La rédactrice en chef et trois journalistes du journal indépendant égyptien Mada Masr, au ton souvent critique pour le régime d’Abdel Fattah al-Sissi, ont été interrogées par la justice mercredi 7 septembre sous l’accusation notamment de «diffusion de fausses informations», a indiqué la publication sur Twitter.
Lina Attalah, directrice de Mada Masr, et les journalistes Rana Mamdouh, Sara Seif Eddin et Beesan Kassab, étaient convoquées suite à des plaintes déposées par des membres du parti Mostakbal Watan («Futur d’une nation», pro régime), à la suite d’un article les accusant d’«infractions financières graves» qui «devraient entraîner leur retrait de la scène politique».
Selon Mada Masr, les quatre journalistes, relâchées sous caution dans la soirée, sont accusées de «diffamation» et «harcèlement en ligne» ainsi que de «diffusion de fausses informations visant à déstabiliser le pays».
Si la Constitution de 2014 garantit la liberté de la presse en Égypte, le pays compte une vingtaine de reporters derrière les barreaux et est régulièrement montré du doigt pour son bilan des droits humains, avec plus de 60.000 détenus d’opinion, dont plusieurs incarcérés pour «diffusion de fausses informations», selon des ONG internationales. Le Caire figure en 168e position sur 180 dans le classement de la liberté de la presse de 2022 de l’ONG Reporters sans frontières (RSF).
«Un développement extrêmement inquiétant»
Mada Masr est un journal en ligne qui publie des enquêtes sur les questions de sécurité et la corruption, en arabe et en anglais.
La publication compte parmi les centaines de sites d’information bloqués par les autorités ces dernières années et dont l’accès n’est possible pour les Égyptiens que grâce à un VPN (réseau privé virtuel).
Fin 2019 la police avait effectué une perquisition dans les locaux du journal au Caire, interpellant trois journalistes du média, dont Lina Attalah, brièvement détenue à nouveau en mai 2020.
Pour RSF, les accusations portées contre les journalistes de Mada Masr constituent «un développement extrêmement inquiétant contre l’une des dernières publications qui ne tombent pas sous le contrôle ou l’influence du gouvernement» de Sissi.
«Le harcèlement, l’intimidation et les arrestations incessantes de journalistes en Égypte atteignent des sommets dangereux et doivent cesser» a déclaré l’ONG dans un communiqué mercredi.
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