Pour éviter un scénario catastrophique de type Syndrome de Kessler, la NASA va financer trois projets de recherche sur les débris orbitaux.
Depuis que l’espèce humaine s’est aventurée pour la première fois dans l’espace, elle a aussi commencé à y laisser traîner des tas de débris. Et à notre époque où la privatisation massive du secteur a lancé une nouvelle ruée vers cet El Dorado cosmique, le phénomène commence à prendre des proportions inquiétantes. La NASA prend cette situation très au sérieux; elle vient d’annoncer le financement de trois projets pour limiter les risques associés à ce dépotoir à ciel ouvert — c’est le cas de le dire.
En l’état, ils ne sont pas particulièrement problématiques. Le souci, c’est qu’ils sont progressivement réduits en charpie par les impacts répétés de petits objets, artificiels ou non. Ils se transforment donc en amas de débris qui sillonnent l’orbite à très grande vitesse.
Le syndrome de Kessler, une menace de plus en plus concrète
Comme le suggère l’intuition, tous ces objets sont excessivement dangereux pour les appareils placés en orbite, et pour cause ; à une vitesse avoisinant les 30 kilomètres par seconde, même un vulgaire petit écrou est susceptible de tout pulvériser sur son passage.
Cette situation fait déjà peser une pression considérable sur certaines installations. On pense notamment à l’ISS; la station a déjà dû procéder à des manœuvres d’évitement pour échapper à des impacts potentiellement catastrophiques.
Mais ce qui inquiète véritablement les spécialistes, c’est que cette situation pourrait rapidement prendre des proportions dramatiques. Au-delà d’un certain seuil d’accumulation de ces débris, la moindre collision pourrait déclencher une réaction en chaîne catastrophique. Elle laisserait derrière elle un immense nuage de microdébris ; l’orbite terrestre deviendrait alors complètement impraticable. Et les conséquence seraient terribles pour les communications, l’exploration spatiale, et ainsi de suite.
« Les débris orbitaux sont l’un des grands défis de notre ère », explique Bhavya Lal, une administratrice de la NASA. « Maintenir notre capacité à utiliser l’espace est critique pour notre économie, notre sécurité, la technologie et la science », martèle-t-elle.
Ce scénario, baptisé Syndrome de Kessler, commence malheureusement à devenir de plus en plus tangible. De nombreux observateurs et institutions prestigieuses militent donc pour la mise en place de contre-mesures afin d’éviter cette catastrophe annoncée. C’est par exemple le coeur de métier de Privateer, une entreprise co-fondée par Steve Wozniak; son projet Wayfarer suit à la trace des dizaines de milliers de débris potentiellement dangereux dans l’espoir d’éviter un accident.
La NASA “prend cette menace au sérieux“
La NASA a enfin pris le taureau par les cornes ; elle va financer les projets de trois universités américaines qui ont travaillé dur pour proposer des solutions viables. « Ces dotations vont financer des travaux de recherche qui supportent la volonté de l’agence de s’attaquer à ce problème », explique Lal.
Elle précise aussi que ces travaux permettront de mieux « comprendre la dynamique de l’environnement orbital. Ils vont aussi montrer comment nous pourrons mettre en place une politique qui permettra de limiter la prolifération des nouveaux débris et l’impact de ceux qui existent déjà », détaille l’administratrice.
L’agence ne précise pas explicitement sur quoi travaillent les équipes qui ont remporté ces dotations. Les intitulés des projets comportent toutefois quelques indices. Le premier semble avoir vocation à sensibiliser les décideurs politiques et les agences spatiales pour qu’ils mettent en place une législation claire sur ce sujet.
Le second est plus technique ; il s’agit apparemment d’un programme de modélisation à grande échelle. Il permettrait de simuler le comportement de ces débris pour mieux anticiper une éventuelle catastrophe. Le dernier est le plus explicite les trois ; il s’agit d’une campagne de sensibilisation auprès du grand public, même si son contenu n’est pas précisé.
Les travaux de ces trois équipes seront disponibles sur le site de la NASA une fois le programme terminé. Avec un peu de chance, la NASA pourra bientôt proposer une ligne directrice claire; dans l’idéal, cela permettra de pérenniser l’accès à l’espace dans ce contexte incertain. Il sera donc intéressant de se pencher sur les contributions des chercheurs, mais aussi et surtout d’observer les réactions qu’elles vont susciter dans les sphères politiques et industrielles.