Les conseillers ont voté par 111 voix pour, 0 contre et 0 abstention le texte qui valide de nouveau la militarisation de la police malienne. De nouveau car il y a trois décennies, la police avait déjà été militarisée.
Selon la transition malienne, le but de cette remilitarisation est de permettre de déployer les unités de la police nationale et de la Protection civile « dans les zones reconquises par l’armée afin d’y assurer la sécurité des populations et de leurs biens et empêcher le retour des groupes terroristes ». Le but de cette militarisation de la police est d’assurer la sécurité de l’administration et des populations.
Manque de concertations
Avant le vote du projet de loi, les organisations syndicales de la police ont dénoncé le manque de concertations autour de la loi et un processus conduit de « manière unilatérale ». La Synergie des syndicats de la police nationale laissait entendre que la militarisation de la police n’était pas opportune car, dit, la synergie « malgré ses maigres moyens, la police est présente sur les théâtres d’opération, partout sur l’ensemble du territoire national et participe à la défense opérationnelle du territoire ».
Pour le spécialiste des questions de défense et de sécurité Boubacar Salif Traoré, il faudra toutefois encore du temps avant de voir se concrétiser sur le terrain cette militarisation de la police.
Boubacar Salif Traoré : La deuxième phase va être la mise en place d’une commission technique qui va réfléchir sur les modalités de cette militarisation, pour réfléchir ensemble quels sont les équipements et quels sont les grades, l’équivalence des grades entre policiers et militaires et agents de la protection civile. Et bien évidemment, c’est quelque chose qui ne peut pas se faire dans la foulée.
DW : Les syndicats de police estiment que la police était déjà sur le terrain, sur les théâtres d’opération. Pourquoi alors cette loi, selon vous ?
La police sur le terrain, elle n est pas équipée, elle n’est pas formée pour être sur le terrain dans un contexte de lutte contre les groupes armés terroristes. C’est en cela que l’Etat veut apporter une solution.
Les questions de grade et le fait aussi que la police estime qu’elle n’a pas été consultée. Est-ce qu’on peut s’attendre à des mécontentements dans les jours à venir ? Est-ce que tout cela peut s’avérer inefficace, en tout cas dans la lutte contre le terrorisme au Mali ?
Bien évidemment, tout le monde ne sera pas satisfait de cette décision, c’est comme toutes les décisions d’ailleurs. Mais je pense que les policiers comprennent la situation du pays et expriment ce besoin d’être mieux équipés pour faire face à la situation, parce qu’il est très difficile d’envoyer des personnes sur le terrain qui n’ont ni la formation adéquate, ni les équipements qu’il faut pour aller sur des théâtres d’opération extrêmement violents. On a évoqué les grades, mais il y a aussi des avantages qui sont payés aux militaires, notamment en termes de primes auxquelles ils policiers vont pouvoir prétendre.
Est-ce qu’on peut s’attendre à une amélioration dans la lutte contre le terrorisme avec cette militarisation-là ?
Je reste convaincu que, au centre, ça apportera des fruits. Maintenant, en remontant vers le nord, la situation est un peu plus délicate du fait de l’étendue du territoire et des zones parfois isolées.
dw