Une étude française s’est intéressée aux trajectoires de sommeil des plus de 65 ans. Elle démontre notamment que la durée de sommeil a tendance à s’allonger plus rapidement chez ceux qui développeront une démence au cours du suivi par rapport à ceux qui n’en ont pas développé dès 12 ans avant la pose du diagnostic.
Sommeil et démence entretiennent des relations complexes. En effet, de nombreuses études visant à retrouver des liens entre la mauvaise qualité du sommeil des personnes vieillissantes et le risque de développer une maladie neurodégénérative ont souvent conduit à des résultats contradictoires. Une étude menée par l’Institut des neurosciences de Montpellier (INM) tout récemment publiée s’est intéressée à l’étude au cours du temps des trajectoires de sommeil en répétant différentes mesures (questionnaires sur le sommeil, tests cognitifs, visites médicales régulières, six au total sur quatorze ans) pour voir si des modifications se produisaient dans les habitudes de sommeil des plus de 65 ans.
La durée de sommeil augmentait de façon significative chez les sujets qui ont développé une démence au cours du suivi »
Pour cela, les chercheurs ont conduit leurs travaux à partir d’une cohorte épidémiologique dite des 3C (3 Cités, Dijon, Bordeaux, Montpellier) composée de participants âgés de 65 ans et plus et ont comparé sur 14 ans, deux groupes distincts. D’un côté, près de 700 sujets qui n’ont pas développé de démence au cours du suivi et de l’autre 182 patients chez qui un diagnostic de démence a été posé au cours du suivi.
« Nous avons pu modéliser des trajectoires de sommeil spécifiques en nous intéressant à différents facteurs tels que la durée de sommeil, le temps passé au lit, les heures de coucher, de lever, la somnolence diurne et les siestes », précise Clémence Cavaillès, chercheuse en épidémiologie à l’INM. Les principaux résultats de ce travail montrent que plusieurs années avant le diagnostic de démence, la durée de sommeil et le temps passé au lit augmentent plus rapidement chez les sujets qui ont développé une démence, avec une heure de coucher plus précoce. « Nous avons retrouvé que la durée de sommeil augmentait de façon significative chez les sujets qui ont développé une démence au cours du suivi par rapport à ceux qui n’en ont pas développé dès 12 ans avant la pose du diagnostic. En revanche, aucune différence n’a été observée sur l’heure de réveil, les siestes ou la somnolence diurne », précise la chercheuse.
« Les perturbations du sommeil pourraient augmenter le risque de développer une démence »
Reste encore à bien comprendre les mécanismes sous-jacents (stress oxydatif, inflammation) et aussi à mieux étudier la relation entre sommeil et démence comme la maladie d’Alzheimer aujourd’hui considérée par les chercheurs comme étant potentiellement bidirectionnelle. « Ce qui signifie en résumé que les perturbations du sommeil pourraient augmenter le risque de développer une démence et que le développement d’une démence pourrait également entrainer des perturbations du sommeil », résume Clémence Cavaillès. Afin de conforter leurs résultats, les chercheurs aimeraient pouvoir désormais poursuivre leurs travaux avec une cohorte de sujets plus jeunes, des quadragénaires, afin de voir si ces modifications des trajectoires de sommeil s’installent encore plus précocement et ce avant même l’âge de 65 ans.