Les États-Unis ont annoncé vendredi une nouvelle série de ventes d’armement à Taïwan, pour un montant d’1,1 milliard de dollars, alors même que les tensions sont au plus haut avec la Chine qui considère l’île comme une partie de son territoire. En réaction, Pékin a menacé Washington de « contre-mesures » si l’administration Biden ne renonce pas à la nouvelle vente d’armes.
Les États-Unis ont annoncé, vendredi 2 septembre, la vente pour 1,1 milliard de dollars d’armes à Taïwan, à laquelle la Chine, qui considère l’île comme une partie de son territoire, leur a immédiatement demandé de renoncer, menaçant de prendre des « contre-mesures ».
Cette nouvelle vente d’armes intervient un mois après une visite à Taïwan de la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi, qui avait provoqué la fureur de Pékin. La Chine avait alors lancé les plus importantes manœuvres militaires de son histoire autour de l’île.
Le gouvernement américain a approuvé la vente à Taipei pour 355 millions de dollars de 60 missiles Harpoon capables de couler des bateaux de guerre, 100 missiles de courte portée Sidewinder (85,6 millions), capables d’intercepter des missiles ou des drones, et d’un contrat de maintenance du système de radars de Taïwan évalué à 665 millions, a précisé le département d’État dans un communiqué.
Ces transactions « servent les intérêts économiques et de sécurité nationale des États-Unis en soutenant les efforts (de Taïwan) de moderniser ses forces armées », a souligné la diplomatie américaine via un porte-parole.
Il s’agit de la plus grosse vente d’armes américaines pour Taïwan depuis l’arrivée à la présidence de Joe Biden, en janvier 2021.
Cette annonce intervient un jour après que les forces taïwanaises ont abattu un drone commercial non identifié, dans le cadre d’une série soudaine d’incursions qui ont semé la confusion sur l’île après la précédente démonstration de force de Pékin, qui a déclaré avoir tiré des missiles balistiques au-dessus de la capitale Taipei.
Pékin a aussitôt exigé que Washington renonce à ces transactions, s’y déclarant « fermement opposée », par la voix du porte-parole de l’ambassade de Chine à Washington, Liu Pengyu.
La Chine appelle les États-Unis à « révoquer immédiatement » les ventes d’armes à Taïwan, « de crainte qu’elles n’affectent davantage les relations avec les États-Unis, ainsi que la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan », a ajouté le porte-parole dans un communiqué.
« La Chine prendra résolument des contre-mesures légitimes et nécessaires au vu de la situation », a-t-il conclu.
Depuis 2010, les États-Unis ont informé le Congrès de plus de 35 milliards de dollars de vente d’armes à Taïwan, a indiqué un porte-parole du département d’État, qui a approuvé ces transactions.
Pour se concrétiser, ces ventes doivent recevoir l’aval du Congrès, qui est quasiment acquis, le soutien militaire à Taïwan bénéficiant d’un large soutien parmi les élus des deux bords.
« Ambiguïté stratégique »
Ces ventes d’armes sont « essentielles pour la sécurité de Taïwan et nous continuerons à œuvrer avec l’industrie de défense pour soutenir cet objectif », a ajouté le porte-parole du département d’État.
« Nous appelons Pékin à mettre fin à ses pressions militaires, diplomatiques et économiques sur Taïwan et à engager plutôt un dialogue » avec Taipei, a aussi relevé le porte-parole. « Les États-Unis continuent de soutenir un règlement pacifique de la question, conformément aux vœux et dans l’intérêt du peuple taïwanais ».
Côté Taipei, « cette vente d’armes n’aidera pas seulement nos soldats à lutter contre la coercition dans la zone grise, elle renforcera également les capacités d’alerte précoce de l’île contre les missiles balistiques à longue portée », a déclaré Chang Tun-han, le porte-parole de la présidence taïwanaise, dans un communiqué de remerciements.
Avant la visite controversée à Taïwan de Nancy Pelosi, numéro trois des États-Unis et plus haute responsable américaine à se rendre sur l’île depuis des décennies, l’entourage de Joe Biden avait discrètement fait valoir à la Chine qu’elle ne représentait pas la politique de l’administration, le Congrès étant un pouvoir distinct du gouvernement.
Le feu vert à la vente d’armes, en revanche, provient clairement de l’administration Biden, même si elle est dans le droit-fil de la politique appliquée depuis 1979, lorsque Washington a reconnu Pékin tout en acceptant de maintenir la capacité d’autodéfense de Taïwan.
Lors d’un voyage à Tokyo en mai, Joe Biden a semblé rompre avec des décennies de politique américaine en déclarant que les États-Unis défendraient directement Taïwan en cas d’attaque, mais ses collaborateurs sont ensuite revenus sur ses propos pour maintenir le concept volontairement flou de l' »ambiguïté stratégique ».
La Chine estime que Taïwan, peuplée d’environ 23 millions d’habitants, est l’une de ses provinces, qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise (1949). En sept décennies, l’armée communiste n’a jamais pu conquérir l’île, laquelle est restée sous le contrôle de la République de Chine – le régime qui gouvernait jadis la Chine continentale et ne gouverne plus aujourd’hui que Taïwan.
AFP