La Banque centrale européenne a annoncé ce jeudi qu’elle relève ses taux d’intérêt de 0,5 point pour la première fois depuis plus de 10 ans pour combattre l’inflation. Mais celle-ci restera à « un niveau élevé indésirable » prévient Christine Lagarde, la présidente de la BCE.
La Banque centrale européenne (BCE) a mis fin jeudi à l’ère des taux d’intérêt négatifs en zone euro avec un relèvement de 0,50 point, plus qu’attendu, pour marquer sa détermination à combattre l’inflation galopante et mettre fin à une décennie d’argent facilement accessible en zone euro. Le principal taux d’intérêt passe ainsi de zéro, où il campait depuis 2016, à 0,50 %, tandis que celui taxant une partie des liquidités bancaires non distribuées en crédit, négatif depuis 2014, remonte de -0,50 % à zéro.
La présidente de la BCE Christine Lagarde a déclaré à l’issue de la réunion que « l’horizon économique s’assombrit » en zone euro en raison de la poursuite de la guerre en Ukraine et de l’inflation qui « restera à un niveau élevé indésirable pendant un certain temps ». Les conséquences du conflit armé, avec une inflation record et une grande incertitude dans l’économie, « assombrissent considérablement les perspectives pour la seconde moitié de 2022 et au-delà », a déclaré la Française après que la BCE a décidé de relever pour la première fois ses taux depuis 2011 pour tenter de juguler la hausse des prix.
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La BCE poursuivra lors de ses prochaines réunions sa « normalisation » de politique monétaire, marquée par le relèvement de ses taux d’intérêt, et estime que d’autres hausses « seront pertinentes » à l’avenir face à l’inflation galopante. L’ampleur de ces mouvements de politique monétaire sera dépendante « des données », précisent les gardiens de l’euro dans un communiqué après avoir mis fin plus rapidement qu’anticipé à l’ère des taux négatifs en zone euro.
Un nouvel instrument pour protéger les États les plus fragiles
La Banque centrale européenne a également présenté jeudi un nouvel instrument pour protéger les États les plus fragiles contre des attaques spéculatives sur leur dette, les marchés ayant en ligne de mire l’Italie où s’ouvre une période d’instabilité politique. Cet outil « pourra être activé pour contrer les dynamiques de marché injustifiées et désordonnées qui menacent gravement la transmission de la politique monétaire dans la zone euro » qui vise un taux d’inflation de 2 % à moyen terme, selon un communiqué à l’issue du Conseil des gouverneurs.
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Une des caractéristiques majeure de ce programme dénommé « TPI » (pour « instrument de protection de la transmission ») est que les achats de dette seront potentiellement illimités pour contrer les attaques spéculatives. L’ampleur des achats au titre du TPI dépendra « de la gravité des risques auxquels est confrontée la transmission des politiques » monétaires. En assurant une meilleure « transmission » de ses décisions auprès des entreprises et ménages, le « TPI » permettra à la BCE « de remplir plus efficacement son mandat en matière de stabilité des prix », ajoute l’institut.
Le contexte géopolitique complique la situation
En renchérissant le coût du crédit, pour la première fois depuis 2011, la BCE va emboîter le pas à d’autres banques centrales dans le monde. La Réserve fédérale américaine a augmenté ses taux d’intérêt depuis mars et sa fourchette pour le taux des fonds fédéraux, désormais entre 1,5 et 1,75 %, pourrait être relevée de 75 points de base fin juillet.
La BCE doit toutefois faire attention dans le même temps à ne pas aggraver la crise économique qui sévit dans une zone euro déjà fragilisée par la crise politique ouverte en Italie et la crise du gaz avec la Russie. Le gazoduc Nord Stream reliant la Russie à l’Allemagne a certes redémarré jeudi après dix jours de maintenance, mais à un débit diminué comparé à celui précédant les travaux et qui représentait lui-même 40 % des capacités depuis la mi-juin. Un arrêt complet des livraisons de gaz par Moscou plongerait la zone euro dans la récession et une hausse trop rapide des taux aggraverait la situation.
leparisien