Victime d’inondations « dévastatrices », le Pakistan a lancé vendredi à l’ONU un appel désespéré à sauver la planète, menacée par le dérèglement climatique. « Ce qu’il s’est passé au Pakistan ne restera pas cantonné au Pakistan », a lancé le Premier ministre Shehbaz Sharif.
Le Premier ministre Shehbaz Sharif a lancé, vendredi 23 septembre à l’ONU, un appel désespéré à sauver la planète, alors que son pays, le Pakistan, a été dévasté par des inondations records dues au réchauffement climatique.
Lorsque le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, s’était rendu le 10 septembre dans ce pays sous les eaux, il s’était écrié n’avoir « jamais vu un carnage climatique de cette ampleur ».
« Calamité » climatique
À la tribune de l’Assemblée générale de l’ONU vendredi, le chef du gouvernement pakistanais Shehbaz Sharif a enfoncé le clou : « Le Pakistan n’a jamais vu une telle illustration absolue et dévastatrice de l’impact du réchauffement climatique. » Le Premier ministre, dans un discours vibrant, a ajouté une sombre prédiction.
Il a prévenu la communauté internationale que cette « calamité » climatique due à des pluies de « mousson monstrueuses » n’était qu’un prélude à ce qui attend le reste du monde. « Une chose est très claire : ce qu’il s’est passé au Pakistan ne restera pas cantonné au Pakistan », a lancé Shehbaz Sharif, la voix parfois prise par la colère et le visage fermé.
D’après le dirigeant, « la définition même de la sécurité nationale a aujourd’hui changé et à moins que les dirigeants mondiaux ne s’unissent et n’agissent maintenant sur un programme minimal, il n’y aura plus de Terre pour y mener des guerres ».
« La Nature va contre-attaquer et pour cela, l’humanité n’est pas de taille », a prévenu le leader de 71 ans, au pouvoir à Islamabad depuis avril.
Causées par des pluies de mousson diluviennes, à la force accrue par le réchauffement climatique selon des experts, les inondations avaient recouvert un tiers du Pakistan – soit la superficie du Royaume-Uni – et ont provoqué la mort de près de 1 600 personnes depuis juin, selon le dernier bilan.
Habitations, commerces, routes, ponts et récoltes agricoles ont été détruits.
Plus de sept millions de personnes déplacées
Islamabad a évalué ses pertes financières à 30 milliards de dollars et son ministre des Finances, Miftah Ismail, a annoncé vendredi sur Twitter qu’il demanderait un allègement de sa dette auprès de créanciers bilatéraux.
Dans ce pays coincé entre l’Afghanistan, l’Iran, l’Inde et la Chine, plus de sept millions de personnes ont été déplacées, beaucoup vivant dans des camps de fortune sans protection contre les moustiques et où manquent l’eau potable et les sanitaires.
Sur place début septembre, Antonio Guterres avait exhorté les grands pollueurs de la planète à « arrêter cette folie » consistant à investir encore dans les énergies fossiles.
La star hollywoodienne Angelina Jolie, qui s’est aussi rendue au Pakistan cette semaine en tant qu’émissaire du Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), a déclaré n’avoir « jamais rien vu de tel » et que cela devait servir d’avertissement au reste du monde.
Injustice climatique
Mais pour Islamabad, les effets du climat sont particulièrement injustes pour un pays pauvre en développement de 220 millions d’habitants et d’à peine 350 milliards de PIB annuel en 2021, selon la Banque mondiale.
« Pourquoi mon peuple paie le prix d’un tel réchauffement climatique » alors que le Pakistan représente 0,8 % des émissions mondiales de CO2, s’est interrogé le Premier ministre. Il s’est emporté contre une « Nature (qui) a déchaîné sa furie contre le Pakistan sans même regarder notre empreinte carbone ».
« Le Pakistan et les Pakistanais n’ont pas créé cette crise dont ils sont (maintenant) les victimes » en raison de « l’industrialisation de plus grands pays », a renchéri devant la presse à l’ONU le jeune ministre des Affaires étrangères, Bilawal Bhutto Zardari.
« Nous ne faisons pas la charité, nous ne voulons ni armes, ni aide. Mais la justice pour notre peuple et pour les autres pays frappés par le (dérèglement du) climat », a lancé ce fils de l’ex-Première ministre Benazir Bhutto, tuée en 2007, et de l’ancien président Asif Ali Zardari.
Dans le hall du palais des Nations unies à New York, des photos et des cartes du Pakistan sous les eaux sont exposées. L’une est frappée de cette affirmation : « Aujourd’hui, c’est le Pakistan. Demain, ça peut être n’importe quel autre pays ! »
AFP