Officiellement nommé chef du gouvernement britannique par le roi Charles III, Rishi Sunak a affirmé, mardi midi, lors de son discours devant le 10 Downing Street, vouloir commencer « immédiatement » à réparer les « erreurs » commises sous Liz Truss.
Passation de pouvoir au Royaume-Uni entre Liz Truss et Rishi Sunak. Au lendemain de sa victoire au sein du Parti conservateur britannique, Rishi Sunak a rencontré, mardi 25 octobre dans la matinée, le roi Charles III, qui l’a nommé officiellement Premier ministre, le troisième en deux mois dans un pays en proie à une instabilité inédite et une profonde crise sociale.
C’est la première fois que Charles III nomme un chef de gouvernement. L’ancienne locataire de Downing Street, Liz Truss, avait été reçue par Elizabeth II le 6 septembre lors d’une audience au château écossais de Balmoral. La souveraine de 96 ans était décédée deux jours plus tard.
Ex-banquier et ministre des Finances, Rishi Sunak devient, à 42 ans, le plus jeune chef de gouvernement de l’histoire contemporaine du Royaume-Uni après une ascension fulgurante en politique. Il est aussi le premier d’origine indienne et le premier originaire d’une ancienne colonie britannique.
Le nouveau Premier ministre a averti de « décisions difficiles » à venir pour réparer les « erreurs » commises sous Liz Truss, poussée à la démission après une tempête financière provoquée par son programme économique.
« Je placerai la stabilité et la confiance économiques au cœur du programme de ce gouvernement. Cela signifie que des décisions difficiles devront être prises », a déclaré le chef de gouvernement de 42 ans pour sa première intervention depuis le perron du 10 Downing Street.
Un peu plus tôt, dans la matinée, Liz Truss, qui a démissionné le 20 octobre après seulement 44 jours au pouvoir, avait fait un dernier discours devant la résidence du Premier ministre avant de se rendre au palais de Buckingham pour remettre sa démission au roi.
« Je souhaite à Rishi Sunak tous les succès possibles pour le bien de notre pays », avait-elle déclaré, se disant « plus convaincue que jamais qu’il faut être audacieux face aux défis » et que « l’Ukraine doit plus que jamais être soutenue ».
Le président de la République Emmanuel Macron a adressé mardi ses « félicitations » au nouveau Premier ministre britannique, dans un message publié sur Twitter. « Félicitations à Rishi Sunak qui devient Premier ministre du Royaume-Uni. Ensemble, nous continuerons d’oeuvrer pour faire face aux défis du moment, dont la guerre en Ukraine et ses multiples conséquences pour l’Europe et pour le monde », a écrit le chef de l’État français.
Une période d’instabilité sans précédent
Après sa victoire au sein de sa formation lundi, Rishi Sunak a promis « stabilité et unité ». « Rassembler le parti et le pays sera ma priorité absolue », a-t-il déclaré dans une brève allocution. « Le Royaume-Uni est un grand pays, mais il ne fait aucun doute que nous sommes confrontés à un profond défi économique. »
Il devient le chef de gouvernement d’un pays confronté à une grave crise économique et sociale. L’inflation dépasse les 10 %, le plus haut taux dans le G7. Les prix de l’énergie flambent, comme ceux de l’alimentation. Le risque de récession plane. Il faudra aussi qu’il calme les marchés, ébranlés par les annonces budgétaires du gouvernement Truss fin septembre, dans l’ensemble depuis annulées en catastrophe.
Rishi Sunak arrive au pouvoir dans une période d’instabilité sans précédent : il est le cinquième Premier ministre britannique depuis 2016, quand le pays a choisi lors d’un référendum de sortir de l’Union européenne. Il est le troisième chef de gouvernement en deux mois.
Il a pris la tête d’un parti conservateur extrêmement divisé, après douze ans au pouvoir. Lundi, il a déclaré aux députés qu’ils devaient « s’unir ou mourir », alors que l’opposition travailliste est au plus haut dans les sondages à deux ans des législatives.
Plus de 60 % des électeurs souhaitent des élections avant la fin 2022
Rishi Sunak a exclu des élections anticipées, réclamées par le Labour. Mais selon un sondage Ipsos publié lundi, 62 % des électeurs souhaitent des élections avant la fin 2022. Et selon un autre sondage de l’institut YouGov, seuls 38 % des Britanniques sont satisfaits que Rishi Sunak devienne leur Premier ministre.
Ce Brexiter de la première heure, qui passe pour un pragmatique travailleur, devra former un gouvernement rapidement, pour à la fois donner des gages aux marchés et satisfaire les clans de sa majorité, au risque de subir le même sort que Liz Truss. Il devra aussi s’expliquer sur ses intentions : il ne s’est pas exprimé pendant la campagne éclair des Tories qui a démarré jeudi.
Il s’est imposé sans programme ni vote des adhérents, après la renonciation de l’ex-Premier ministre Boris Johnson et l’échec de son adversaire Penny Mordaunt à se qualifier.
Pendant la précédente campagne, l’été dernier, lors de laquelle il avait été battu par Liz Truss, cet ancien chancelier de l’Échiquier (2020-2022) avait insisté sur la nécessité de lutter contre l’inflation, qualifiant le programme de sa concurrente, prévoyant d’importantes baisses d’impôt, de « conte de fée ». Sur l’immigration, il avait dit soutenir le programme ultra-controversé consistant à envoyer les migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni au Rwanda. Ce projet est cependant bloqué en justice.
AFP