Une Française au sommet ! Le prix Nobel de littérature a été décerné ce jeudi à Annie Ernaux. Elle succède au romancier britannique d’origine tanzanienne Abdulrazak Gurnah (2021) et à la poétesse américaine Louise Glück (2020).
L’écrivaine de 82 ans est récompensée pour « le courage et l’acuité clinique avec laquelle elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle », a expliqué le jury Nobel. C’est un « très grand honneur » et une « responsabilité », a réagi la lauréate à la télévision suédoise. Elle devient la 17e femme à décrocher le Nobel de littérature, et le 16e lauréat français depuis la fondation des célèbres récompenses en 1901.
Un style clinique, dénué de tout lyrisme
Par le biais d’une oeuvre essentiellement autobiographique, Annie Ernaux a produit une remarquable radiographie de l’intimité d’une femme qui a évolué au gré des bouleversements de la société française depuis l’après-guerre.
Cette professeure de littérature à l’université de Cergy-Pontoise a écrit une vingtaine de récits dans lesquels elle dissèque le poids de la domination de classes et la passion amoureuse, deux thèmes ayant marqué son itinéraire de femme déchirée par ses origines populaires. Parmi ceux-ci figurent notamment « Des armoires vides » (1974), « la Place » (1982) ou « Les années » (2008) ou plus récemment « Mémoire de filles » (2018).
« Dans son oeuvre, elle explore constamment l’expérience d’une vie marquée par de grandes disparités en matière de genre, de langue et de classe », a souligné l’académicien Anders Olsson. Son style clinique, dénué de tout lyrisme fait l’objet de nombreuses thèses.
Critiques et pronostiqueurs étaient partagés entre deux écoles cette année : ceux qui voient dans les derniers prix la confirmation que l’Académie n’aime pas les écrivains déjà reconnus, a fortiori quand ils écoulent déjà beaucoup de livres ; ou ceux qui pensent qu’elle pourrait varier en sacrant un auteur de renommée mondial.
Plusieurs polémiques par le passé
L’Académie suédoise se remet par ailleurs d’une longue crise, après un scandale #Metoo en 2018 et l’attribution l’année suivante d’un Nobel controversé à l’écrivain autrichien Peter Handke aux sulfureuses positions pro-Milosevic. Réputée – et critiquée – pour ses choix masculins et eurocentrés, elle a depuis successivement sacré une Américaine et un auteur né à Zanzibar dont l’œuvre est centrée sur les tourments de l’exil et des réfugiés, l’anticolonialisme et l’antiracialisme.
leparisien