Égypte : le détenu Alaa Abdel-Fattah empêché de voir son avocat, l’inquiétude s’accentue

Alaa Abdel-Fattah, emprisonné pour avoir diffusé de « fausses informations », a cessé de s’hydrater depuis l’ouverture de la COP27, il y a cinq jours, faisant craindre à sa famille une alimentation forcée. Le détenu le plus célèbre d’Égypte et l’icône de la révolution de 2011 est « sous traitement médical », après sept mois de grève de la faim, a annoncé, jeudi, l’autorité pénitentiaire .

 

Alaa Abdel-Fattah est-il alimenté contre son gré ? L’inquiétude grandit autour du détenu politique égypto-britannique, en danger de mort après sept mois de grève de la faim, l’autorité pénitentiaire affirmant qu’il est désormais « sous traitement médical » et refusant, jeudi 10 novembre, une visite à son avocat. 

Ses proches disent redouter que le blogueur prodémocratie soit nourri de force. Jeudi, quand sa mère Laila Soueif s’est présentée pour la 4e fois de la semaine devant sa prison à 100 kilomètres du Caire, elle a été éconduite par des officiers.

Ils lui ont annoncé que son fils, qui ne boit plus depuis l’ouverture de la COP27 en Égypte, dimanche, était « sous traitement médical » et que « le parquet en avait été informé ». Mais pas la famille ni ses avocats, accuse la sœur d’Alaa Abdel-Fattah, Mona Seif. Pour Hossam Bahgat, défenseur égyptien des droits humains, « cela veut dire qu’il est nourri de force ». 

 

La famille a entrevu un espoir quand le parquet a convoqué le matin Khaled Ali, l’avocat d’Alaa Abdel-Fattah, pour lui délivrer un permis de visite daté de mercredi soir.

Jeudi soir, le parquet égyptien a publié un communiqué, assurant que « tous les signes vitaux » du détenu étaient « normaux », qu’il était en « bonne santé » et qu’il n’avait « pas besoin d’être transféré dans un hôpital ». 

« Traitement cruel, inhumain et dégradant »

Mais « pour la deuxième fois, l’autorité pénitentiaire a refusé un permis de visite » estimant qu’il n’était plus valable jeudi, a écrit l’avocat sur Facebook après s’être rendu à la prison.

« Les autorités qui ont incarcéré Alaa Abdel-Fattah pour un simple post Facebook veulent en plus lui imposer un traitement cruel, inhumain et dégradant, en le forçant à subir un traitement médical », a réagi Human Rights Watch.

Amnesty International s’est inquiétée du fait que « les décisions médicales ne soient pas prises par des médecins indépendants non soumis à la coercition de la sécurité ».

 

« Il faut que notre mère puisse le voir, ou un représentant de l’ambassade britannique pour savoir dans quel état il se trouve vraiment », s’est alarmée Mona Seif.

Car faute de nouvelles, la famille est très inquiète : Alaa a-t-il été transféré vers une autre prison, vers l’hôpital de la prison ou n’est-il tout simplement plus en état d’être vu ?

Quelques jours à vivre

Ses défenseurs ne lui donnaient que quelques jours à vivre, à moins qu’il ne soit nourri de force – ce que le droit international considère comme de la « torture » et même un « crime contre l’Humanité ».

Jeudi, des centaines de participants à la COP27 à Charm el-Cheikh habillés de blanc comme les prisonniers égyptiens, ont scandé « Libérez les tous ! » en référence aux plus de 60 000 détenus politiques que compte l’Égypte, selon des ONG.

Faisant écho à d’autres pays occidentaux, les États-Unis, dont le président Joe Biden doit rencontrer vendredi son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi à la COP27 en Égypte, ont exprimé leur « profonde inquiétude » à propos d’Alaa Abdel Fattah et appelé à sa libération.

Le militant italien Giorgio Caracciolo a été lui « interdit de se rendre à la COP27 alors qu’il avait un visa valide », selon la Fédération internationale pour les droits humains.

La question des prisonniers en Égypte, 135e sur 140 pays au classement mondial de l’État de droit du World Justice Project, est désormais incontournable à la COP27.

Plusieurs dirigeants occidentaux ont réclamé la libération d’Alaa Abdel-Fattah. Vendredi, le président américain Joe Biden sera à la COP27 et compte évoquer la question des droits humains.

Face à la mobilisation internationale, la contre-campagne s’organise. Un député a pris à partie Sanaa Seif, l’autre sœur d’Alaa Abdel-Fattah, à la COP27 avant d’être expulsé par la sécurité de l’ONU. Un avocat a porté plainte contre elle pour « conspiration avec l’étranger » et « fausses informations ».

La représentation égyptienne à Genève a protesté auprès de l’ONU, qui a dénoncé « procès inéquitables » et « arrestations arbitraires » en Égypte.

Mystérieuse menace venue des réseaux sociaux

L’Égypte est par ailleurs plongée dans une grave crise économique. L’inflation dépasse les 16 % et la livre a perdu la moitié de sa valeur cette année.

De quoi alimenter la grogne sociale qui pourrait transformer en réalité une mystérieuse menace venue des réseaux sociaux : le mot-clé « Manifeste le 11/11 ».

Personne n’a revendiqué cet appel mais le déploiement policier a été renforcé et au moins 151 personnes ont été arrêtées ces dernières semaines selon Amnesty.

 AFP

You may like