Pierre Soulages est décédé à l’âge de 102 ans, a appris mercredi l’AFP auprès d’Alfred Pacquement, ami de longue date du peintre et président du musée qui porte son nom à Rodez. Le célèbre peintre français n’a cessé d’explorer pendant plus de 75 ans les mystères de la couleur
Cet artiste, toujours vêtu de noir, n’a cessé d’explorer pendant plus de 75 ans les mystères de ce pigment et de peindre.
Pierre Soulages est né le 24 décembre 1919, à Rodez, dans une maison modeste du début du XIXe siècle. Après la mort de son père, artisan carrossier, alors qu’il n’a que 5 ans, il est élevé par sa mère qui tient un magasin d’articles de pêche et de chasse. Il est admis aux Beaux-Arts à Paris à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Mais il sèche les cours, préférant se former à Montpellier. Il y rencontre en 1941 Colette Laurens qu’il épouse un an plus tard, muni de faux papiers pour échapper au Service du travail obligatoire (STO), qui obligeait de jeunes Français à travailler pour l’Allemagne. Le couple restera inséparable pendant 80 ans, fêtant en ce mois d’octobre 2022 ses noces de chêne.
Dès 1947, le jeune peintre s’installe à Paris où il est remarqué par Francis Picabia qui l’encourage, ainsi que Fernand Léger. La peinture abstraite a alors la cote. Mais elle est rouge, jaune, bleue. Soulages lui, choisit de travailler avec de l’humble brou de noix, utilisé pour teinter le bois, et des brosses de peintre en bâtiment.
Dans les années 1950, ses toiles entrent dans les plus prestigieux musées du monde comme le Guggenheim de New York ou la Tate Gallery de Londres. Il rencontre les principaux représentants de l’École de New York, dont Mark Rothko qui devient son ami.
Cent vitraux à Conques
En 1959, Soulages se fait construire une maison-atelier sur les hauteurs de Sète, dans le sud de la France, face à la Méditerranée, où il continuait de vivre. Il avait également deux ateliers à Paris.
L’artiste, qui préfère travailler à plat, bascule dans « l’outrenoir » en 1979 : alors qu’il peine sur une œuvre entièrement recouverte d’un noir épais, Soulages réalise qu’il vient de franchir un cap en la striant. « J’étais au-delà du noir, dans un autre champ mental », a-t-il raconté. « Le pot avec lequel je peins est noir. Mais c’est la lumière, diffusée par reflets, qui importe ».
En 1986, l’État lui passe commande de plus de 100 vitraux pour l’abbatiale Sainte-Foy de Conques. C’est lors d’une visite scolaire dans cette église romane qu’il avait eu, alors adolescent, la révélation de la peinture. Les vitraux sont inaugurés en 1994.
Deux expositions à Paris en 2019-2020
En décembre 2019, le musée national d’art moderne avait accroché 14 toiles de Pierre Soulages, dont certaines encore jamais exposées à Paris. Au total, le musée disposait de vingt-cinq œuvres du peintre, réalisées entre 1948 et 2002, soit la deuxième collection la plus importante après celle du musée de Rodez.
Plutôt qu’une grande rétrospective rassemblant une centaine d’œuvres, le Louvre s’était concentré sur une vingtaine de peintures du maître, considéré comme le plus grand artiste français vivant. Un choix resserré pour cet hommage, avec des prêts du monde entier, signe de sa reconnaissance de part et d’autre de l’Atlantique.
À l’occasion de ces deux expositions, Pierre Soulages avait accordé plusieurs interviews dans lesquelles il manifestait son envie de continuer à peindre. « Je trouve que cela a été bien court, il y a encore beaucoup à faire », confiait-il à France Inter.
Pierre Soulages : "Je trouve que cette vie a été courte ! Il y a encore beaucoup à faire." #le79Inter pic.twitter.com/XCub3vQBz2
— France Inter (@franceinter) December 20, 2019
AFP