La Belgique coupe les vivres à l’Exécutif des Musulmans

Accusé d’opacité et d’être le jouet d’ingérences étrangères, l’Exécutif des musulmans de Belgique (EMB) n’est plus reconnu comme l’interlocuteur officiel des autorités belges.

En effet, l’Exécutif belge a coupé les vivres à l’organe de gestion du culte musulman en dénonçant selon le ministre belge de la justice, chargé des cultes, Vincent Van Quickenborne, « une action grossièrement inconstitutionnelle ».

Rappelons que le ministre Vincent Van, un libéral flamand, avait fait l’objet dernièrement d’une tentative de kidnapping de la part du gang Macro Mafia.

Le couperet est donc tombé à la mi-septembre, et est maintenant mis à exécution. De fait, le ministre prive cet organe, qui est l’interlocuteur officiel des autorités et est chargé de la gestion temporelle de ce culte, de sa reconnaissance officielle et de sa subvention qui était de 639.000 euros en 2021.

C’est un peu entrer dans le contexte du dicton de “brûler ce que l’on a adoré“. En effet, l’EMB, une instance qui, au moment de sa reconnaissance officielle, au milieu des années 1990, apparaissait comme un modèle en Europe, semble être, du jour au lendemain, devenu aux yeux de l’autorité belge, l’ennemi numéro un à combattre.

Ce que reproche l’exécutif de Belgique à l’EMB ? De ne pas être assez indépendant, trop peu démocratique et transparent, et surtout être objet d’ingérences étrangères… du Maroc et la Turquie, en l’occurrence les deux communautés les plus nombreuses parmi les 400.000 membres que compte la communauté musulmane en Belgique.

Cela ne date pas d’aujourd’hui. « Je refuserai désormais toute importation d’imams, l’influence étrangère doit diminuer », disait déjà, à l’époque en 2017, le secrétaire d’Etat aux migrations Theo Francken.

La Belgique veut réduire l’influence de « certains pays sur sa communauté musulmane, ceux dont elle estime les agents trop actifs, et qui contrôlent indirectement une bonne partie des mosquées, reconnues ou non ».

La Sûreté (le renseignement intérieur de Belgique) avertissait, quant à elle, en 2020, de la persistance d’une « ingérence étrangère », ce qui a visiblement pesé sur la décision du ministre actuel Van Quickenborne.

D’autres arguments ne sont pas en reste et ont influé cette décision, comme la structure même de l’EMB dont les administrateurs ne se sont plus réunis depuis près de trois ans, sa gestion (confiée à 17 personnes censées être représentatives des divers courants) est accaparée par une poignée de personnes et, surtout, des élections censées avoir lieu en 2020 n’ont toujours pas été organisées. Elles devaient, dans l’esprit des autorités politiques, favoriser la mise en place d’un organe « pluraliste, inclusif, représentatif et transparent ». Le tout visant, en réalité, à faire naître un « Islam belge ».

Mais pas que, car de l’aveu, du conseil d’administration de l’EMB lui-même, des « éléments extrémistes » étaient infiltrés dans l’organe et que la volonté officielle de voir des femmes siéger semblait impossible à traduire dans les faits.

Le projet d’un « Islam belge » tombait dès lors à l’eau. Réduit aux « affaires courantes » depuis des semaines, plongé dans un vide juridique, l’EMB connaît une crise existentielle et l’appel du ministre à s’organiser pour créer un autre outil favorisant une meilleure intégration, semble illusoire.

Voilà donc et face aux problèmes constatés, le ministre Vincent Van Quickenborne a mis deux fois en demeure l’Exécutif de mettre fin aux manquements constatés. Des réunions de concertation ont également eu lieu. « Malgré de nombreuses promesses, les mesures nécessaires à cette fin n’ont toujours pas été prises à ce jour. De ce fait, la communauté musulmane de notre pays ne dispose toujours pas de la représentation à laquelle elle a droit, ce qui entrave l’intégration des musulmans dans notre pays« , avait expliqué le ministre récemment.

A noter que le culte musulman a été officialisé en 1974 en Belgique, ce qui l’autorisait notamment à bénéficier d’un financement public, à l’instar des cultes catholique, orthodoxe, juif, protestant et anglican, ainsi que du mouvement de l’Action laïque.

Le gouvernement était tenu par la Constitution de reconnaître un organe représentatif de la communauté musulmane. La mission de cette instance : désigner des imams payés par le ministère de la justice et des professeurs de religion islamique – les cours « religieux et philosophiques » sont au programme des écoles primaires et secondaires –, instruire les dossiers de reconnaissance des mosquées et, ensuite, exercer la tutelle sur elles, etc.

HESPRESS

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