A Bordeaux, neurobiologistes, chimistes et physiologistes se sont associés pour tenter de briser le verrou technologique que représente l’étude des mécanismes mémoriels à l’intérieur même du cerveau.
Mobilité des récepteurs du glutamate à la surface d’un neurone d’hippocampe de rat, mesurée par le suivi de molécules individuelles.
Depuis une vingtaine d’années, les neurobiologistes Daniel Choquet, directeur de recherche CNRS et Yann Humeau de l’Université de Bordeaux travaillent sur une nouvelle méthode pour visualiser cette mobilité des récepteurs synaptiques au sein du tissu nerveux afin de comprendre son importance pour certaines formes de mémoire. Le résultat de leur travail vient d’être publié dans la revue Science Advances et d’être décortiqué dans un article de La Recherche.
Plusieurs innovations ont été nécessaires pour rendre ces outils spécifiques. Et en premier lieu, les ciseaux génétiques CRISPR, grâce auxquels on modifie à loisir les séquences ADN. « L’idée de ce nouvel outil est de cibler les récepteurs en leur rajoutant une petite étiquette : une séquence de quelques acides aminés, explique Daniel Choquet. Grâce à la technologie CRISPR, les souris génétiquement modifiées possèdent ces étiquettes sur tous leurs récepteurs ». Ainsi, des neurones spécifiques peuvent être marqués.
Les résultats apportent une confirmation importante. « Cela a permis de confirmer mon hypothèse sur la mobilité des récepteurs établie il y a 20 ans in situ. Nous avons ainsi pu montrer que les récepteurs sont également mobiles dans les ‘tranches’ de cerveau« , poursuit le neurobiologiste. Par ailleurs, cette étude a aussi permis de voir l’impact de cette non-mobilité sur les différentes fonctions du cerveau.
Un lien avec la mémoire encore mystérieux
Les possibilités offertes par cette innovation sont nombreuses, notamment en vue de trouver des moyens de s’attaquer à certaines pathologies. « La plasticité synaptique est un mécanisme connu depuis longtemps, mais son lien avec la mémorisation est encore mystérieux, reconnaît Yann Humeau. Pourquoi y a-t-il de la plasticité dans certaines synapses, à un certain moment et à un certain endroit plutôt qu’ailleurs ? Quelle importance cela peut-il avoir dans le phénomène de mémorisation ? », s’interroge-t-il.
Les nouvelles découvertes qui pourraient découler de ces recherches sont susceptibles d’avoir des implications très importantes, notamment concernant la maladie d’Alzheimer.
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