais, alors que les Pogacar et autres Bernal ont déjà à leur actif un Grand Tour après une éclosion précoce, lui peine à s’imposer.

La saison n’a pas été rose pour lui. Une vilaine chute dans la 2e étape de Paris-Nice lui a fracturé une vertèbre. Une blessure qui a entaché sa préparation de la Grande Boucle. S’il a cru se rassurer au Critérium du Dauphiné en remportant la 3e étape au sommet du Puy de Sancy, il a ensuite complètement craqué dans la dernière, pour finir à la 17e place.

Il sera épaulé par un lieutenant de classe mondiale : Thibaut Pinot, l’ancien leader de l’équipe. Une inversion des rôles puisqu’en 2019, c’était le Breton qui se chargeait de mettre « Thib » sur orbite quand les pentes s’élevaient.

Thibaut Pinot (Groupama-FDJ)

Le Français Thibaut Pinot lors de la 18e étape du Tour de France, le 25 juillet 2019, entre Embrun et Valloire.

Être fan de Thibaut Pinot, c’est accepter de souffrir. Le Français est un champion capable de faire rêver ses fans en multipliant les hauts et les bas dans sa carrière. En 2014, on voyait en lui le successeur de Bernard Hinault, dernier Français vainqueur sur le Tour. Cette année-là, le Franc-Comtois avait terminé 3e du classement général et meilleur jeune. Las, il a depuis multiplié les abandons. La plus cruelle était en 2019 : alors que cette année-là, il semble en mesure de rêver du maillot jaune avec un tracé lui étant favorable dans les dernières étapes alpines, il est contraint à l’abandon sur blessure.

Le début d’une traversée du désert. L’année suivante, le Tour est pour lui un long chemin de croix après qu’il est pris dans la chute massive de la première étape. Se forçant à aller au bout des 21 étapes, il a depuis traîné sa blessure sur deux années de doutes. Cette saison, il voit enfin la lumière au bout du tunnel en renouant avec le succès : une victoire d’étape sur le Tour des Alpes puis une sur le Tour de Suisse.

Marc Madiot, le manager de l’équipe, assure que Pinot est prêt à faire rêver : « Il vaut mieux être attendu, ça suscite de l’intérêt. Il espère être à un niveau qui va lui permettre de bien s’exprimer. Il a de l’envie, de la détermination, de l’appétit. Nous ne sommes pas favoris mais de bons outsiders. »

Plutôt que de jouer le classement général, Thibaut Pinot devrait avant tout venir en chasseur d’étapes. Deux lui font particulièrement de l’œil : la Planche des Belles Filles, dans les Vosges – une montée dont le pied se situe à quelques kilomètres de son domicile – le 8 juillet prochain, et l’Alpe d’Huez le 14 juillet, un autre mythe du Tour de France où il s’est déjà imposé en 2015.

Mathieu van der Poel (Alpecin-Fenix)

Mathieu van der Poel lève le doigt au ciel sur la ligne d'arrivée de la 2e étape du Tour, en hommage à son grand père Raymond Poulidor.

En 2021, il avait ému la planète. Il n’avait, certes, disputé que huit étapes avant de rentrer à la maison pour se préparer pour les Jeux olympiques de Tokyo et l’épreuve de VTT, mais il avait laissé sa marque. Mathieu van der Poel avait remporté la deuxième étape et revêtu le maillot jaune, une tunique qui avait toujours échappé à son grand-père, la légende française Raymond Poulidor, mort en 2019. Les larmes avaient coulé. Il l’avait ensuite vaillamment défendu pendant six jours, notamment en se surpassant à Laval dans le contre-la-montre.

Cette année, Mathieu van der Poel a promis d’aller au bout du Tour après être déjà parvenu à boucler les trois semaines du Giro fin mai. Il a annoncé qu’il viserait des victoires d’étapes avant tout, ne voulant pas se mettre la pression de la régularité nécessaire pour tenter d’arracher le maillot vert. Dommage, tout le monde se délectait de voir sa rivalité avec Wout van Aert, déjà son adversaire dans les catégories jeunes en cyclo-cross, connaître un nouveau chapitre. 

Geraint Thomas (Ineos Grenadiers)

Geraint Thomas félicite son coéquipier Egan Bernal lors de sa victoire au Tour de France en 2019.

Avant l’ouragan Pogacar, une équipe dominait sans partage le Tour de France : Ineos Grenadiers (ex-Sky) dont les coureurs se sont adjugés sept des huit Grandes Boucles ayant eu lieu entre 2012 et 2019. Une domination sans partage à laquelle Geraint Thomas a participé d’un bout à l’autre. En 2018, il a même ramené le maillot jaune à Paris avant de terminer l’année suivante à la deuxième place, derrière son coéquipier Egan Bernal.

Alors pourquoi son nom n’est-il plus cité comme un favori évident du Tour ? Sans doute parce que le Gallois de 36 ans n’a plus brillé sur un Grand tour depuis ce dernier podium. Il a également multiplié les chutes entre maladresses et malchances. De quoi inquiéter avant une première semaine piégeuse, entre vents et pavés. 

Dans les plans initiaux d’Ineos, Geraint Thomas n’était certainement que l’équipier de luxe du Colombien Daniel Felipe Martinez et du Britannique Adam Yates. Cependant, sa victoire au récent Tour de Suisse a conduit l’équipe à revoir ses plans et à en faire un leader au même titre que les deux autres. De là à l’imaginer dans le rôle de l’outsider surprise au classement général, il n’y a qu’un pas.

Kasper Asgreen (Quick-Step Alpha Vinyl)

Kasper Asgreen sur le Tour des Flandres.

Avec un départ chez lui, au Danemark, Kasper Asgreen a un scénario rêvé pour ce Tour de France : un contre-la-montre inaugural réussi malgré une seconde place derrière le champion du monde de la discipline Filippo Ganna, une deuxième étape avec des vents sur les 18 km du pont du Grand Belt, qui morcèlent le peloton et lui permettent de prendre le maillot jaune. Et ensuite une défense de plusieurs jours sur des étapes correspondant parfaitement à son profil de coureur de classiques, avant de rendre la tunique à l’arrivée des montagnes le 7 juillet.

Un programme idéal qui risque cependant de s’écraser sur le mur de la réalité. À l’image de son équipe, le Danois a connu une première partie de saison compliquée. Une vilaine chute au Tour de Suisse, à une semaine de la Grande Boucle, a jeté un autre voile d’incertitude sur ses capacités actuelles. Cependant, le coureur est connu pour se sublimer, à l’image de ce Tour des Flandres 2021, remporté au sprint face à Van der Poel. Et si le maillot jaune n’est pas au rendez-vous, il pourra toujours se consoler avec les multiples étapes de baroudeur qui semblent taillées pour lui. 

Il ne faut pas les oublier :

Compatriote de Kasper Asgreen, Jakob Fuglsang (Astana Qazaqstan) vient sur ce Tour avec des grandes ambitions au général. Les Français Romain Bardet (DSM) et Guillaume Martin (Cofidis) également. Et le Colombien Nairo Quintana (Arkea Samsic) est toujours en chasse d’une victoire dans le seul Grand tour qu’il n’a pas remporté.

Dans les rangs des concurrents à Wout Van Aert pour le maillot vert, il faudra composer avec Peter Sagan. Le Slovaque, sept fois vainqueur de ce classement, va tenter de le faire douter malgré un début de saison compliquée dans sa nouvelle équipe Total Energies. Enfin, Fabio Jakobsen, devrait être de la partie dans la plupart des sprints massifs, bien emmené par son équipe de la Quick-Step Alpha Vinyl.

france24

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